Hugo Houle est formel : il n’a jamais vu ni entendu parler du Dr Michele Ferrari dans l’entourage de son équipe Astana.

Dimanche, un important quotidien danois a lié le controversé médecin à la formation kazakhe et son chef de file Jakob Fuglsang, sur la base d’un rapport secret de la Fondation antidopage de cyclisme (CADF), organisation indépendante qui gère le programme de l’Union cycliste internationale.

Ferrari, le préparateur italien derrière le système de dopage de Lance Armstrong et de l’équipe US Postal, est banni à vie depuis 2012 par l’agence américaine. Tout coureur qui collaborerait avec lui s’expose à une suspension d’un an à deux ans.

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Le Dr Michele Ferrari

« Je fais confiance à Fuglsang », a réagi Houle, joint mardi en Espagne, à la veille d’amorcer sa saison au Tour de Valence. « Je n’ai jamais vu Ferrari autour de l’équipe. Je n’en ai jamais ne serait-ce qu’entendu parler, dans aucune conversation. Je suis le premier surpris. »

Le Québécois a reçu un texto rassurant de Fuglsang, qu’il a bien servi l’été dernier dans le cadre de son premier Tour de France. « Il ne veut pas créer quelque chose de gros quand il n’a absolument rien à se reprocher. Il essaie de se concentrer sur gagner des courses. Il gère ça du mieux qu’il le peut. Il voulait juste me dire : pas de stress. »

Les quotidiens Politiken (Danemark) et VG (Norvège), de même que la chaîne de télévision publique danoise DR, ont également obtenu les déclarations de 12 personnes qui allèguent que Fuglsang aurait bénéficié d’un programme de dopage de Ferrari.

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Le chef de file de l'équipe Astana, Jakob Fuglsang.

Son coéquipier kazakh Alexey Lutsenko aurait assisté à au moins une rencontre entre les deux hommes dans la région de Nice-Monaco. Les médias scandinaves ont aussi rapporté que Fuglsang aurait été vu en pleine session d’intervalles derrière une moto pilotée par Ferrari.

Nouveau résident de Monaco depuis le début de l’année, Houle est perplexe face à cette dernière accusation : « Je ne pense pas que Fuglsang irait en derrière-scooter avec Ferrari à Monaco quand il y a 50 cyclistes professionnels qui vivent là. Tu les croises les uns après les autres en faisant ton entraînement. »

Fuglsang, Lutsenko et Ferrari ont nié les allégations les concernant dans des messages diffusés sur leur plateforme internet respective. L’équipe Astana, dont le patron Alexandre Vinokourov a travaillé avec Ferrari et a été suspendu deux ans pour dopage sanguin en 2007, a également réfuté tout lien avec le sulfureux préparateur.

Ces accusations surviennent alors que Fuglsang, médaillé d’argent aux Jeux olympiques de Rio en 2016, vient de connaître la meilleure saison de sa carrière à 34 ans. Classé troisième mondial, il a remporté la classique Liège-Bastogne-Liège et le Critérium du Dauphiné, avant de se blesser sur chute au Tour.

Au moment où il commence un nouveau contrat de trois ans avec Astana, dont il porte les couleurs depuis 2018, Houle est conscient qu’une telle histoire est mauvaise pour son image et celle de sa formation.

« Je suis encore obligé de me justifier, de me défendre, a constaté l’athlète de 29 ans. Personnellement, je sais ce que je fais. Je me couche le soir et je dors bien tranquille. Je connais très bien mon équipe. Je sais qu’il n’y a rien de malsain chez Astana. Malheureusement, on a une image qui nous colle à la peau. […] Quand une nouvelle comme ça sort, elle est exponentiellement communiquée. Parce que c’est Astana, Vinokourov. Pour ma part, je n’ai rien vu, rien entendu. Je suis transparent. Jamais le nom de Ferrari n’est sorti. »

La réputation de son sport étant ce qu’elle est, Hugo Houle n’est néanmoins pas surpris des doutes soulevés dans le grand public.

« Ça laisse des traces. Les gens peuvent penser ce qu’ils veulent. On est des professionnels. À un moment donné, tu réussis, il y en a qui jalousent. Je les comprends. Où placer la ligne de ce qu’il est possible de réaliser comme performances ? Tout peut être remis en question. À la fin de la journée, je sais pourquoi je le fais. Mes proches connaissent aussi mon attitude et tous les sacrifices auxquels je consens. »

Pour le reste, il laisse à ses coéquipiers et à leurs avocats le soin de gérer cette crise. « Ce sont de graves allégations. Je ne pense pas que ça s’arrêter là. Tu ne peux pas lancer des nouvelles comme ça sans fondement. Quelqu’un devra répondre. »

Direction Tour de France/JO

Si Jakob Fuglsang vise le Giro plutôt que le Tour de France cette année, Hugo Houle garde le cap sur la Grande Boucle, qu’il compte disputer pour la deuxième fois en juillet. Si tout se déroule comme prévu, le natif de Sainte-Perpétue enchaînera directement avec les Jeux olympiques de Tokyo. Après un stage de deux semaines à Calpe, il lance sa saison mercredi au Tour de Valence, en Espagne, avec pour première grande cible Paris-Nice (8-15 mars). « La forme est bonne, a-t-il évalué. J’ai fait du bon travail cet hiver, sans m’affoler. Les objectifs viendront plus tard en saison, ça ne sert à rien de s’emballer et de trop en faire rapidement. En termes d’heures et de volume, c’est pas mal similaire à ce que j’ai fait l’an dernier. »