Il s'est senti fléchir à partir de la mi-course. Ses sensations ont été confirmées par le silence dans son oreillette. Le maillot de leader était en train de lui filer entre les doigts.

Après trois jours en jaune, David Veilleux a été délogé de la tête du prestigieux Critérium du Dauphiné à l'issue de la quatrième étape, mercredi, au parc des Oiseaux, en France.

Ce n'était pas une surprise, mais le cycliste de Cap-Rouge ne pouvait cacher sa déception après avoir pris le 76e rang du contre-la-montre individuel de 32,5 km, à 3 min 53 s du gagnant, l'Allemand Tony Martin, simplement dominant.

«J'ai donné tout ce que j'avais, mais ce que j'avais n'était pas assez pour garder le maillot, a simplement constaté Veilleux au téléphone, une heure après la fin de l'épreuve. C'est sûr qu'il y a de la déception un peu. J'aurais aimé être capable de le conserver encore une journée. Mais je n'ai pas de regrets.»

Si le changement de leader n'est pas étonnant, l'identité du nouveau détenteur du maillot jaune l'est un peu.

Deuxième de l'étape à 47 secondes, le jeune Australien Rohan Dennis (Garmin-Sharp), un ancien pistard de 23 ans, a surpris le Britannique Chris Froome (3e, + 52 s), grand favori du prochain Tour de France. Son grand rival attendu, l'Espagnol Alberto Contador, a été repoussé à la 61e place (+3 min 37 s), apparemment ralenti par des allergies.

Veilleux, lui, se sentait très bien en première moitié de parcours, mais a «flanché un peu» par la suite. Au premier intermédiaire, même si son avance avait fondu de près de la moitié, les encouragements de son directeur sportif lui laissaient penser que c'était «jouable». Or, au deuxième (21,5 km), son maillot ne tenait plus qu'à un fil

(4 secondes). Ce fut le silence radio.

«Je m'en rendais compte aussi, a précisé Veilleux. Je trouvais que je manquais de rythme, je n'avais pas la même force qu'au début.»

La simple lecture de la feuille de résultats démontre qu'il n'a pas à rougir de sa performance. Impossible de connaître les dispositions et les motivations de chacun, mais pas très loin du Québécois, devant ou derrière, il y a des noms comme Contador, Joaquim Rodriguez, Vasil Kiryenka, Lieuwe Westra, Damiano Cunego.

«Le contre-la-montre, c'est l'épreuve de vérité, a rappelé le membre de l'équipe Europcar. On ne peut pas tricher. C'est le meilleur qui gagne. C'est sûr que les aspects position et équipement jouent pour beaucoup. Encore là, c'est le moteur sur le vélo qui fait la différence. Je n'ai pas honte d'être à ce niveau-là. Ce sont quand même les meilleurs au monde qui sont là.»

Depuis sa troisième place aux Championnats canadiens de 2011, Veilleux a également mis en veilleuse la préparation pour le contre-la-montre au profit de l'entraînement en montagne.

«Il a perdu un peu de puissance et ça va aussi avec une perte de poids (71 à 69 kg, ndlr) pour qu'il puisse mieux monter les cols, a souligné son entraîneur Pierre Hutsebaut. Il ne s'attendait pas à faire un seul contre-la-montre significatif cette année.»

L'objectif était d'améliorer son profil pour une éventuelle sélection pour le Tour de France, là où il aurait à se mettre au service exclusif de ses leaders. Sa victoire d'étape et ses trois jours en jaune donnent du poids à sa candidature, mais les quatre prochains jours au Dauphiné, alors que la haute montagne se dressera devant le peloton, seront aussi importants.

«Je pense que oui, a convenu Veilleux. En plus, je suis septième au classement général. Il ne faut pas que je perde la concentration. [Jeudi], il y a une arrivée au sommet. Ça va me permettre de me tester un peu. Si jamais ça va moins bien et que je perds beaucoup de temps, je vais être à 100% pour Pierre Rolland et Thomas Voeckler.»