Williams est à la Formule 1 ce que le Canadien est au hockey. Sans cette écurie figurant parmi les plus titrées, le paysage des paddocks ne serait pas tout à fait le même. Près de 40 ans après sa fondation, au moment où elle est en eaux troubles, Williams n'est plus le fait d'un seul homme. À la tête de celle-ci, il y a dorénavant un certain air de famille...

On ne cherche plus Frank Williams dans l'allée principale des paddocks. Lorsque son équipe arpente les circuits de la planète, le grand patron de l'écurie britannique passe dorénavant le plus clair de son temps à Grove, en Angleterre, là où est installée l'écurie. À distance, Sir Frank supervise les semaines de course. Son relais sur place? Claire.

Depuis le 27 mars dernier, la fille du fondateur de l'écurie éponyme assume le rôle de directrice adjointe. Un titre synonyme de successeure désignée du doyen des paddocks. Jusqu'ici directrice des communications et du marketing, Claire Williams est à présent chargée du budget, des relations avec la Fédération internationale de l'automobile et avec la FOM - la société d'exploitation de la F1 de Bernie Ecclestone -, et a surtout pour mandat de redorer le blason d'une équipe moribonde.

«Je suis très chanceuse d'avoir mon père tous les jours. Je suis très proche de lui. On travaille ensemble, on se fait confiance mutuellement. Il tient compte de mon opinion, c'est extraordinaire de travailler avec mon père. Je pense que mon père était un peu inquiet pour moi au début à l'idée d'occuper ce poste, mais pas autant que ma mère [morte en mars dernier]. Elle connaissait les sacrifices que cela représente, le travail que cela demande, elle savait que je pouvais le faire, mais elle en était plus inquiète que lui», a confié à La Presse Claire Williams, rencontrée au Grand Prix d'Espagne.

Tout comme Monisha Kaltenborn, directrice de l'écurie Sauber, celle qui aura 37 ans le mois prochain détonne dans le paysage de la Formule 1. Mais n'allez pas lui faire remarquer qu'elle est une femme dans un monde d'hommes. «C'est un milieu où les hommes prédominent», nuance-t-elle.

«C'est important d'avoir des femmes à ce genre de poste stratégique. On peut démontrer ce que l'on peut faire, les femmes, en Formule 1», ajoute-t-elle, en ne doutant pas un instant de la possibilité de voir une femme derrière le volant d'une monoplace à l'avenir. Ce que l'on a déjà vu dans le passé.

Très à l'aise dans ce milieu dans lequel elle baigne depuis fort longtemps, elle a vu sa récente nomination accueillie très «positivement» par le paddock. «Williams est une équipe particulière que les gens apprécient et à qui on souhaite une certaine réussite», dit-elle.

Après les victoires

Fondée en 1975, Williams est, avec Ferrari et McLaren, l'une des doyennes de la Formule 1. Une longévité que Claire Williams attribue à la clairvoyance de la direction et à la performance de ses employés. «Et plus vous gagnez, plus vous attirez l'attention et suscitez l'envie de travailler avec vous», ajoute-t-elle. Sans compter qu'à sa tête, l'écurie a un «batailleur» en la personne de son père.

Cet amalgame ne suffit cependant plus aujourd'hui pour assurer le spectacle et obtenir des résultats probants. Au cours des 10 dernières années, Williams n'a remporté que 2 Grands Prix. On est très loin des décennies dorées, et surtout des années 90.

Ce que reconnaît sans peine Claire Williams: «La victoire est quelque chose de fantastique et de grisant, d'addictif. Les années 80 et 90 ont été une période merveilleuse pour l'équipe. Ne plus gagner et perdre des courses est difficile et douloureux pour tout le monde, et ce n'est pas ce que l'on souhaite. Nous ne courons pas pour ne pas marquer des points ou pour finir simplement huitièmes du classement des constructeurs [l'an dernier]. Nous devons changer cette dynamique.»

Lorsqu'on lui demande comment, le discours politique prend le dessus. «Il faut travailler dur, ne pas paniquer, être passionné, mettre en place des solutions aux problèmes. Nous avons pour cela des installations incroyables en Angleterre. [...] Je ne peux qu'imaginer l'avenir de l'équipe dans la victoire. Mais c'est un long processus, c'est beaucoup de travail. Il y a tellement de compétition en Formule 1 de nos jours.»

Les premières courses de la saison n'augurent pas grand-chose de bon. L'un comme l'autre, la jeune recrue Valtteri Bottas et le Vénézuelien Pastor Maldonado n'ont pas fait mieux qu'une 11e place.

«Nous ne sommes pas satisfaits de ce début de saison, ce n'est pas là où nous voulons être et nous n'allons pas y rester», commente Claire Williams.

Le «boss», c'est elle.

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WILLIAMS AU FIL DES ANS

> Premier Grand Prix: Argentine, 1975.

> Championnat du monde des pilotes: 1980, 1982, 1987, 1992, 1993, 1996, 1997.

> Championnat du monde des constructeurs: 1980, 1981, 1986, 1987, 1992, 1993, 1994, 1996, 1997.

> Quelques grands pilotes: Damon Hill, Alan Jones, Nigel Mansell, Alain Prost, Ayrton Senna, Jacques Villeneuve.