La victoire du Vénézuélien Pastor Maldonado au Grand Prix d'Espagne de Formule 1, en mettant fin à huit ans de disette pour l'écurie Williams F1, a ouvert un nouveau chapitre de l'histoire extraordinaire de l'écurie fondée fin 1977 par Sir Frank Williams et son ami Patrick Head.

Des titres mondiaux à répétition, 16 au total dans les années 80 et 90, des dizaines de victoires, puis une tragédie absolue, la mort d'Ayrton Senna, idole de la F1, en mai 1994 à Imola. Peu d'équipes auraient survécu à un tel drame, réussi à reprendre le fil de leur vie commune, pour gagner à nouveau.

Williams F1 l'a fait, avec toutes sortes de moteurs (Mecachrome, Supertec,   BMW, Toyota, Cosworth) dans des monoplaces soignées, parce que fondamentalement artisanales, conçues dans l'esprit originel de la F1. Sauf que depuis 1977 l'effectif a bien augmenté, il y a une filiale spécialisée dans la technologie hybride, Williams Hybrid Power, et une antenne au Qatar.

Car Sir Frank, coincé dans un fauteuil roulant depuis 1986 et un accident de voiture à côté du circuit Paul Ricard, dans le Var, a toujours vu plus loin. Et sa technologie hybride équipe les nouvelles Audi R18 e-tron qui vont disputer le mois prochain, et peut-être remporter, la 80e édition des 24 Heures du Mans.

La société Williams F1, malgré huit saisons sans la moindre victoire, vient de publier des résultats 2011 en hausse, autant en termes de chiffre d'affaires (126,5 millions d'euros) que de bénéfice (12,1 millions d'euros). La transition se fait en douceur entre Sir Frank, 70 ans, et sa fille Claire, aux commandes d'une écurie qui reste l'une des trois meilleures de l'histoire de la F1, avec Ferrari et McLaren.

Bruno sur les traces d'Ayrton

Bien sûr, il y a les pétrodollars vénézuéliens apportés par Maldonado et le gouvernement d'Hugo Chavez, soit près de 30 millions d'euros par an, mais ça ne suffirait pas si le bon Pastor n'était pas un pilote de haut niveau, champion de GP2 en 2010 et capable de résister pendant tout le GP d'Espagne à Fernando Alonso et Kimi Räikkönen.

Preuve supplémentaire du nouveau respect qu'il inspire à ses pairs, Fernando et Kimi l'ont porté en triomphe, sur leurs épaules, sur le podium de Montmelo. Ça n'arrive pas si souvent en F1 et c'était un symbole de plus, peu de temps avant qu'un incendie ne ravage le stand Williams et fasse craindre le pire dans le paddock. Comme un résumé de l'histoire de Williams, entre fêtes et drames.

Chez Williams, Monaco 2012 ne sera pas comme les autres, dans une Principauté où le roi Ayrton a longtemps régné en maître absolu. Et pour que la symbolique soit complète, le neveu d'Ayrton, Bruno Senna, tentera de se montrer digne de son oncle au volant de sa  Williams-Renault portant le numéro 19.

Monaco, c'est aussi un tracé que Maldonado, socialiste revendiqué et résident monégasque, aime beaucoup. Il y a déjà triomphé trois fois, en GP2 et en Formule Renault. «Ici, c'est spécial pour moi, c'est mon circuit préféré et j'y suis souvent rapide», a dit Pastor mercredi, gonflé à bloc par sa victoire catalane.

La F1 à Monaco, c'est une histoire d'argent et de glamour, mais pas seulement. C'est aussi une histoire d'hommes, de patrimoine sportif et de passion pour la course automobile. Dans ce domaine-là, Williams ne s'est jamais éloigné de la première ligne.