« Je n’aurais jamais pensé faire 5 jours. Ça fait 30 ans. » C’est par un concours de circonstances que Gino Rosato a fait son entrée chez Ferrari, en 1991. Trente ans plus tard, il fait partie de l’équipe de gestion et est un membre à part entière de la « famille » de la Scuderia.

Rien ne laissait présager que Rosato ferait carrière dans le monde de la course automobile. Le jeune Gino de 18 ans était plongeur dans un hôtel de Montréal pendant le Grand Prix du Canada quand son patron lui a demandé de se rendre au circuit Gilles-Villeneuve pour aider le chef cuisinier de Ferrari, qui s’était brûlé sérieusement.

Né d’une mère québécoise et d’un père italien, Rosato parlait déjà trois langues : le français, l’anglais et l’italien. Il a donc joué les traducteurs pour l’équipe. Et puis c’en était fait : le Québécois avait un pied chez Ferrari. L’année suivante, il s’est retrouvé à aider l’écurie avec la logistique.

« Ça s’est tellement bien passé que le monsieur de la logistique m’a demandé si je voulais faire d’autres Grands Prix. Je parlais les langues, personne ne les parlait. J’étais comme un astronaute », raconte-t-il à La Presse à l’intérieur du quartier général de Ferrari, derrière les paddocks du circuit Gilles-Villeneuve.

« Je suis parti cette année-là et j’ai fait cinq ou six Grands Prix. Mon père ne voulait rien savoir que j’arrête l’école. Mais je suis parti. »

Changement de vie

C’est en 1993 que Gino Rosato a eu « la chance qui a changé [sa] vie ». À la demande de l’ancien patron du Grand Prix du Canada, Normand Legault, il est allé chercher le patron du programme de course Peugeot Talbot Sport, Jean Todt, à l’aéroport. Ce dernier était en ville pour la série GT. Rosato a fait le taxi pour lui.

Un mois plus tard, Todt devenait chef d’équipe de la Scuderia. Logiquement, Rosato n’a fait ni une ni deux : il lui a passé un coup de fil. Si bien que Todt lui a trouvé une place au sein du département de logistique.

« Je suis devenu son bras droit », raconte le Québécois qui, au fil des années, a occupé de nombreux titres chez Ferrari. Le voilà aujourd’hui membre de l’équipe de gestion.

Je suis avec [le chef d’équipe de Ferrari Mattia] Binotto. Au quotidien, je règle les problèmes. Il y a différentes choses qui ne se voient pas. Moi, je suis derrière la scène. Je suis plus confortable là. Il y a beaucoup de choses qui se passent quotidiennement sur le plan politique.

Gino Rosato

Rosato a quitté Ferrari en 2009 pour devenir vice-président aux affaires corporatives chez Lotus. Au bout de trois ans, il était de retour avec la Scuderia. « Ferrari, c’est Ferrari. À la fin de la journée, c’est la vérité. »

« J’ai toujours apprécié mes moments chez Lotus, mais […] c’est une famille ici pour moi », dit-il.

« Je fais le tour du monde avec des gens que j’aime », résume-t-il.

Le Lavallois a accumulé des « milliers de souvenirs » au fil des années. Son plus précieux demeure son premier championnat avec Ferrari, en 1999.

« En étant très proche de Jean Todt, si on ne gagnait pas cette année-là, on serait tous partis. J’avais 27 ans à ce moment-là.

« Le monde nous regardait comme si c’était nous, le problème. Mais quand tu gagnes ! Zéro à héros, comme ça. Mais ça fait partie du sport, de la compétition. Je n’oublierai jamais ça. »

« Le Elvis Presley de Ferrari »

Gilles Villeneuve n’a pas eu le temps de remporter un championnat avec Ferrari, mais il a laissé sa marque par l’homme et le pilote qu’il était. Gino Rosato l’a réalisé dès son arrivée chez Ferrari.

« Quand je parle italien, c’est clair que je ne suis pas un Italien. Partout où j’allais, quand j’ai commencé à travailler dans le monde, j’étais Québécois, relate-t-il. Le monde n’a aucune idée de tout ce que Gilles a laissé. […] L’âme et la passion qu’il a pu laisser, cette folie-là qui rappelle un peu les Italiens comme peuple, ç’a été le mix parfait. »

« Il est devenu le Elvis Presley de Ferrari, ajoute-t-il. C’est quelque chose de spécial. Dans les boutiques, les posters sont encore là aujourd’hui. C’est incroyable de voir ce qu’il a laissé sans jamais avoir gagné [un championnat]. »