Nicholas Latifi a bien conscience que les rumeurs vont bon train depuis quelques semaines au sujet de son poste en Formule 1. Mais il ne peut que se concentrer sur son travail, « une course à la fois », dit-il. Le Torontois tentera d’utiliser l’énergie de la foule à son avantage, ce week-end, pour sa toute première course sur le sol canadien.

On rencontre le pilote de Williams dans une petite salle au 5étage d’un immeuble rue Sainte-Catherine Ouest, à Montréal, mercredi midi. Bien installé sur un grand – et très confortable – siège en suède rouge, son habituel sourire au visage, Latifi a du temps pour répondre à toutes les questions de La Presse. Derrière lui, on peut voir les items de la nouvelle collection de vêtements Williams spécialement créée pour ce retour dans la métropole.

« Je suis heureux d’être de retour au Canada, enfin ! », lance-t-il d’entrée de jeu une fois les formules de politesse terminées.

Le Torontois de 26 ans a déjà pris part à des séances d’essais libres sur le circuit Gilles-Villeneuve avec Force India en 2018 et avec Williams en 2019, mais il s’agira ce week-end de sa première course dans son pays natal.

« C’est un sentiment spécial, surréel, laisse-t-il entendre. […] C’est la ville dans laquelle je suis né, j’ai beaucoup de famille et d’amis ici. C’est une course à la maison. »

Il ignore évidemment comment il se sentira une fois sa monoplace alignée sur la grille de départ, mais il sait qu’il y aura un « extra buzz d’énergie » tout au long du week-end.

« Je vais juste essayer de faire les choses de la même façon que d’habitude, autant que possible, et de ne pas trop me laisser emporter par la surexcitation. Évidemment, je vais essayer de l’utiliser à mon avantage. »

Pas le progrès espéré

Rien ne va pour Latifi cette saison. Le Canadien n’a pas amassé le moindre point lors des huit premières courses, si bien qu’il pointe au tout dernier rang du classement des pilotes. Son meilleur résultat jusqu’ici : une 14place à Miami. C’est l’autre pilote Williams, Alexander Albon, qui possède les trois seuls points de l’écurie, bonne dernière chez les constructeurs.

Comme plusieurs autres pilotes, Latifi a eu du mal à s’adapter à sa nouvelle voiture.

« Les performances de la voiture le montrent clairement : c’est la plus lente sur la grille, affirme-t-il. Nous devons profiter des occasions qui se présentent avec le malheur des autres ou utiliser une stratégie super spéciale et, peut-être, être chanceux avec les voitures de sécurité, et ainsi de suite. »

Photo Olivier Jean, LA PRESSE

Michael Pezzetta, du Canadien, et Nicholas Latifi

Comme tous les ans, la machine à rumeurs s’emballe dans le petit monde de la course automobile. Et la possibilité que Latifi perde son siège avant la fin de la saison fait partie des sujets de l’heure.

« Dans ce sport, il y aura toujours des rumeurs par rapport aux sièges des pilotes. C’est vraiment normal, dit-il à ce sujet. […] On sait toujours que si on ne performe pas au niveau souhaité, il y aura toujours des questions qui seront soulevées, que ce soit dans les médias ou chez les partisans. Ce n’est pas une surprise pour moi.

« C’est clair que je n’ai pas les performances que je veux et auxquelles je m’attendais à ce stade-ci, alors il y a une frustration et une déception de mon côté, ajoute-t-il. Du côté de l’équipe aussi, assurément ; nous ne sommes pas là où nous voulions être. Nous espérions que nous serions beaucoup plus compétitifs. »

Pour moi, c’est juste de me concentrer sur mon travail, une séance à la fois, une course à la fois. C’est tout ce que je peux faire.

Nicholas Latifi

Il affirme néanmoins ressentir tout le soutien de son équipe et avoir eu de « bonnes rencontres » avec les dirigeants depuis le début de la saison.

« J’avais des problèmes de mon côté et nous avons discuté pour savoir comment nous pourrions faire en sorte que ça s’améliore, explique-t-il. Il y a eu beaucoup de choses délicates des deux côtés : des choses que je dois faire mieux et des choses que l’équipe doit améliorer pour m’aider. Ça va dans les deux sens. »

« Je vis mon rêve »

Latifi en est à sa troisième saison dans la discipline reine du sport automobile. Alors que les choses ne se déroulent pas comme il le souhaiterait, il est parfois facile de se « laisser emporter par la déception ou la frustration », reconnaît-il.

« Mais quand les choses vont bien, que je ne suis pas dans cet état d’esprit, je prends un moment de recul et je me dis : je vis mon rêve, ce pour quoi j’ai travaillé tant d’années. J’ai ce sentiment de reconnaissance d’être dans la position où je me trouve.

« Je réalise que je suis là où je voulais être. C’est important de le réaliser une fois de temps en temps. »