Laboratoire pour les innovations automobiles depuis leur création, les 24 Heures du Mans sont aussi l'occasion de tester des technologies dans tous les domaines de la circulation routière, y compris la sécurité ou le revêtement de la piste.

Essuie-glaces, freins à disques, pneus radiaux ou demain les phares laser... la liste des innovations qui ont équipé la voiture de monsieur tout-le-monde après avoir été testées et approuvées dans la plus grande course d'endurance du monde est interminable.

Il faut dire qu'une course de 24 Heures, au cours de laquelle 5400 km sont parcourus en moyenne, constitue un test de fiabilité très convainquant.

L'innovation, «c'est quelque chose qui est dans les gènes des 24 Heures depuis la naissance», rappelle Vincent Beaumesnil, directeur Sport à l'Automobile Club de l'Ouest (ACO), qui organise la course.

Une philosophie que l'ACO s'applique aussi à elle-même en cherchant sans cesse à améliorer les conditions de course et la sécurité.

Lors de la 83e édition, «un système de sécurité anti-collision avec des voyants qui s'allument quand vous êtes dans une voiture plus lente et qu'une voiture vient vous doubler» sera ainsi introduit, poursuit-il.

Pour ne pas brider les imaginations, l'ACO veille à rédiger ses règlements de sorte que «les constructeurs puissent expérimenter des technologies différentes», ajoute M. Beaumesnil.

L'exemple récent le plus spectaculaire a été l'obligation, en 2014, de consommer 30% de carburant en moins que l'année précédente, favorisant l'essor des moteurs hybrides.

Pour répondre à ce défi, «Audi veut promouvoir le diesel propre et performant, Toyota un KERS (système de récupération d'énergie cinétique), Porsche est venu avec un petit moteur turbo. Chacun a amené son style et ils sont tous en capacité de remporter la course, c'est ça qui est formidable», souligne-t-il.

Vitrine technologique

Constructeurs automobiles et équipementiers ont bien compris l'avantage qu'il y a pour eux à jouer le jeu.

Récemment, Pascal Couasnon, directeur de la compétition chez Michelin, parlait «d'investissement, pas de coût» au sujet de la participation au Mans, assurant que «Michelin fait plus d'économies en passant par la compétition automobile qu'en passant par le centre de recherche».

Dernièrement, la soif d'innovation s'est étendue à un domaine moins connu, lors de la rénovation en 2011 du revêtement de la mythique ligne droite des Hunaudières.

Longue de plus de 5 km, soit plus du tiers du circuit des 24 Heures (13,629 km), cette ligne droite symbolise la rencontre entre la course et la vie de tous les jours, puisqu'elle est ouverte tout l'année à la circulation routière.

Ce chantier de 5,4 km, d'un montant de 450 000 euros (625 000 $ CAN) - modeste à l'échelle du groupe Colas qui réalise 9 milliards d'euros (12,5 milliards $) de chiffre d'affaires annuels - a néanmoins servi de vitrine technologique au groupe de BTP, qui a dû se conformer à un cahier des charges établi par l'ACO en coordination avec Michelin.

«Pour aller vite, il faut des zones de freinage plus courtes et il faut que le contact du pneu sur l'enrobé soit le plus performant possible», explique Alain Dillet, chef d'agence de Colas au Mans.

Pour les Hunaudières, «nous avons utilisé des bitumes élastomères à haute-performance et choisi les meilleurs cailloux dans différentes carrières pour augmenter la micro-rugosité», détaille M. Dillet.

Colas a aussi remporté ce chantier en jouant la carte «écologique», puisqu'il a utilisé des «enrobés tièdes, moins chauffés que les enrobés classiques, donc avec moins d'énergie utilisée, moins d'émission de gaz à effet de serre».

Ces préoccupations environnementales répondent évidemment à une volonté d'amadouer une opinion publique parfois défiante vis-à-vis de l'automobile et surtout des courses, jugées polluantes et dangereuses.

Mais ce virage fait aussi suite à une «prise de conscience collective du monde de l'automobile dans sa globalité», rappelle M. Beaumesnil. Un marché gagnant-gagnant, en somme.