Les intervenants de la course automobile québécois sont unanimes: les pilotes d'ici ont la vie dure depuis la disparition de la filière Player's. Mais s'il n'en tient qu'à André Azzi, on assistera bientôt à la renaissance d'un nouveau programme de développement de nos meilleurs talents.

Azzi est propriétaire de l'écurie FAZZT en série IndyCar (IRL). Mise sur pied avant la présente saison, cette équipe canadienne a permis à Alexandre Tagliani de se dénicher un volant à temps plein après plusieurs années d'incertitude.

Azzi, un homme d'affaires lavallois qui est notamment propriétaire de la chaîne de magasins La Capsule sportive, a convoqué les médias à «une rencontre informelle», la semaine prochaine au centre-ville de Montréal. Il sollicitera alors «le Québec inc. pour créer un programme de développement des pilotes automobiles québécois».

Azzi livrera à ce moment «un vibrant plaidoyer en faveur de l'établissement d'une filière canadienne et québécoise pour le développement des pilotes automobiles et exposera sa vision et ses stratégies pour y arriver».

La filière Player's est disparue il y a une décennie environ, après l'application stricte de la loi fédérale sur la commandite des compagnies de tabac. Tagliani a été, à toutes fins utiles, le dernier à profiter de ce programme de développement, après Patrick Carpentier et Jacques Villeneuve.

Croisé lors de la séance d'autographes de la Journée Découvertes, vendredi, deux jours avant l'épreuve de la série Nationwide qui sera disputée dimanche sur le circuit Gilles-Villeneuve, Carpentier s'est évidemment dit heureux d'une telle initiative. Parce qu'elle ferait revivre un programme apprécié, et éviterait que les pilotes aient à se débrouiller seuls pour se dénicher du soutien financier.

«Au fil des ans, on a cogné à peu près à toutes les portes au Canada au niveau des commandites, y compris les entreprises qui brassent beaucoup d'affaires aux États-Unis», a indiqué Carpentier, qui disputera la course de dimanche avant de renouer avec la Coupe Sprint, la semaine prochaine, à Atlanta. «C'est très difficile à aller chercher, surtout en temps de récession.

«Je dirais qu'André Azzi a des bonnes chances de réussir parce qu'il est capable de faire ce qu'on appelle du "business to business". Il est capable d'arranger des choses, de faire des affaires avec l'un si celui-ci fait affaire avec l'autre... L'argent de commandite, c'est comme ça que ça fonctionne aujourd'hui», a souligné Carpentier.

«En même temps, il faut que les commanditaires en aient pour leur argent. Il ne faut pas que ce soit juste (de la charité)», a quant à lui prévenu Villeneuve, qui a lui aussi participé à la séance d'autographes de vendredi. Il était alors en compagnie d'Andrew Ranger, Patrice Brisebois, Maryève Dufault ainsi que Louis-Philippe et Jean-François Dumoulin. Ces pilotes prendront tous part à la course Canadian Tire, qui précédera l'épreuve Nationwide, dimanche. Ranger participera aux deux.

«S'il pouvait y avoir quelque chose qui permette de faire comme dans le temps, d'aider les pilotes et de fournir un certain support pour le sport automobile, ici au Québec, ce serait formidable, a commenté Jean-François Dumoulin, qui a fait partie de la filière Player's à un certain moment. On a perdu plusieurs séries au Québec. À Trois-Rivières, on a réussi à bien s'en sortir, mais pendant quelques années ils ont eu des difficultés. Tout ça parce que le support n'est plus là.»

«C'est vrai que ce serait important, parce que le sport automobile est (devenu) un petit peu mort au Canada au fil des années. Mais ça peut se reconstruire, a par ailleurs dit Villeneuve. En même temps, (un programme de développement) n'est pas l'aboutissement. Ça permet de monter les échelons, mais après il n'y pas nécessairement la place pour tout le monde non plus.»

Un plaisir fou

Ranger, lui, a vu la filière Player's disparaître au moment où il s'apprêtait à suivre les traces des Villeneuve, Carpentier et Tagliani.

«Quand un commanditaire comme Player's était là, c'est sûr que ça aidait beaucoup les pilotes canadiens et québécois. On avait la chance de partir de la F1600 et de monter. C'est fou comme c'était le fun, a raconté Ranger au cours d'un récent entretien. Depuis, il n'y a plus rien. C'est "poche", mais c'est la réalité.»

«Maintenant, ce n'est plus juste une question de talent, il faut aussi des sous, a ajouté le pilote de Roxton Pond. Ce n'est pas normal qu'un Carpentier ou un Villeneuve soit sans volant à temps plein. C'est fou. Si on pouvait avoir un soutien (mieux structuré), ce serait bien.

«Il y a un très bon pilote, Marc-Antoine Camirand, qui faisait partie de la filière Player's, a par ailleurs souligné Ranger. La fermeture du programme lui a bloqué le chemin. Jean-François Veilleux aussi. Tous ceux qui ont suivi Alex Tagliani, on n'en a pas beaucoup entendu parler... C'est dire à quel point c'était fort, la filière Player's.»