Un contrat de 62,8 millions US pour un joueur qui n’a pas encore compté 60 buts dans la Ligue nationale, c’est bien sûr généreux. Et risqué. Après, qui est le meilleur compteur du Canadien ?

Cole Caufield.

Qui applaudissez-vous le plus fort au Centre Bell ?

Cole Caufield.

Qui est la vedette la plus commercialisable de l’équipe ?

Cole Caufield.

Le jeune Américain est talentueux, compétent et charismatique. Ça vaut son pesant d’or. Surtout au sein d’une organisation qui, depuis 30 ans, peine à trouver des attaquants avec un profil similaire. Oui, Caufield est un joueur unidimensionnel. Non, il ne gagnera jamais le trophée Selke. Mais combien d’autres joueurs, dans toute la LNH, sont aussi efficaces pour déjouer les gardiens adverses ?

Très peu.

J’ai souvent écrit, cette saison, sur les buts anticipés. C’est quoi, déjà ? Ma statistique préférée. Une formule qui attribue une valeur à chaque tir, en fonction du taux de réussite historique de tous les tirs effectués du même point sur la patinoire. Ça permet d’identifier les compteurs qui profitent le plus de leurs occasions.

Un joueur normal, qui aurait tiré exactement des mêmes endroits que Caufield, dans des circonstances identiques, aurait terminé la saison avec 15 buts. Caufield en a réussi 26. Le petit ailier a donc compté 11 buts de plus que prévu. C’est énorme. D’autant plus qu’il a raté la moitié de la saison, en raison d’une blessure à une épaule. Sur une saison complète, il se dirigeait vers 19 buts de plus qu’anticipé. Rendu là, c’est au-delà d’énorme.

C’est mammouthesque.

Ça l’aurait placé devant David Pastrnak (+ 17). Devant Connor McDavid (+ 16). Devant Mikko Rantanen (+ 16). À égalité avec Jared McCann. Seul Leon Draisaitl (+ 20) l’aurait devancé. De l’excellente compagnie : l’Allemand a terminé parmi les cinq meilleurs buteurs de la LNH au cours des cinq dernières saisons.

C’est vous dire à quel point le profil de Cole Caufield est exceptionnel. On comprend très bien l’intérêt pour le Canadien de s’entendre avec lui à long terme.

Or, Caufield, lui, n’était pas obligé d’accepter l’offre. Il aurait pu imiter Jason Robertson, des Stars de Dallas, qui a exigé un contrat de quatre ans. Ça lui aurait permis d’atteindre l’autonomie complète plus rapidement, et de profiter davantage d’une hausse attendue du plafond salarial.

Le directeur général du Canadien, Kent Hughes, l’a convaincu de rester à Montréal plus longtemps. Une grosse victoire pour l’équipe. Un contrat de quatre ans aurait forcé le Tricolore à accélérer sa reconstruction, pour profiter au maximum de la présence simultanée de Caufield et de Nick Suzuki dans l’alignement. Pas tout à fait des conditions gagnantes. Pour obtenir de l’aide immédiate, le Canadien aurait probablement dû échanger des espoirs dont l’évaluation est toujours en cours – avec les risques que vous pouvez deviner.

Maintenant que Suzuki est sous contrat pour encore sept ans, et Caufield pour huit ans, Kent Hughes profitera de plus de temps pour déployer son plan. Le DG du Canadien pourra également mieux prévoir la masse salariale de sa formation à long terme. Autant de facteurs qui justifient l’entente de huit ans.

Et le salaire de Caufield ?

Il n’est ni trop bas ni trop élevé. Dans la moyenne de ce que d’autres francs-tireurs ont touché dans le passé. Le contrat de Vladimir Tarasenko, par exemple, était presque identique. Huit ans, 60 millions. Sauf que Tarasenko avait 24 ans au moment de la signature. Caufield n’en a que 22. Aussi, avec les hausses prévues du plafond salarial, le contrat de Caufield pèsera moins lourd sur la masse totale du Canadien que celui de Tarasenko sur celle des Blues de St. Louis, entre 2015 et la saison dernière.

Donc, oui, 62,8 millions pour un joueur qui n’a pas encore compté 60 buts dans la LNH, c’est beaucoup d’argent. Mais c’est un risque calculé qui en vaut la peine.