(Tokyo) Que se passe-t-il avec l’équipe masculine de basketball des États-Unis ?

Depuis un mois, cette constellation d’étoiles de la NBA est engloutie dans un trou noir. Elle vient d’encaisser trois défaites. D’abord contre le Nigeria et l’Australie, en matchs préparatoires. Puis contre la France – la France ! –, 83-76, en ouverture du tournoi olympique.

« [La France] produit plus de variétés de fromages que de joueurs de basket », s’est moqué le Wall Street Journal. Remarquez, je n’ai pas de problème avec ça. Yves Boisvert nous a d’ailleurs déniché un excellent petit carré de comté, mercredi. Pour nous qui sommes interdits de resto pour encore une semaine, c’était comme si Panoramix sortait de sa marmite un troupeau de sangliers en plein désert.

Les Américains, donc, s’inquiètent pour leur équipe de basket. La défaite contre la France a fait mal. Surtout à l’orgueil. Elle leur a rappelé une scène du film Rush Hour 3. Celle dans laquelle Jackie Chan et Chris Tucker rencontrent à Paris un chauffeur de taxi américanophobe qui leur balance : « Vous ne pouvez même plus battre les Européens au basket ! » Eh bien, aujourd’hui, ce n’est plus une blague. C’est un fait.

Comment expliquer cela ?

Après tout, la formation américaine ne manque pas d’atouts. Elle est talentueuse – Jayson Tatum est dans la première équipe d’étoiles de la NBA, Kevin Durant a remporté deux titres de joueur le plus utile en séries. Elle compte aussi sur des joueurs de caractère. Jrue Holiday, étoile défensive, vient de remporter le championnat avec les Bucks de Milwaukee et Damian Lillard vient de recevoir le trophée Twyman-Stokes, décerné au « coéquipier idéal ».

Sauf que contrairement aux Jeux de 1992, année de la première équipe de rêve aux JO, cette fois, les autres nations misent elles aussi sur des joueurs étoiles. Et pas juste un ou deux. Plein.

Des faits ?

En 1992, il y avait moins de 30 joueurs internationaux dans la NBA. Et c’est un décompte généreux. J’ai inclus plusieurs joueurs ayant grandi aux États-Unis et ayant représenté ce pays dans les compétitions internationales, comme Patrick Ewing, né en Jamaïque.

En 2021 ? Il y avait 107 étrangers provenant de 41 pays différents. Parmi eux :

  • le Serbe Nikola Jokić, joueur de l’année ;
  • le Français Rudy Gobert, joueur défensif de l’année ;
  • le Grec Giánnis Antetokoúnmpo, joueur le plus utile des séries ;
  • le Slovène Luka Dončić, nommé dans la première équipe d’étoiles.

« L’écart de talent se rétrécit d’année en année, alors qu’il y a de plus en plus de grands joueurs provenant de partout dans le monde », a expliqué l’entraîneur-chef des États-Unis, Gregg Popovich, après la défaite des siens contre les Français. On peut le constater facilement, en étudiant les différentiels des Américains face à leurs adversaires, depuis que les professionnels participent aux Jeux olympiques.

Différentiels de l’équipe des États-Unis aux jeux Olympiques

Barcelone (1992) : + 350

Atlanta (1996) : + 254

Sydney (2000) : + 173

Athènes (2004) : + 37

Pékin (2008) : + 223

Londres (2012) : + 257

Rio (2016) : + 180

C’est vrai, les Américains ont connu de très bons Jeux en 2008 et 2012, grâce à une cohorte de surdoués, menée par Kobe Bryant, LeBron James, Dwyane Wade et Chris Paul. Mais même là, on était loin de la domination spectaculaire de l’équipe des Jeux de Barcelone, qui avait écrasé tous ses adversaires par au moins 38 points – notamment les Cubains, par 79 points !

Ironiquement, c’est cette performance exceptionnelle de l’équipe de rêve de 1992 qui complique aujourd’hui le parcours des Américains. Car après les Jeux de Barcelone, tous les enfants du monde voulaient voler comme Michael Jordan. Passer le ballon derrière leur dos comme Magic Johnson. Tirer de la Lune comme Larry Bird.

À mon école secondaire, où il n’y avait aucune tradition de basketball, on a soudainement eu deux clubs. Et du basketball intramural. Et un gros tournoi pour les finissantes, auquel même des filles n’ayant jamais driblé participaient.

Cet engouement, on l’a vécu à Saint-Hubert. Mais aussi à Athènes. À Ljubljana. À Sombor. À Saint-Quentin. Dans les années suivantes, les clubs de ces villes et villages ont formé de nouveaux joueurs. Comme Giánnis Antetokoúnmpo, Luka Dončić, Nikola Jokić et Rudy Gobert.

Aujourd’hui, les succès de ces vedettes internationales inspirent à leur tour encore plus d’enfants grecs, slovènes, serbes et français à aller tirer au panier dans une cour d’école. À se frotter aux meilleurs du quartier sur un terrain extérieur. La roue est maintenant bien huilée. Elle tourne seule, sans qu’on ait besoin de la pousser.

Assistons-nous à la fin de l’hégémonie des États-Unis ?

Je le crois. C’est peut-être dommage pour les partisans américains.

Mais le sport, lui, en sort nettement gagnant.

Nos équipes canadiennes

Si on vous parle peu de nos équipes canadiennes, c’est que la plupart d’entre elles sont encore dans les phases préliminaires. Celle de balle-molle a remporté la médaille de bronze plus tôt cette semaine. Comment se portent les autres ?

Couci-couça.

  • Au water-polo féminin, les Canadiennes ont échappé leurs deux premières parties contre les Australiennes et les Espagnoles, avant de démolir les Sud-Africaines, 21-1. Cette victoire devrait leur suffire pour atteindre les quarts de finale. Elles risquent toutefois d’y affronter une puissance mondiale. Probablement les États-Unis, la Hongrie ou la Russie.
  • Au volleyball masculin, les Canadiens sont en difficulté. Il leur reste deux matchs. Logiquement, ils gagneront contre les Vénézuéliens et perdront contre les Polonais. Une fiche de 2-3 pourrait leur valoir une égalité au quatrième et dernier rang permettant d’accéder aux quarts. Leur sort dépendra des résultats des autres rencontres. Allumez un lampion et récitez trois Je vous salue, Marie
  • Au basketball féminin, le tournoi est encore jeune. Les Canadiennes (4es au classement mondial) se sont inclinées en ouverture devant les Espagnoles (3es) avant de vaincre les Sud-Coréennes (19es) tôt jeudi. Prochaines adversaires : les Serbes (8es). C’est jouable.
  • En rugby féminin, les Canadiennes ont démarré leur parcours en lionnes, jeudi matin, avec un massacre de 33-0 contre les Brésiliennes. Elles devraient aisément se qualifier pour les quarts de finale.
  • En hockey sur gazon masculin, c’est mal parti. Trois défaites en trois parties.
  • Enfin, en soccer féminin, les Canadiennes affronteront les Brésiliennes, vendredi, en quarts de finale. Deux formations de forces égales. D’ailleurs, les deux équipes ont égalisé 0-0 en juin lors d’une partie amicale. L’équipe gagnante affrontera les États-Unis ou les Pays-Bas en demi-finale.