(Tokyo) Au moment où des pays exigent un passeport vaccinal pour l’entrée sur leur territoire, doit-on bannir les athlètes non vaccinés ?

Le sujet est d’autant plus délicat que les Jeux olympiques ont lieu en terrain hostile dans un pays qui se plaint de n’être pleinement vacciné qu’à 20 %, dans une ville où l’urgence sanitaire est déclarée.

L’équipe américaine est secouée par une controverse autour de son (excellent) nageur Michael Andrew, qui a publiquement annoncé son intention de ne pas se faire vacciner. Il est qualifié pour sept épreuves à Tokyo. Il a dit ne « pas vouloir mettre quelque chose » qu’il ne connaît pas dans son corps. Une ancienne médaillée olympique lui a reproché sa prise de position, et le feu a pris.

Associated Press a rapporté vendredi que, selon le responsable médical de l’équipe américaine, « au moins » 100 des 613 athlètes américains à Tokyo ne sont pas vaccinés, ce qui représente « au moins » 16 % du contingent américain. Qui ? C’est privé.

Par message texte, Josh Su, porte-parole du Comité olympique canadien, m’a déclaré hier que « 95 % des athlètes canadiens sont vaccinés ». Sur une équipe de 371, cela voudrait dire 19 athlètes non vaccinés.

Il faut savoir que ni le CIO ni le Japon n’ont exigé une quelconque forme de vaccination pour les athlètes, les médias ou les travailleurs olympiques. Le système de tests et de quarantaine est censé servir de protection.

En tout, 11 091 athlètes de 206 pays sont inscrits à des compétitions. Les cas positifs sont rares, mais le Japan Times chiffrait à 106 le nombre de personnes positives parmi les accrédités – dont 3 athlètes au village olympique.

Qu’arrive-t-il si un athlète non vacciné est infecté ? S’il en infecte d’autres ? À part le tir à l’arc et l’équitation, les sports olympiques riment avec proximité, voire promiscuité.

Andrew déclare qu’il n’a aucun contact et demeure prudemment dans la bulle. Facile à dire. Il n’en reste pas moins qu’il y a 100 Américains, 19 Canadiens, et des dizaines d’autres d’ailleurs qui circulent sans vaccin. Ce sont des cibles délicieuses pour le virus, des vecteurs de transmission, et de contagion.

Jeudi, la NFL a annoncé que les équipes ayant des joueurs non vaccinés où surviendraient des éclosions devraient rembourser les dommages causés par l’annulation de leurs matchs – en plus de perdre par forfait. On parle d’enjeux de dizaines de millions. On ne niaise pas avec le ballon ovale.

Le mouvement olympique, qui repose sur des athlètes-voyageurs internationaux, peut-il se permettre de laisser circuler à travers le monde des athlètes non vaccinés ? C’est pour le moins douteux sur le plan éthique. D’abord pour les autres athlètes, qui sont mis à risque. Ensuite pour les habitants des pays qui accueillent les compétitions.

Le CIO n’a pas exigé la vaccination, mais elle été offerte à tous, en vertu d’une entente avec Pfizer. Les Américains et les Canadiens, pour ne citer que ceux-là, ont de toute manière eu accès à la pleine vaccination dans leur pays.

L’enjeu du passeport vaccinal athlétique ne pourra pas être enfoui sous le tapis sportif très longtemps. Participer à des compétitions sportives pour représenter son pays – avec le soutien de l’État généralement – n’est pas un droit fondamental. Et les athlètes vaccinés ont aussi droit à un environnement sûr.

C’est à peu près le temps d’en jaser, je dirais…