(New York) Un tweet ambigu de LeBron James, visant un policier ayant abattu une adolescente noire, vaut au joueur de basketball une levée de boucliers de la droite conservatrice américaine, qui l’accuse de racisme et d’irresponsabilité.

« À ton tour #Responsabilité », avait écrit mercredi la supervedette des Lakers de Los Angeles sur son compte Twitter en illustration d’une photo du policier qui a abattu mardi Ma’Khia Bryant alors qu’elle s’apprêtait à poignarder une autre femme, à Columbus, dans l’État de l’Ohio.

Le joueur de basketball de 36 ans a supprimé ce message quelques heures plus tard, « car il était utilisé pour générer encore plus de haine », a-t-il expliqué, reconnaissant l’avoir écrit sous le coup de la « colère ». « Cela ne concerne pas un policier », mais « tout le système, et ils utilisent toujours nos propos pour créer encore plus de racisme. »

« Ce que je réclame désespérément, c’est que les gens soient davantage mis face à leurs responsabilités », a conclu LeBron James.

Cette mise en contexte n’a pas empêché les réseaux sociaux de rugir, alimentés par plusieurs personnalités de la droite conservatrice, en premier lieu Donald Trump, qui a dénoncé « les diatribes racistes » du champion en titre de la NBA. Des propos « sectaires, méchants, insultants et dégradants », selon l’ancien président américain.

« LeBron James a tiré des conclusions hâtives et incité à la violence contre un officier de police », a estimé le sénateur républicain de l’Arkansas, Tom Cotton. « Cela ne pose aucun problème à la NBA ? À Twitter ? »

Après avoir évité publiquement les grands sujets de société au début de sa carrière, LeBron James a commencé à prendre la parole en 2012 après la mort de l’adolescent Trayvon Martin, abattu de sang-froid par un homme blanc en Floride.

« Ça m’a touché directement parce que j’ai des fils », avait-il expliqué lors d’un entretien accordé à CNN en juillet 2018 au sujet de ses deux garçons, nés en 2004 (LeBron Jr) et 2007 (Bryce). « Le fait de songer que mon fils aurait pu sortir de chez nous et ne jamais revenir, a-t-il décrit, ça a déclenché quelque chose. »

Depuis, il a régulièrement pris position, en particulier sur les sujets liés à la discrimination raciale. « Je pense que cela correspond simplement à l’évolution et la maturation d’un homme », avait commenté son associé de longue date, Maverick Carter au site Bleacher Report, en 2018.

« Se concentrer sur le basket »

De par sa popularité, son statut et son activisme, « LBJ » peut aujourd’hui être considéré comme la personnalité sportive la plus influente sur le plan politique aux États-Unis. Il a déjà eu plusieurs vifs échanges à distance avec Donald Trump, le plus souvent via Twitter.

Outre ses déclarations, il s’est signalé en produisant, en 2018, le documentaire Shut Up and Dribble (Tais-toi et drible) qui évoque l’émancipation et l’engagement des joueurs de basketball afro-américains. Il anime aussi The Shop, un talk-show télévisé sur la chaîne HBO durant lequel il évoque, avec des invités prestigieux, des questions de société.

En 2020, le quadruple joueur par excellence de la NBA est allé plus loin en lançant l’opération « More Than a Vote », qui a recruté des dizaines de milliers de volontaires pour encourager des citoyens noirs à s’inscrire sur les listes électorales et à voter.

« LeBron James devrait se concentrer sur le basket plutôt que de superviser la destruction de la NBA », a exhorté Donald Trump jeudi, relançant ainsi la théorie selon laquelle les prises de positions politiques de sportifs crispent une partie du public, qui se détourne.

En 2016, Donald Trump avait ainsi lié les mauvaises audiences de la NFL au mouvement initié par le quart-arrière Colin Kaepernick, qui avait ostensiblement mis un genou à terre alors que résonnait l’hymne américain, en signe de protestation contre la discrimination raciale aux États-Unis.

Le lien n’a jamais été formellement établi entre activisme et popularité ou impopularité d’un sport, et la ligue féminine de basket WNBA a enregistré, en 2020, la plus forte hausse d’audience parmi les grands championnats américains alors que ses joueuses avaient été, de loin les plus actives au soutien du mouvement né après la mort de George Floyd.

Après son tweet de mercredi, plusieurs figures conservatrices ont rappelé que LeBron James avait critiqué, en octobre 2019, le tweet d’un dirigeant de la NBA soutenant publiquement les manifestants prodémocratie à Hong Kong.

À l’époque, il avait été accusé d’avoir privilégié ses intérêts financiers en Chine au détriment de la démocratie et des droits de l’Homme.