(Tokyo) La télévision japonaise est restée fidèle à sa couverture en direct de Miami pendant près de deux heures après la victoire de 3-2 du Japon sur les États-Unis en grande finale de la Classique mondiale de baseball.

C’était une émission à ne pas manquer, encore et encore.

Le tir près du coin extérieur du marbre qui a permis à Shohei Ohtani de retirer sur élan Mike Trout, son coéquipier des Angels de Los Angeles, et de mettre fin au match a été présenté en reprise à répétition, entre des interviews avec des joueurs, des images du vestiaire arrosé de bière et la traditionnelle cérémonie où des membres de l’équipe victorieuse lancent dans les airs leur gérant et des coéquipiers.

Yomiuri, le principal journal du pays, a publié une édition spéciale du mercredi après-midi pour les banlieusards, habituellement réservée aux affaires d’État graves, aux nouvelles électorales de dernière minute ou, comme l’année dernière, à l’assassinat de l’ancien premier ministre Shinzo Abe.

« Japon, numéro 1 au monde », pouvait-on y lire en manchette principale, en japonais, alors que des usagers de la gare de Shibuya se bousculaient pour s’emparer de cet objet de collection.

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La victoire et l’attention portée à Ohtani au cours des deux dernières semaines ont permis de détourner l’attention du malaise économique, des menaces de missiles de la Corée du Nord, de la montée en puissance de la Chine en Asie et de ses implications pour le Japon.

Elle a également donné un coup de fouet au baseball au Japon, qui est dorénavant concurrencé par le soccer en tant que sport favori du pays. Il est peu probable que le Japon remporte à court terme la Coupe du monde de soccer, mais le niveau de son baseball est de classe mondiale. Le pays a remporté trois des cinq titres de la Classique, depuis la première édition en 2006.

Le Japon a rejoint la République dominicaine en 2013 en tant que seul champion invaincu du principal tournoi national de baseball par équipe.

« J’étais à l’aise à l’idée de perdre ou de gagner », a déclaré Hiroya Kuroda, 44 ans, dans une foule d’environ 400 personnes qui regardaient le match dans un studio de la Tour de Tokyo. « Mais j’ai été très ému par le fait qu’ils nous aient montré un match dramatique sur cette scène aux États-Unis. »

Toshiya Ishii, un fan de 29 ans, a fondu en larmes après la victoire.

« Merci Ohtani », a-t-il déclaré. « Félicitations à Samurai Japan. Merci. »

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Le Japon a battu les Américains à leur propre jeu, et ce n’était pas la première fois.

Des enseignants et des missionnaires américains ont popularisé le jeu au Japon dans les années 1870 et 1880, mais c’est un match disputé en 1896 à Yokohama entre Américains et Japonais, remporté 29-4 par le Japon, qui a permis au baseball de s’enraciner dans le pays.

« C’est la meilleure décision que j’aie jamais prise », a déclaré Lars Nootbaar, le voltigeur des Cardinals de St. Louis qui a été le premier à jouer pour le Japon en raison de ses origines.

Il s’est exprimé lors d’une interview télévisée après le match, puis a serré dans ses bras sa mère, Kumiko, qui se tenait à ses côtés.

« Nippon daisuki », a dit Nootbaar en japonais. « Arigato ».

(J’aime le Japon. Merci.)

Nootbaar, Ohtani, le lanceur Yu Darvish et le gérant Hideki Kuriyama ont été parmi ceux qui ont été lancés en l’air par des coéquipiers en liesse.

« C’est la première fois qu’on me soulève comme ça », a déclaré Nootbaar. « J’espère que j’en aurai une photo parce que c’est quelque chose dont je veux me souvenir pour toujours. »