Vendredi, Alex Anthopoulos participera au défilé de ses Braves dans les rues d’Atlanta. Puis, le lendemain, il commencera à se pencher sur sa formation pour la saison 2022.

« J’apprécie chaque minute », a toutefois assuré le directeur général montréalais des champions de la Série mondiale.

Mais Anthopoulos ne semble pas s’attarder trop longuement sur les succès. Avant ce titre ultime, il avait été nommé gestionnaire de l’année au terme de sa dernière saison avec les Blue Jays, en 2015.

« Et si j’avais eu à choisir deux choses à accomplir dans une carrière, ce serait probablement ces deux-là, a-t-il souligné, en entretien avec les médias québécois, jeudi après-midi. Maintenant, la question est simplement de savoir si je peux le refaire. »

Si le DG ne vit pas dans le passé, il ne se projette pas très loin dans l’avenir non plus. Les dirigeants sportifs vivent sur des sièges éjectables, il en est bien conscient.

Si je suis encore employé dans 10 ou 12 ans, ce sera une carrière incroyable. Je n’ai jamais regardé si loin devant. J’ai toujours travaillé avec un certain sentiment d’urgence. Et je dirais même de peur. Pas de perdre mon job, mais d’échouer. Dans mon travail, on sent la pression de devoir réussir pour les fans.

Alex Anthopoulos

Déclaré positif à la COVID-19 samedi – bien qu’il ait été vacciné –, Alex Anthopoulos sera seul dans sa voiture pour le défilé.

« Mais au moins, je vais en faire partie et c’est vraiment important pour moi. »

Prince Fielder

Mardi, les Braves d’Atlanta ont éliminé les Astros de Houston en six matchs, mettant la main sur le trophée sur le terrain de leurs adversaires.

Et ce triomphe, ils le doivent en bonne partie à leur patron. Après la perte de Ronald Acuña Jr. et de Marcell Ozuna en cours de saison, Alex Anthopoulos a fait l’acquisition des Adam Duvall, Eddie Rosario, Jorge Soler et Joc Pederson. Tous ont contribué aux succès du club.

« Mais faire des échanges pour des joueurs qui vont être MVP du championnat de la Nationale [Rosario], puis des Séries mondiales [Soler], tu ne peux pas savoir que ça va arriver, a dit Anthopoulos humblement. Tu espères qu’ils jouent bien, mais c’est vraiment incroyable, ce qu’ils ont fait pour nous. »

N’empêche que le DG a réagi et que sa proactivité a payé.

Il faut dire que le sixième sens d’Alex Anthopoulos ne date pas d’hier. Jeune coordonnateur au recrutement pour les Expos de Montréal, en 2002, il voyait Prince Fielder dans sa soupe. Cette année-là, les Expos s’exprimaient au cinquième rang du repêchage. Ils ont plutôt opté pour un certain Clint Everts.

Ça ne vous dit rien ? Normal. L’artilleur droitier n’a jamais lancé une balle dans les majeures.

Fielder a été choisi deux rangs plus tard. Il a frappé plus de 300 circuits et produit plus de 1000 points…

Le tournant

Alex Anthopoulos était déjà une inspiration dans le milieu du baseball québécois, mais sa popularité transcende maintenant les stades. Il est la preuve qu’on peut réussir dans le sport professionnel en arrivant un peu sur le tard, dans la vingtaine. En étant à la fois un self-made man et un outsider.

Lisez l’article de Katherine Harvey-Pinard sur son parcours

Être perçu comme un modèle ne le laisse pas indifférent.

« J’en suis très touché. Je ne pense pas que je le réalise entièrement, mais en même temps, je suis soufflé par ça », a-t-il laissé tomber.

S’il avait à prodiguer des conseils aux jeunes, ce seraient les suivants.

« Faites quelque chose que vous aimez. Soyez humbles. Soyez de bons coéquipiers.

« Si vous aimez ce que vous faites, vous serez probablement bons et vous vous améliorerez. Si vous avez l’humilité, les gens voudront travailler avec vous. Et si vous êtes de bons coéquipiers, les gens voudront en plus vous aider dans votre parcours. »

Son parcours, jamais il ne l’aurait envisagé si riche, a-t-il affirmé. Mais il a joui de beaucoup d’aide.

À propos de son arrivée chez les Expos au début des années 2000, il nomme notamment le directeur du recrutement Dana Brown, Claude Delorme – « la première personne qui a pris mon appel et qui m’a donné la ligne directe de Jim Beattie » – et le directeur général Omar Minaya.

Et il y en a eu d’autres, à Toronto, à Los Angeles, à Atlanta.

Un tournant ?

Après ma cinquième année chez les Jays, tout a changé pour moi. Je me rappelle qu’à la fin de 2014, je m’étais dit que je ferais de gros changements, et on a gagné en 2015.

Alex Anthopoulos

L’année suivante, il partait néanmoins pour Los Angeles. Et cinq ans plus tard, le voici avec une bague de championnat, à sa 10e saison comme directeur général.

Le retour du baseball à Montréal

Anthopoulos a commencé à suivre assidûment les Expos à l’âge de 15 ans. Quand Felipe Alou a pris la relève de l’inénarrable Tom Runnells et que l’équipe est redevenue compétitive.

« Cette période, pour moi, c’était Delino DeShields, puis Pedro Martinez, Vladimir Guerrero. C’étaient mes trois joueurs. Et je me souviens à quel point j’étais contrarié quand DeShields a été échangé [contre Martinez]. J’étais furieux ! »

Mais il a fini par accepter l’échange et devenir un grand un fan de Pedro. Comme bien des Montréalais.

Quant à un éventuel retour du baseball majeur à Montréal…

« Je vais être vraiment excité si ça arrive. De quelque manière que ce soit, si le baseball peut revenir à Montréal, ce serait incroyable pour la ville, pour la ligue, et même pour les Blue Jays, a dit Alex Anthopoulous. Il faut commencer quelque part et j’espère que ça va arriver. »

Pas question de rêver à un poste dans la métropole, cela dit. Anthopoulos se décrit comme un homme loyal. Et il est bien traité par l’organisation des Braves d’Atlanta, qui avait prolongé son contrat à mi-chemin des quatre saisons pour lesquelles il avait signé.

Ces Braves que, comme des milliers de partisans des Expos, il admet avoir jadis détestés !