Devimco Immobilier a présenté lundi une nouvelle maquette du projet qu’il souhaite déployer aux abords du bassin Peel, à Montréal. On y voit un long canal bleu. Des espaces verts. De grandes tours blanches. C’est très beau.

Mais…

Mais…

Mais où est donc passé le futur stade de baseball ?

Celui qui doit être construit près de la rue Mill, au pied de l’autoroute Bonaventure. Le joyau qui doit revitaliser ce secteur délabré de la ville. J’ai zoomé. Rezoomé. Re-rezoomé. Je ne l’ai pas trouvé.

Se cache-t-il derrière les tours de condos ?

J’ai posé la question au président de Devimco Immobilier, Serge Goulet. Ça me chicotait d’autant plus que pendant son allocution de 10 minutes, M. Goulet n’a jamais évoqué le stade une seule fois. Il nous a alors montré une deuxième image. Le même quartier, mais vu d’un autre angle. On peut distinguer un hôtel. Un grand parc. Un espace pour une future gare du Réseau express métropolitain.

MAQUETTE FOURNIE PAR DEVIMCO IMMOBILIER

Une maquette du projet de Devimco Immobilier au bassin Peel

Mais toujours pas de stade de baseball.

C’est étrange. Car depuis 18 mois, Devimco Immobilier et Claridge — l’entreprise de Stephen Bronfman — travaillent ensemble pour développer le secteur du bassin Peel. Leur entente, dévoilée en mai 2019, prévoyait l’acquisition de terrains de la Société immobilière du Canada (cette étape n’est pas encore terminée).

« L’entente est toujours en place, assure Serge Goulet. L’entente, c’est de travailler ensemble pour concevoir un projet acceptable, autant pour Devimco et ses partenaires financiers [que pour] l’équipe de baseball et la Ville de Montréal. 

« On parle régulièrement à l’équipe de [Stephen] Bronfman et [Pierre] Boivin. On ne rentrera pas dans le détail de cela. On sait que [le Groupe Baseball Montréal] continue d’avancer. Évidemment, la pandémie a ralenti le projet. Les études économiques sont en cours. Il y aura des rencontres dans les prochaines semaines, dans les prochains mois, avec les différents gouvernements. Je n’en sais pas plus. »

À la fin d’octobre, tant à Québec qu’à Montréal, des sources ont confirmé à La Presse qu’il ne se passait « rien de neuf depuis des mois » dans le dossier du stade. Notre chef de bureau à Québec, Tommy Chouinard, a fait des appels, lundi. Il s’est fait répondre que c’était le statu quo.

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Plus le temps passe, plus c’est difficile de croire qu’un nouveau stade sera bientôt construit au centre-ville de Montréal.

Serge Goulet a d’ailleurs reconnu, lundi, la possibilité que son projet pour le bassin Peel voie le jour sans le stade.

Ce qui est important pour nous… Le stade de baseball, oui. Mais d’abord et avant tout, un projet de développement avec des conséquences les plus importantes pour l’économie de Montréal. Et ça, ça fonctionne avec ou sans le stade de baseball. Vous voyez, il n’y a pas de stade de baseball dessiné [dans la maquette]. D’ailleurs, je n’ai jamais présenté de stade de baseball [dessiné].

Serge Goulet, président de Devimco Immobilier

C’est vrai. Devimco Immobilier n’a jamais fait circuler de dessin du stade. Peut-être qu’il y a une bonne raison pour ça. Dans les milieux politiques, ils sont nombreux à douter que le projet de stade progresse rapidement. En mars, la mairesse Valérie Plante s’était d’ailleurs impatientée devant le manque de détails fournis par le Groupe Baseball Montréal.

« Il faut qu’ils nous montrent quelque chose absolument, sinon on jase, mais on jase de quoi ? se demandait-elle. Il n’y a pas de plan, pas d’ébauche, rien. Je n’ai rien vu. Je n’ai pas de projet tangible, c’est très difficile pour moi de me prononcer [sur le projet de stade]. On s’attend à voir des études d’impact et financières. Encore une fois, un stade, c’est majeur. »

La présidente de l’Office de consultation publique de Montréal, Dominique Ollivier, s’était montrée encore plus cinglante. « Pour pouvoir dire que c’est un bon projet, il aurait fallu une vraie image, plus que l’image qu’on a vue dans Le Journal de Montréal. Il faudrait qu’on ait quelques études qui nous disent quel serait l’impact sur la circulation, le bruit, ça va être quoi le pourcentage de résidentiel pour financer le stade. Ils voulaient avoir des tours d’habitation qui pourraient aider à financer. De quoi parle-t-on ? On n’a aucune idée. »

Ça, c’était tout juste avant le Grand Confinement.

Depuis, c’est le silence radio. Le Groupe Baseball Montréal refuse systématiquement de commenter les développements, comme celui de lundi. M. Bronfman n’a accordé aucune entrevue depuis les critiques de Valérie Plante et de Dominique Ollivier.

On ne se contera pas d’histoires. L’absence du stade sur la maquette de Devimco n’est pas une bonne nouvelle pour les amateurs de baseball de Montréal. Le mutisme de Stephen Bronfman non plus. Ce silence, autrefois qualifié de stratégique, semble tout simplement être le reflet de ce qui se passe vraiment.

C’est-à-dire pas grand-chose.

Pensez-y un instant.

Le stade n’apparaît pas sur les maquettes.

Le projet n’est pas approuvé par la Ville.

Le terrain n’est pas acheté.

Le partage des Rays de Tampa Bay n’est pas confirmé.

L’échéancier n’est pas clair.

Le financement du stade, encore moins.

Au baseball, disait Yogi Berra, ce n’est pas fini tant que ce n’est pas fini. C’est vrai. Stephen Bronfman a encore une chance de la sortir du stade. Il est capable. Il en a les moyens. Encore faut-il qu’il se présente au bâton de nouveau.