Une spectatrice trépignait dans les gradins du Centre aquatique de Londres, hier après-midi. Jennifer Abel, pourtant médaillée de bronze aux derniers Mondiaux, n'était pas des préliminaires du 3 mètres individuel.

La faute à un plongeon manqué aux championnats canadiens de Victoria, en décembre. Dominante jusque-là, Abel a complètement raté son deuxième plongeon en finale. Mauvais appel sur la planche, ses genoux ont bloqué. Ses mains et sa tête ont touché l'eau en même temps. Plongeon manqué, 0 point. Le genre de chose qui arrive une seule fois dans une carrière.

L'athlète de 20 ans a su là qu'elle devait faire une croix sur la Coupe du monde au 3 mètres individuel (elle s'alignera en synchro demain avec Émilie Heymans). Blessée dans son orgueil, elle a pleuré pendant le reste de l'épreuve, mais elle s'est accrochée. Pour l'apprentissage et l'esprit sportif. Elle a fini dernière.

Abel a mis quelque temps à s'en remettre, mais à son retour dans la piscine après la pause des Fêtes, la déception était irrémédiablement derrière elle. Elle a rebondi il y a deux semaines en gagnant avec brio le Grand Prix de Rostock, en Allemagne. Sa sélection olympique est presque acquise.

Depuis le début de la semaine, elle doit se contenter du rôle de cheerleader en titre de l'équipe canadienne. Malgré les 3000 spectateurs, son cri d'encouragement suivant un plongeon spectaculaire se distingue aisément de tous les autres: «Joooo-liiiii...» Comme ça, elle est certaine d'être entendue par ses coéquipiers.

Hier, le «joli» n'a pas retenti souvent durant les préliminaires du 3 mètres. Émilie Heymans, 10e, et la recrue Pamela Ware, 12e, n'ont rien cassé, mais leur constance leur a permis d'accéder à la demi-finale de ce matin, ce qui était le but de l'exercice.

Interviewée en début de soirée après son entraînement, Abel maîtrisait bien ses émotions. Certes, son rôle de spectatrice a été déplaisant, mais elle en a profité pour observer la technique de ses rivales chinoises.

Elle cachait un peu son jeu. Meaghan Benfeito et Roseline Filion l'avaient compris. En magasinant pendant l'après-midi, les vice-championnes du 10 mètres synchro ont pensé à leur amie. Elles lui ont trouvé une médaille en chocolat... emballée dans du papier doré. Abel a ri. Et elle a pleuré.