Les athlètes et dirigeants russes trouvés coupables d'avoir participé au «système de manipulation de dopage» devraient être suspendus à vie, a déclaré jeudi le président du Comité international olympique, Thomas Bach.

Bach a donné son avis personnel quelque 24 heures avant que l'enquêteur canadien Richard McLaren ne rende public son deuxième et dernier rapport sur les allégations de dopage systématique lors des Jeux de Sotchi, en 2014.

Des preuves de ce système de dopage se voudraient des «circonstances aggravantes» pour justifier des suspensions à vie, a déclaré le président au cours d'une conférence de presse en marge d'une assemblée de trois jours de la commission exécutive du CIO.

«Je ne voudrais pas voir une telle personne aux Jeux olympiques ou occuper toute fonction», a ajouté Bach, notant au passage qu'à titre de président de la commission disciplinaire du CIO, il avait approuvé la suspension à vie de membres de l'équipe autrichienne impliqués dans des cas de dopage aux Jeux de Turin, en 2006.

McLaren, nommé par l'Agence mondiale antidopage (AMA) en mai dernier, doit donner davantage d'explications sur la façon dont on a pu tricher au laboratoire de Sotchi.

Dans son rapport intérimaire rendu public en juillet, McLaren a confirmé les allégations de l'ex-directeur du laboratoire Grigory Rodchenkov au sujet d'un trou dans le mur par lequel des échantillons souillés étaient remplacés par des échantillons propres par des agents du Service fédéral de sécurité (FSB).

Plus tôt jeudi, Denis Oswald, membre du CIO affecté à la supervision des dossiers disciplinaires découlant du Rapport McLaren a admis qu'il pourrait être difficile de tout prouver.

«Peut-on prouver que les athlètes étaient au courant?, s'est-il demandé. Ce n'est pas que nous ayons peur de nous attaquer à des personnes haut placées en Russie, a poursuivi l'avocat suisse. La question en est davantage une sur le point légal. Pouvons-nous punir des athlètes s'ils n'étaient pas au courant ou qu'ils n'avaient rien à faire là-dedans?»

Bach a aussi mis sur pîed une deuxième commission du CIO, présidée par l'ex-président suisse Samuel Schmid, afin d'évaluer si le Rapport McLaren prouve la présence d'un système de dopage mis en place par l'État.

«Basé sur ce que nous y découvrirons, nous pourrions alors lancer des procédures contre des athlètes», a indiqué Oswald.

Oswald abordera son nouveau mandat de nettoyage olympique après avoir passé des mois à disqualifier des dizaines d'athlètes - surtout en provenance de Russie ou d'ex-pays de l'Union soviétique - des Jeux de Pékin et de Londres. Leur utilisation de stéroïdes anabolisants a été détectée par une nouvelle série de tests.

Il a aussi admis qu'il était facile de voir un lien entre l'établissement d'un système étatique de dopage en vue des Jeux de Sotchi à la suite des mauvais résultats obtenus aux Jeux de Vancouver, en 2010.

«Certaines indications du premier rapport laissent entendre qu'il y avait une trappe (dans un mur du laboratoire de Sotchi) par laquelle des échantillons étaient trafiqués, a dit Oswald. Il y certainement suffisamment de preuves pour démontrer que quelque chose a été fait par les autorités, par le ministère des Sports russe.»

Il prévient toutefois que les preuves pour démontrer des cas de dopage puissent être manquantes.

«Avec l'ADN, nous pouvons prouver qu'un échantillon n'appartient pas à telle ou telle personne, explique-t-il au sujet des échanges d'échantillons à Sotchi. Mais ça ne veut pas dire que l'échantillon d'urine original était contaminé.»

Pour l'instant, la Russie trône au sommet du classement des médailles des Jeux de Sotchi avec 13 médailles d'or contre 11 pour la Norvège, et 33 au total, comparativement à 28 pour les États-Unis. Quand on lui a demandé si la Russie allait se maintenir en tête à la suite de la publication du Rapport McLaren et des enquêtes des deux commission du CIO, Oswald a répondu: «Probablement pas».

Pendant ce temps, des législateurs américains souhaitent que Bach participe à une audience d'une commission du Congrès, jeudi prochain, afin qu'il puisse fournir une mise à jour sur la lutte au dopage.

«Malheureusement, je ne pourrai pas y être», a répondu Bach, ajoutant que le CIO «pourrait fournir par d'autres moyens toute l'information nécessaire».