La longue liste des haltérophiles pris pour dopage aux Jeux olympiques s'est allongée encore un peu, hier. Le Comité international olympique (CIO) a annoncé que sur douze athlètes des Jeux de Londres nouvellement attrapés à la suite de tests rétroactifs, neuf sont des haltérophiles.

Ces annonces ne surprennent plus personne. Lorsqu'on les met bout à bout, on constate - ou on confirme - que l'haltérophilie a un important problème. En tout, depuis que le CIO a décidé de rouvrir les échantillons des Jeux de Pékin et de Londres, ce sont 48 haltérophiles qui ont été pris.

Ça veut donc dire qu'environ 10% des haltérophiles ont été pris pour dopage lors des Jeux de 2008 et de 2012, puisqu'en tout, 506 haltérophiles ont pris part à ces deux compétitions. C'est une proportion énorme.

La compétition qui illustre peut-être le plus le grotesque de l'affaire, c'est celle des hommes de 94 kg à Londres. Dans la foulée des cas de dopage, la médaille de bronze pourrait finalement être remise au Polonais Tomasz Zielinski, qui avait terminé... au 9e rang!

«Déjà que notre sport n'avait pas une super belle image... Disons que ça n'aide pas à oublier les scandales de dopage dans les années 80», affirme l'haltérophile Christine Girard.

Girard est l'une des victimes de ce dopage répandu en haltérophilie. Plusieurs de ses rivales à Pékin et à Londres ont été prises dans la vague des tests rétroactifs. Si les appels faits par certaines de ces athlètes n'aboutissent pas, elle pourrait remporter le bronze à Pékin - elle avait fini quatrième - et l'or à Londres - elle avait fini troisième.

Les choses se règleront dans les prochains mois. Même si elle pourrait se retrouver double médaillée olympique et médaillée d'or, Girard n'est pas emballée par la situation.

«J'ai beaucoup perdu, dans tout ça. À Pékin, si j'avais gagné le bronze, j'aurais eu la première médaille canadienne des Jeux, rappelle l'ancienne athlète de 31 ans. Ç'aurait été gros et ç'aurait eu un impact sur ma vie. C'est sûr que financièrement, j'ai perdu beaucoup.»

Au lieu de finir quatrième à Pékin, elle aurait été médaillée. Elle aurait pu s'entraîner pour Londres avec un meilleur financement.

«Quand je me préparais pour Londres, je m'entraînais dans un abri d'auto qu'on avait modifié et sur lequel on avait mis un cadenas. Ce n'était pas chauffé. Je n'avais pas beaucoup d'aide financière. Ç'aurait changé les quatre ans avant Londres. Et gagner l'or à Londres, ç'aurait eu un impact assez grand sur ma vie.»

Un sport en reconstruction?

Malgré tout, Girard ne voit pas l'avenir de son sport tout en noir. Elle le voit plutôt dans des nuances de gris.

«Les nouveaux cas de dopage, il y a deux façons de les voir. D'un côté, c'est vrai que ça donne une mauvaise image du sport, dit-elle. En même temps, c'est signe que le sport est en train de se prendre en main et de faire le ménage.»

Selon l'haltérophile de Sherbrooke Pascal Plamondon, on saura très rapidement si la discipline est sur la bonne voie. Il s'agira de scruter les prochaines compétitions.

«Si on voit que le niveau descend, on va savoir que ça fonctionne. Mais si le niveau reste le même ou augmente, alors à mon avis, ça va révéler des lacunes dans l'antidopage. On va le savoir d'ici deux, trois ans», croit-il.

À Rio, Plamondon a terminé au 13e rang. Mais en haltérophilie, on attend longtemps le classement final; parfois des années. L'athlète de 23 ans pourrait apprendre, avant ses prochains Jeux, qu'il a finalement terminé plus haut. Pour lui, c'est une réalité qui fait partie de son sport et qui ne disparaîtra jamais complètement.

«Il va toujours y avoir des pays prêts à faire n'importe quoi pour finir sur la plus haute marche du podium, croit Plamondon. Mais on se rend compte que les tests antidopage sont de plus en plus efficaces pour trouver les tricheurs. C'est quasiment impossible d'enrayer le dopage complètement. Mais au moins, on voit qu'on va dans la bonne direction.»

Photo Goh Chai Hin, archives Agence France-Presse

Pascal Plamondon aux Jeux olympiques de Rio