Le scandale de dopage russe semblait avoir atteint son paroxysme: à Sotchi, des espions à la solde de Moscou ont remplacé des échantillons souillés en pleine nuit, selon un rapport accablant de l'Agence mondiale antidopage (AMA) publié juste avant les Jeux de Rio.

Mais voilà que l'affaire plonge un peu plus dans le sordide. L'AMA, dont les bureaux sont à Montréal, a annoncé mardi que ses serveurs informatiques avaient été piratés par des hackers russes, qui ont ensuite divulgué des informations confidentielles sur des athlètes américains, dont les soeurs Serena et Venus Williams.

«L'AMA regrette profondément cette situation et est consciente de la menace représentée pour les athlètes dont des informations confidentielles ont été divulguées par cet acte criminel», a déploré Olivier Niggli, directeur général de l'AMA, dans un communiqué.

Le groupe derrière l'attaque s'appelle Tsar Team ou APT 28. Selon un spécialiste de la cybersécurité, ce groupe n'est pas seulement russe, mais travaille pour l'État russe.

«APT 28 serait un groupe soutenu par l'État et actif depuis 2007, explique James Scott, chercheur à l'Institute for Critical Infrastructure Technology. Contrairement à d'autres groupes de pirates russes, APT 28 ne dérobe pas les informations financières de ses cibles et ne revend pas ses informations. Plutôt, il recueille des informations géopolitiques qui seraient utiles à la Russie.»

Le CIO défend les athlètes américains

Ce groupe qui travaille apparemment pour le régime russe a donc piraté la base de données de l'AMA. Il en a soutiré le profil de quatre athlètes américains en compétition à Rio, dont celui des soeurs Williams ainsi que celui de la gymnaste Simone Biles. Il a publié leurs dossiers sur son site internet mardi.

Les pages rendues publiques émanent du système de suivi de l'AMA. On note que ces athlètes ont consommé des substances interdites. Mais selon l'Agence, les Américains bénéficiaient d'une d'autorisation d'usage à des fins thérapeutiques.

«Le CIO confirme que les athlètes mentionnés n'ont enfreint aucune règle antidopage pendant les Jeux olympiques de Rio 2016», a par ailleurs souligné une porte-parole du Comité international olympique à l'Agence France-Presse.

Sur son site, APT 28 menace de publier le profil confidentiel d'autres athlètes dans les prochains jours. Le groupe se présente par ailleurs comme faisant partie de la mouvance Anonymous.

C'est ce même groupe qui aurait piraté, début août, l'ordinateur de l'athlète russe Yuliya Stepanova. Celle-ci est la lanceuse d'alerte qui a permis de révéler le scandale de dopage russe. Elle vit cachée quelque part aux États-Unis.

Lors d'une conférence téléphonique avec les médias à la mi-août, elle s'était dite bouleversée par le piratage de son ordinateur. «Si quelque chose nous arrive, vous devez savoir que ce ne sera pas un accident», a-t-elle dit.