Toute puissante l'an passé, l'équipe Sky affiche encore une force impressionnante avant le départ du Tour de France, mais la pression du rouleau compresseur semble moins écrasante.

Le gouffre séparant la formation dirigée par Dave Brailsford et ses adversaires aurait-il été comblé ? «Sky est bien au-dessus du lot», répond Vincent Lavenu, qui dirige l'équipe AG2R La Mondiale. «Pour l'instant, l'écart est le même. Il faudra qu'en face, ils soient très, très forts», confirme Marc Madiot (FDJ.fr).

Les explications avancées l'an passé restent valables. «Ils ont un effectif pléthorique, ils embauchent des coureurs qui ont tout pour être leaders et qui sont transformés en équipiers, au service des autres. L'exemple type, c'est Edvald Boasson Hagen», estime Lavenu.

Le coureur norvégien est l'un des «survivants» du Tour 2012 dans l'équipe britannique, renouvelée pour plus de 50% pour cette édition 2013. Derrière Chris Froome, favori de la course, l'Australien Richie Porte, promu au rôle de leader de remplacement, et le Bélarusse Kanstantsin Siutsou sont les seuls avec Boasson Hagen à avoir gardé leur place.

De moins en moins de hasard

Le groupe a intégré deux coureurs d'expérience, l'Espagnol David Lopez et surtout le Bélarusse Vasil Kiryienka, dont les interminables relais en tête du peloton durant le début de saison (Paris-Nice, Critérium international) ont laissé interloqués nombre de coureurs et d'observateurs.

Trois Britanniques, Geraint Thomas et les néophytes Peter Kennaugh (en nets progrès) et Ian Stannard, complètent un effectif soudé, tendu vers le seul objectif de la victoire de Froome. Comme au récent Critérium du Dauphiné. «Mais ce qui s'est passé au Dauphiné ne va pas se passer dans le Tour», tempère Brailsford, soucieux d'éviter tout excès de confiance.

A l'inverse du début de saison, la formation britannique a moins sollicité ses hommes durant la course française qui fait office de répétition alpestre du Tour. Continuera-t-elle sur cette voie dans le Tour ? Sans doute, selon Lionel Marie (Orica), qui se base sur l'histoire récente de la Grande Boucle et les données tactiques.

«Dans le Tour, comme dans le sport de haut niveau, il y a de moins en moins de hasard à cause des enjeux. Toutes les équipes ont des intérêts. Donc, il y a toujours la possibilité d'avoir des alliés de circonstance. Une fois c'est pour le sprint, une autre fois pour être représenté dans l'échappée, une troisième fois pour la place de premier Français, etc».

Le «catenaccio» du vélo

Le seul nuage prédit dans le ciel dégagé de l'équipe Sky pourrait venir de la fatigue accumulée depuis le début de saison par un groupe qui a essuyé un revers d'importance dans le Giro (abandon de Wiggins). Preuve de la richesse de l'effectif, le Colombien Rigoberto Uran, venu en tant que simple lieutenant, a pris cependant la deuxième place de la course italienne.

«Sur ce qu'on a vu au Dauphiné, il y a un niveau d'écart. Mais il y a plus d'un mois jusqu'aux étapes alpestres du Tour», relève Marc Madiot, qui s'exprime aussi sur la supériorité et la stratégie «british».

«Ils sont dans la gestion computer, ils passent leur temps en altitude et le reste du temps, c'est tant de watts pendant tant de temps, tant de kilomètres», relève l'ancien vainqueur de Paris-Roubaix.

«C'est une forme de catenaccio du vélo», ajoute-t-il dans une comparaison avec les tactiques du football. «Un jeu hyper-défensif, ennuyeux au possible pour le téléspectateur, mais c'est une méthode qui gagne, ce n'est pas critiquable».