Son coéquipier Thomas Voeckler lui envoie des fleurs, son commanditaire Louis Garneau annonce à qui veut l'entendre qu'il sera au Tour de France l'an prochain, mais David Veilleux garde les pieds sur terre avant le Grand Prix cycliste de Québec, son grand objectif de fin de saison.

David Veilleux était facile à repérer parmi les coureurs d'Europcar qui s'apprêtaient à partir pour une sortie d'entraînement, jeudi matin dans le Vieux-Québec. L'unique Canadien du contingent français était le seul en cuissard court. Le cycliste de Cap-Rouge s'accommodait bien du vent et des 18 degrés Celsius.

Heureux de servir de guide à ses équipiers pour cette rare compétition à la maison, Veilleux aura un statut particulier pour la course de vendredi après-midi à Québec. Sa victoire aux Trois Vallées Varésines, il y a trois semaines, est la preuve qu'il a «franchi un palier», comme l'a dit son coéquipier Thomas Voeckler.

Malgré la pluie de félicitations reçues depuis son retour au pays, Veilleux refuse de s'enflammer. Oui, il a gagné, et de loin, la plus grande course de sa carrière en Italie, mais le niveau était bien inférieur à ce qu'il retrouvera aux Grands Prix de Québec, vendredi, et de Montréal, dimanche, tient-il à préciser.

Une façon de tempérer les attentes? «C'est facile de s'emporter», a répondu Veilleux en entrevue au Château Frontenac après le petit déjeuner. «Le monde va penser que je peux gagner ici. Il y a encore une marche. Je ne peux pas me reposer sur mes lauriers.»

Vingt-deuxième sur la Grande-Allée et sur le mont Royal en 2011, Veilleux se permet quand même de viser plus haut. «L'an dernier, j'espérais un top 15 ou un top 10 si tout allait bien, rappelle-t-il. Mais je n'avais pas le niveau. Cette année, je me sens plus en forme. Je me rapproche un peu plus du top 10 réaliste.»

Voeckler, la priorité

Aussi doit-il penser aux intérêts de son équipe qui, en Voeckler, champion de l'épreuve inaugurale en 2010, compte sur un sérieux prétendant à la victoire. «Il est très bien en ce moment et il est très motivé pour les championnats du monde, a rappelé le Québécois au sujet du meilleur grimpeur du dernier Tour de France. S'il se sent bien durant la course, je vais faire le travail pour lui. Mais s'il voit qu'il n'a pas de chance de gagner, il ne sera pas égoïste. Je le connais, il va me laisser aller, c'est certain.»

Un peu comme c'est arrivé en Italie, où Voeckler lui a dit de se tenir tranquille et de profiter du marquage dont il serait inévitablement l'objet. Quoi qu'il en dise, Veilleux a signé là-bas une victoire significative, l'une des plus importantes par un Canadien depuis quatre ou cinq ans, foi de l'ex-coureur Gord Fraser, aujourd'hui sélectionneur de l'équipe nationale.

«Les gens ne comprennent pas à quel point ces courses d'un jour sont dures en Italie, soulignait Fraser plus tôt cette semaine. En particulier à l'approche des Mondiaux. Il y a quelque chose avec les Italiens qui tiennent vraiment à faire partie de la Squadra Azzurra. Et c'est le genre de courses dans lesquelles ils excellent: punchées, accidentées, dures. Ils sont difficiles à battre à la maison! Quand je courais là-bas, ils étaient imbattables.»

Discret et cartésien, Veilleux s'est aussi libéré d'un certain complexe vis-à-vis de ses coéquipiers. C'est une chose de se croire dans une bonne journée, c'en est une autre de l'affirmer haut et fort durant une course: «Tu te dis: attends, ma forme n'est peut-être pas si bonne, ou: l'autre est très fort aussi, je suis peut-être mieux de travailler pour lui.»

Épreuve

Plus effilé que jamais - il a fait passer son poids de 74 à 72 kilogrammes... et il a complètement perdu sa pointe de vitesse -, Veilleux a mal accepté sa non-sélection pour le Tour de France. Il admet que la motivation lui a manqué durant ce mois de juillet passé au Québec: «Honnêtement, j'ai eu un peu de misère à le digérer.»

Il croit néanmoins avoir marqué des points pour l'année prochaine, même s'il sait que rien n'est acquis. «Je ne suis pas rendu là du tout. Ce sont eux qui décident et ce n'est pas basé sur des critères. C'est subjectif», rappelle l'athlète de 24 ans.

Veilleux, qui mène ses affaires seul, est actuellement en renégociation de contrat pour l'an prochain. Approché par une autre formation, il se voit encore chez Europcar, où il a trouvé un bon niveau de confort. Malgré son jeune âge, il refuse de regarder trop loin. À la longue, l'éloignement lui pèse - sa blonde de longue date travaille à Québec - et il tient à tout prix à terminer son baccalauréat en génie mécanique.

«J'adore ce que je fais, mais je ne mise pas tout sur le vélo», explique Veilleux, qui a toujours tenu ce discours. «L'an prochain, je vais me concentrer à essayer de participer au Tour et à faire d'autres belles courses. Après, on verra. Une année à la fois.»

Des coureurs à surveiller

Edvald Boasson Hagen (NOR, Sky)

Le Norvégien l'affirme haut et fort: il est en grande forme. Sa victoire récente au Grand Prix de Plouay en témoigne. «J'ai aussi pu bien m'entraîner depuis. J'estime que ma forme est à la hausse.» Deuxième derrière Voeckler en 2010, il est le grand favori sur papier.

Rui Alberto Faria Da Costa (POR, Movistar)

Le gagnant du Grand Prix de Montréal l'an dernier a fini deuxième derrière Boasson Hagen au récent Grand Prix de Plouay.

Peter Sagan (SLO, Liquigas-Cannondale)

Le champion slovaque de 22 ans a gagné partout où il est passé en 2012, incluant trois étapes au Tour de France. L'arrivée sur la Grande-Allée est idéale pour lui, mais a-t-il encore la fraîcheur en cette fin de saison?

Simon Gerrans (AUS, Orica Greenedge)

Vainqueur de Milan-San Remo en mars, premier succès de prestige pour la nouvelle formation australienne. Il a gagné une étape dans les trois grands Tours. Son coéquipier Matthew Goss sera à son service. Un deux sur lui.

Ryder Hesjedal (CAN, Garmin-Sharp)

Il a connu deux déceptions après sa victoire historique au Giro: chute et abandon au Tour de France, et échappée ratée aux Jeux olympiques de Londres. Après s'être ressourcé chez lui à Victoria, il se sent d'attaque pour Québec, où il avait pris le quatrième rang en 2010.

Thomas Voeckler (FRA, Europcar)

Un malin qui sent la course comme pas un. En «méforme» il y a deux ans, il avait surpris tout le monde avec une attaque juste avant la flamme rouge. Cette fois, le maillot à pois du dernier Tour, un favori de la foule au Québec, arrive bien préparé et très motivé. «Je ne suis sans doute pas le favori, mais peut-être un outsider, a estimé le Français. J'ai confiance en mes moyens, mais j'arrive très humble parce que je sais qu'il y a beaucoup plus de chances que je sois déçu que l'inverse.»

Luis León Sánchez (ESP, Rabobank)

Spécialiste du contre-la-montre - il est quadruple champion national de la spécialité -, ce quadruple vainqueur d'étape au Tour de France aime attaquer à une dizaine de kilomètres de l'arrivée. C'est d'ailleurs la façon dont il a remporté la 14e étape du Tour de France, où il a devancé Sagan, et la Classica San Sebastian. Thomas Voeckler l'a rangé parmi ses deux favoris avec Sagan.

Épreuves de cyclotourisme en 2013

Serge Arsenault, président des Grands Prix Cyclistes de Québec et de Montréal (GPCQM), a annoncé, hier, la tenue d'épreuves de cyclotourisme l'an prochain, appelées La Québécoise et La Montréalaise.

Ces rendez-vous pour amoureux de vélo de tous calibres se tiendront en marge des courses du Pro Tour. Les organisateurs croient que l'événement attirera de nombreux cyclistes du Québec et de l'étranger.

Cette formule est déjà populaire en Europe. Trois parcours seront proposés à Québec et à Montréal pour convenir à tous les participants.

«Chaque année, les parcours seront modifiés pour témoigner de la grande diversité de nos paysages et pour présenter notre merveilleux pays», a indiqué Serge Arsenault.

Les parcours finaux ainsi que toutes les informations nécessaires à la participation seront disponibles dès mercredi prochain sur le site web de l'événement.

Le Soleil