La NBA deviendra à l'automne 2017 la première des quatre grandes ligues nord-américaines à avoir de la publicité sur ses chandails. Cette décision dévoilée hier va ouvrir la voie à la LNH, estime un expert.

«Dans le contexte de la financiarisation du sport, c'est inévitable. On va le voir dans un avenir rapproché même dans la LNH, je le crains, lance André Richelieu, professeur spécialisé en marketing du sport à l'ESG-UQAM. La NBA est en train d'ouvrir les écluses. On crée un précédent. Ça va être très difficile de faire marche arrière.»

Les chandails des 76ers de Philadelphie seront ornés d'un logo publicitaire dès l'automne 2017, a annoncé l'équipe hier. Un petit logo de l'entreprise de revente de billets StubHub sera cousu à la hauteur du coeur, sur l'uniforme.

Selon une source citée par ESPN, l'entente vaudrait à l'équipe 6,4 millions de dollars canadiens par année. Pour encadrer cette nouvelle manne, la NBA s'est dotée de règles claires. Par exemple, les revenus seront partagés. L'équipe gardera le quart de la somme; un autre quart sera réparti parmi toutes les équipes dans un système de partage des revenus; puis la moitié restante ira aux joueurs et contribuera à la hausse du plafond salarial.

Pour certains amateurs, la publicité sur les chandails représente une hérésie. Ce n'est certainement pas le cas du PDG des 76ers, qui avait hier un ton triomphant lors de l'annonce. «Nous sommes très excités que la NBA ait décidé d'innover parmi les grandes ligues américaines», a déclaré Scott O'Neil.

Les maillots des 76ers vendus en magasin ne vont pas arborer le logo de StubHub. Par contre, l'équipe entend en vendre dans ses propres boutiques, peut-être pour voir si le public est prêt à acheter un chandail avec une publicité.

«On pense vraiment que le petit Scottie, qui a 9 ans, voudra porter ce que les joueurs portent sur le court», a ajouté M. O'Neil en parlant d'un consommateur hypothétique, qui deviendrait un panneau publicitaire ambulant.

La LNH ne ferme pas la porte

L'annonce des 76ers sera certainement suivie par celle de plusieurs autres équipes de la NBA dans les prochains mois. Mais qu'en est-il pour les autres ligues?

Dans la LNH, les dirigeants ont toujours laissé la porte ouverte à la publicité sur les chandails. «On va voir ce qui va se passer dans les autres sports et juger l'ampleur de cette possibilité», a indiqué le commissaire Gary Bettman en 2014.

Les équipes de la LNH, de la MLB et de la NFL font de plus en plus figure d'exceptions. En Europe, la publicité sur les maillots est monnaie courante ; ici également, dans la LCF et la MLS.

André Richelieu pense que l'arrivée de publicité sur les chandails est une idée dangereuse en Amérique du Nord, où le rapport avec l'uniforme dans le sport est quasiment sacré.

«À mon avis, c'est une mauvaise idée et ça va pratiquement salir l'uniforme des équipes. Les équipes légendaires comme les Yankees et le Canadien pourraient aller chercher beaucoup d'argent. Mais en même temps, il y a un risque de résistance des amateurs. Quelle réaction auront les partisans lorsque la publicité arrivera sur ces chandails historiques? L'opportunité est très grande, mais le risque l'est tout autant.»

Selon le professeur spécialiste du marketing sportif, une surdose de publicité peut également avoir un effet pervers pour les annonceurs eux-mêmes.

«Il y a le risque de ce qu'on appelle l'effet pizza en marketing: il y a tellement de publicité partout qu'on ne voit plus les publicités, il y a banalisation de la publicité. Elle envahit tout l'espace sportif, ce qui peut conduire à une forme de ras-le-bol du consommateur.»

Dans le cas de la NBA, on est encore loin des uniformes bariolés de publicité du hockey européen. Les réclames ne peuvent excéder sept centimètres sur sept centimètres et chaque maillot ne peut en compter qu'une. Pour l'instant.

Il est difficile de savoir combien d'argent pourrait aller chercher le Canadien annuellement avec une telle publicité, mais probablement davantage que les 6,4 millions des 76ers. La franchise de la NBA vaut 900 millions de dollars canadiens, selon Forbes. Le Canadien vaut 1,3 milliard, selon la même source.