Ce n'est qu'une question de temps avant que Julie Labonté ne s'inscrive seule dans le livre des records.

Grâce à un premier jet de 17,83 mètres réalisé il y a 10 jours à La Jolla, en Californie, la lanceuse de poids québécoise a égalé le record national établi par Lieja Tunks en 2007. Un centimètre de plus et l'athlète de 21 ans aurait battu «pour vrai» la marque canadienne.

Contente? Très. Contentée? Pas tout à fait. «On veut toujours en faire plus», a expliqué la lanceuse, jointe la semaine dernière à Tucson, en Arizona, où elle s'entraîne et étudie depuis un an.

Labonté se réjouissait avant tout de la constance dont elle a fait preuve après son lancer record: cinq autres lancers au-delà des 17 mètres, une première pour l'athlète de Sainte-Justine, dans le comté de Bellechasse: «C'est ma meilleure série à vie. Habituellement, j'ai toujours un lancer dans les 16 mètres.»

Cette régularité lui laisse croire que son objectif d'atteindre les 18 m cet été est très réaliste. À terme, elle vise 18,30 m, le minima qui lui ouvrirait la porte des Jeux olympiques de Londres, en 2012. «C'est le rêve que je veux atteindre», dit-elle.

Troisième à La Jolla, Labonté dit avoir beaucoup appris en se mesurant à quelques lanceuses de calibre international. La gagnante avec 19,15 m, l'Allemande Nadine Kleinert, a été vice-championne olympique à Athènes en 2004. La médaillée d'argent, l'Américaine Sarah Stevens-Walker (18,09 m), est classée deuxième aux États-Unis.

«Avant le dernier lancer, je devançais l'Américaine d'un centimètre. C'est là que j'ai compris que je pouvais aussi être de ce niveau-là. C'est vraiment intéressant», dit Labonté, 14e au monde en ce début de saison extérieure. En 2010, un jet de 17,83 m lui aurait valu la 33e place.

Un plomb

Labonté s'entraîne au lancer depuis six ans. Plus jeune, elle jouait au hockey, au basketball, au baseball et au softball. Ses relais du champ centre au deuxième but avaient du plomb, raconte son père et entraîneur, Daniel Labonté, qui a fait de l'athlétisme dans sa jeunesse. «Ça ne partait pas en balloune. Je me disais: crime, elle a donc bien du bras», se souvient-il.

Julie s'est laissée convaincre de prendre part à une compétition scolaire. «J'étais quand même très forte physiquement, dit-elle. J'ai commencé au poids et au disque. Je ne m'entraînais quasiment pas et je faisais de bons résultats.» Elle s'est rapidement illustrée sur le circuit civil et a effacé tous les records nationaux juvéniles et juniors, dont certains remontaient aux années 60.

Double championne canadienne senior, Labonté a reçu plusieurs offres d'universités américaines. Elle a été séduite par le campus de l'Université de l'Arizona, à Tucson, pour son encadrement sportif et académique... et son climat. «Depuis le mois d'août, je pense qu'il a plu deux fois ici, dit celle qui s'est inscrite au programme d'études familiales et développement humain. Je suis tombée amoureuse des États-Unis et de l'Arizona.»

En mars, Labonté a remporté le championnat intérieur de la NCAA. Un mois plus tôt, elle avait établi un record canadien intérieur avec un lancer de 17,60 m.

Force pure

À 1m83 et 91 kg, Julie ressemble davantage à une nageuse qu'à une lanceuse de poids, fait remarquer son père. «Elle est de la même grandeur que ses rivales, mais plus mince», dit M. Labonté, qui conseille encore sa fille à distance. Sa force pure impressionne: elle peut soulever 220 livres au développé couché et 330 livres au squat.

À Tuscon, Labonté profite de l'apport d'un nouveau coach, Craig Carter, et de coéquipières qui la poussent à l'entraînement. La progression est tangible: un mètre par rapport à l'an dernier. Elle travaille à améliorer sa puissance et sa technique. «Mon plus gros problème est que j'utilise surtout mon haut du corps alors que mes jambes sont quand même très fortes, souligne-t-elle. Je devrais combiner les deux pour aller plus loin.»

Bientôt, le centimètre ne sera plus qu'une anecdote.