Ça ne manque pas d'ironie : la Coupe du monde Korean Air se déroule sans les patineurs... coréens. En l'absence de la puissance mondiale, on aurait pu s'attendre à ce que ce soit partie facile pour les Canadiens, surtout chez les gars. Ce fut loin d'être le cas.

Même Charles Hamelin s'est retrouvé dans le pétrin en cette surprenante première journée consacrée aux qualifications, vendredi, à l'aréna Maurice-Richard de Montréal. Troisième de sa vague au 500 mètres, il doit sa place en quart de finale à son seul chrono. Pas de conséquence sérieuse, donc, mais rarement (jamais?) avait-on vu le champion olympique de la distance se retrouver dans une telle position à ce stade de la compétition.

Certes, il y avait cette glace, molle, qui n'aidait pas. Mais il y a surtout ce nouveau règlement destiné à favoriser les dépassements. En gros, un patineur qui se fait dépasser à l'intérieur a beaucoup moins de latitude pour fermer la porte. L'Américain Jeff Simon en a profité pour surprendre Hamelin. Celui-ci a figé, s'est retrouvé deuxième, a perdu sa vitesse, ce qui a permis au modeste Français Thibaut Fauconnet de passer à l'extérieur. Avec un tour à faire, c'était trop tard pour Hamelin.

«J'étais comme gelé dans la ligne droite. Je me suis dit : je fais quoi?», a raconté Hamelin, qui a eu besoin de quelques minutes pour retrouver son calme après la course.

Le patineur de Sainte-Julie se demandait quelle mouche avait piqué Simon, jugeant qu'il aurait sagement pu se caler dans son sillage et assurer son avancement à la ronde suivante sans prendre de risque. «C'est sûr que je m'en voulais un peu, mais ce n'était pas un hasard non plus, a dit Hamelin. Son dépassement était pas mal osé.»

Les patineurs canadiens n'ont appris que jeudi cette nouvelle application des règlements, destinée à améliorer le spectacle. Une nouvelle façon de tracer l'ovale a même été testée il y a un peu plus d'un an, mais l'idée a été vite abandonnée, a expliqué Yves Hamelin, directeur du programme courte piste de l'équipe canadienne. Le comité technique de la fédération internationale a donc été invité à s'attaquer à l'arbitrage. Les deux juges de coin ont aussi été retirés et remplacés par un responsable des reprises vidéo.

«Le sport évolue, le sport change, il faut s'habituer, autant les athlètes que les arbitres», a conclu Charles Hamelin, qui s'est qualifié sans problème pour la demi-finale du 1500 mètres, présentée samedi. Les quarts de finale du 500 mètres seront disputés dimanche. François-Louis Tremblay, médaillé de bronze olympique, et Michael Gilday y seront avec Hamelin.

Selon Yves Hamelin, le nouveau règlement explique aussi en partie la matinée très difficile connue par son groupe masculin. Trois des six patineurs en action dans les deux épreuves n'ont pu accéder directement aux rondes finales du week-end, ce qui constitue généralement une formalité pour les Canadiens. Rémi Beaulieu a été carrément disqualifié en ronde initiale du 1000 m. François Hamelin (1000 m) et Guillaume Bastille (1500 m) pourront se reprendre au repêchage samedi matin. L'après-midi a été beaucoup moins compliqué alors que les six Canadiens se sont qualifiés directement.

La très jeune équipe féminine s'est distinguée avec une journée parfaite. Marianne St-Gelais, Valérie Maltais, Marie-Ève Drolet, Jessica Hewitt, Marie-Andrée Mendès-Campeau et Valérie Lambert ont toutes passé directement aux rondes finales.

Quant aux Coréens, ils sont restés chez eux, à gérer les contrecoups d'une crise majeure qui a secoué leur équipe à la suite des Jeux olympiques de Vancouver. Des courses de sélection fixées à l'avance ont mené au congédiement d'un entraîneur et à la suspension de deux patineurs de renom. Rien de très édifiant. Dommage pour le spectacle à Montréal et Québec.