C'est la saison de la chasse pour Marie-Andrée Lessard. La chasse aux commandites. À 32 ans, la volleyeuse de LaSalle doit reprendre le bâton du pèlerin et trouver un moyen de financer sa saison 2011, étape cruciale en vue des Jeux olympiques de Londres, l'été suivant.

Lessard et sa partenaire Annie Martin doivent trouver environ 130 000$ pour couvrir les frais d'une saison sur le World Tour de volleyball de plage. Une «nécessité» pour pouvoir continuer à pratiquer son sport. «Ce n'est pas quelque chose que j'aime, me lever un matin en me disant: ah! je vais appeler un tel pour le convaincre de me donner 25 000$!» admet-elle en entrevue.

À 130 000$, Lessard et Martin, classées 31es au monde, fonctionnent selon un petit budget par rapport à leurs principales rivales sur le circuit. En 2010, elles ont volontairement choisi de participer à moins de tournois. Elles voyagent sans thérapeute ni technicien vidéo. Leur entraîneur, Vincent Larivée, ne les a pas accompagnées partout. Et en tant que chum d'Annie Martin, Larivée représente une aubaine sur le plan salarial. «On ne pourrait jamais engager quelqu'un de sa trempe s'il venait de l'extérieur», souligne Marie-Andrée Lessard.

L'an dernier, Lessard et Martin pouvaient au moins compter sur le brevet de Sport Canada, obtenu de haute lutte après une bataille en arbitrage avec Volleyball Canada. Cela représentait 36 000$ libres d'impôt. Pour 2011, elles ont d'ores et déjà fait une croix sur ce financement. Pour y avoir droit, elles devaient s'établir en permanence au centre national d'entraînement de Toronto. Et encore, le brevet était loin d'être garanti.

«Le brevet, ça permet de payer le loyer, la nourriture, l'essence. Toutes nos dépenses de vie», explique Lessard.

Conséquence fâcheuse du retrait du brevet, Lessard et Martin ne se qualifient plus automatiquement pour le programme Équipe Québec. Ce programme du gouvernement du Québec offre une bourse annuelle de 4000$ aux athlètes d'excellence d'un sport d'équipe. En faisant la démonstration qu'elles figurent parmi les meilleures de leur sport au pays, elles espèrent pouvoir maintenir leur statut auprès d'Équipe Québec. Privilège de la plus haute performance puisqu'il garantit une somme de 20 000$ à leur entraîneur.

«On est chanceuses parce que le volleyball de plage n'est pas un sport purement amateur, souligne Lessard. On a des bourses si on accède au tableau principal.» En neuf tournois la saison dernière, les volleyeuses québécoises ont cumulé des gains de 29 650$ américains.

«C'est ce qui fait qu'à la fin de l'année, on n'est pas prises à la gorge, dit Lessard. Ça aide aussi à faire la transition de janvier à mai, quand il n'y a pas de tournoi et pas d'argent des commandites.»

En 2010, le principal commanditaire du duo Lessard-Martin était Urbania, un projet immobilier de Laval piloté par une compagnie appartenant... au père et au frère de Marie-Andrée Lessard. Depuis trois ans, cette dernière est aussi ambassadrice pour le Groupe médical Biron. Elle a aussi profité d'une bourse de 6000$ de CAN Fund, organisme privé qui aide plus de 500 athlètes canadiens. Pour 2011, «on repart à zéro», rappelle cependant Lessard.

«On vit correctement, mais ni Annie ni moi sommes de grandes dépensières, note Lessard, bachelière en commerce international et marketing à McGill. Nos autos sont payées depuis longtemps. Je conduis une Escort 1999. On vit bien mais on n'a pas de grands besoins.»

À ses débuts dans l'équipe canadienne, il y a une dizaine d'années, Lessard comptait sur son accession au tableau principal pour payer hôtel et nourriture. Sinon, la carte de crédit écopait. «J'étais tellement stressée à l'idée de ne pas pouvoir la payer que je bousillais mes fins de match en qualifications!» se souvient-elle en riant.

À 32 ans, elle n'est plus prête à vivre ce genre de stress. L'an prochain, son budget devra être bouclé en grande partie avant la saison. Sinon, elle ne jouera pas.