Jennifer Abel et David Lemieux nous accueillent dans leur chaleureuse demeure située dans un coquet et paisible quartier de Laval. Dans les bras d’Abel, le petit Xander, 6 mois, nous offre un sourire craquant. « C’est un petit charmeur », lance la nouvelle maman.

Notre visite survient un an presque jour pour jour après la retraite d’Abel. Son fiancé, ancien champion du monde IBF des poids moyens, l’a imitée en août dernier.

S’il fait gris dehors en ce mois de novembre, c’est tout autre chez les ex-athlètes. Leur bonheur, il se voit. Surtout, il se ressent.

« La dernière année a été chargée de nouveautés. Prendre ma retraite, tomber enceinte, vivre ma grossesse… Maintenant que Xander est ici, ça aussi, c’est une autre étape. C’est beaucoup de changements, mais que j’adore », dit d’entrée de jeu la femme de 31 ans, assise à la table de la salle à manger avec son fils sur ses genoux.

« Je ne mentirai pas qu’il y a eu des journées où je parlais avec David et je me demandais : est-ce que ça va revenir, me retrouver un peu dans mon quotidien ? C’était vraiment un [virage à] 180 degrés, de passer d’avoir un horaire fixe à ne plus avoir d’horaire et [à devoir] m’en créer un… »

Abel prend une pause, interrompue par le couinement de Xander. « Ça, c’est le cri de la fatigue », dit-elle en riant.

Puis, elle reprend : « Ça va super bien, honnêtement. […] On l’a désiré, ce moment-là. »

Ils l’ont désiré, oui. Abel et Lemieux se sont rencontrés pour la première fois en 2014, après avoir échangé des messages sur les réseaux sociaux. Le souvenir de leurs débuts donne d’ailleurs lieu à un échange cocasse.

« Je ne savais pas tout à fait qui elle était, relate Lemieux. Je pense que c’est un ami qui m’a dit : “Hey, le cave, c’est la plongeuse Jennifer Abel !” »

« Il m’avait posé la question : pourquoi t’es tout le temps habillée en sport ? J’étais comme : mais qu’est-ce que tu ne comprends pas [quand je dis que] je m’en vais m’entraîner ! », s’esclaffe Abel.

Ainsi a commencé la romance entre ces deux grands athlètes de deux milieux bien différents.

Trois ans plus tard, en 2018, Abel a participé aux Jeux du Commonwealth en Australie. Là-bas, elle a pris une photo avec un koala ; on y voit la plongeuse qui sourit à la caméra avec l’animal dans ses bras. À son retour au Québec, la Lavalloise a montré ledit cliché à son conjoint, qui a eu comme une révélation : un jour, il aurait un enfant avec elle.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Les deux athlètes aiment leur nouvelle réalité.

Après nous avoir raconté cette anecdote, Lemieux nous montre Abel, qui présente la même pose que sur la photo. Sauf que c’est Xander qui se trouve dans ses bras.

— Regarde, c’est la même chose ! s’exclame-t-il.

Le temps de profiter

En annonçant sa retraite, en août dernier, David Lemieux a insisté sur son désir de passer plus de temps en famille. C’est ce qu’il fait au quotidien depuis trois mois.

En ce moment, notre priorité est Xander. Chaque jour, il y a des nouveautés avec lui. Chaque semaine, il grandit, il évolue. On maximise notre temps avec lui.

David Lemieux

Xander est le premier enfant issu de l’union du couple. Il est le troisième du boxeur, après Léon et Lillyanna.

Les deux athlètes aiment leur nouvelle réalité. Ni l’un ni l’autre n’a de regret. Cette retraite sportive, « c’est juste un chapitre dans [leur] vie », rappelle Lemieux.

Le Montréalais a commencé à pratiquer son sport à l’âge de 9 ans, alors qu’il était « un petit bum » et qu’il mettait ses énergies aux mauvais endroits. « Et boom, j’ai trouvé la boxe », lance-t-il.

« J’ai appris la discipline, ça m’a guidé dans la bonne direction, et me voilà aujourd’hui avec ma belle femme Jennifer et mes beaux enfants, dit-il en regardant sa moitié. Je suis fier de ce que j’ai accompli. C’est venu avec du vrai travail. Il n’y a rien qui m’a été donné, je suis allé le chercher. »

Celui qui a remporté 43 combats au fil de sa fructueuse carrière pro était prêt à tourner la page.

Quand je pars de la maison trois ou quatre heures et que je n’ai pas vu Xander, il me manque plus que la boxe me manque.

David Lemieux

Quant à Abel, elle a plongé pendant 25 ans, dont 16 au plus haut niveau. Elle a pris part à quatre Jeux olympiques et en est ressortie avec deux médailles. À Tokyo, à l’été 2021, elle savait qu’elle exécutait ses derniers plongeons. La prochaine étape était claire et très attendue : fonder une famille.

« Je n’ai jamais été aussi heureuse et sereine », dit-elle, calmement.

« Quand on est des athlètes, on est programmés à faire ci, à faire ça pour arriver à un tel objectif, enchaîne-t-elle. Mais en ce moment, je n’ai plus la pression que j’avais au quotidien en étant une athlète et je peux juste me consacrer à mon enfant, ma famille. Pour moi, c’est ça, le bonheur. »

Les prochains projets

Ainsi Abel et Lemieux ont-ils entamé le prochain chapitre de leur livre. Comment s’écriront les prochaines pages ? Ils l’ignorent encore. Ils ont des options, des idées, mais rien ne presse. Abel souhaiterait « enseigner [son] savoir », en plongeon ou en pilates, sans nécessairement être entraîneuse au quotidien. « C’est important de prendre le temps de bien faire les choses », soutient-elle.

L’ex-plongeuse se tient au courant des résultats de plongeon et a gardé contact avec sa meilleure amie et partenaire synchro, Mélissa Citrini-Beaulieu. « C’est la marraine de Xander ! s’exclame-t-elle. On l’a gardée proche à vie, Mélissa. »

De son côté, Lemieux est en contact fréquent avec le président d’Eye of the Tiger Management, Camille Estephan. Il est ouvert à un rôle d’entraîneur.

« La boxe m’a permis de devenir la personne que je suis aujourd’hui, dit l’homme de 33 ans. Je ne peux pas tourner le dos et dire : merci, bonsoir, c’est tout. Maintenant, [c’est de voir] ce que je peux donner à la boxe pour les jeunes générations. »

« Les choses qui doivent venir vont venir. Mais maintenant, on veut mettre l’effort sur nous, bien élever Xander. »

Notre entretien tire à sa fin. Xander, qui a combattu le sommeil, s’amuse à nos pieds.

« Voulez-vous d’autres enfants ? demande-t-on aux parents.

— Ben là, as-tu vu combien il est cute ! répond la maman en regardant son fils.

— On verra ! », ajoute Lemieux.