(Gander, Terre-Neuve) Même après une défaite, on peut toujours compter sur la spontanéité de Juraj Slafkovsky pour faire rigoler la galerie.

Jeudi matin, au terme de l’entraînement, Brendan Gallagher racontait que les joueurs du CH avaient passé leur mercredi soir aux quilles, là où, a-t-il dit, Rafaël Harvey-Pinard a été le meilleur joueur, et Juraj Slafkovsky, le pire.

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Avance rapide à jeudi soir. Ce même Slafkovsky, après une rencontre pénible mardi, avait retrouvé ses airs de jeune premier. Batailles gagnées dans les coins, percées entre les défenseurs, un florilège de réussites pour le grand Slovaque.

Slafkovsky s’amène au podium après le match. Alors, la confiance, il la retrouve où ? « Certainement pas au bowling ! », lance-t-il. L’hilarité suit.

Même Martin St-Louis a trouvé le moyen de rigoler, après ce qui était pourtant une septième défaite en sept matchs préparatoires. Interrogé sur la lourdeur des défaites, il a protesté. « On a gagné les tirs de barrage, donc je vais y aller avec ça ! », a lancé le coach.

Effectivement, le Canadien s’est imposé dans la séquence de tirs de barrage, qui était déjà prévue avant la rencontre, grâce à un joli but de Rem Pitlick. Mais au terme des 60 « vraies » minutes du match, ce sont les Sénateurs qui ont triomphé, au compte de 4-3.

Comme on peut le constater, l’ambiance n’était pas à la défaite. Après tout, les joueurs ont passé la journée à signer des autographes partout où ils allaient, pour ce match organisé dans le cadre d’un concours que le village de Twillingate avait remporté en 2020. Même ceux qui étaient laissés de côté étaient sollicités. Harvey-Pinard, pour ne nommer que lui, s’est fait interpeller dans les gradins, pendant un entracte, pour signer un gilet, parce que c’est visiblement ce qui arrive aux légendes du bowling.

C’était ce type d’environnement. Un match disputé dans un aréna municipal de quelque 1000 places, une proximité comme on en voit rarement dans la LNH.

Et il y avait bel et bien des éléments positifs pour le Canadien. Le jeu de Slafkovsky en était un. La tenue de Gallagher, aussi. Après une saison 2021-2022 atroce, le vétéran déploie l’énergie d’une recrue de 19 ans au camp. Il a préparé le but de Kirby Dach en deuxième période, obtenant un troisième point en trois matchs préparatoires.

Gallagher avait amorcé la dernière saison avec deux petits points en neuf matchs, et à l’évidence, il ne souhaite pas qu’on l’y reprenne.

C’est le Brendan Gallagher qu’on connaît. Il a souvent dit qu’il a eu un long été, qu’il s’est reconstruit physiquement. On voit qu’il a du bon hockey en lui. Il a un excellent camp.

Martin St-Louis, entraîneur-chef du Canadien

Dach a quant à lui peut-être disputé son meilleur match du camp. Et le défenseur de 20 ans Kaiden Guhle continue à ressembler à un joueur mûr pour la LNH.

Les problèmes

Le hic, c’est qu’on commence à sentir des problèmes récurrents qui pourraient miner cette équipe en cours de route, qui font en sorte que tous lui prédisent les bas-fonds du classement.

Ça commence par la jeunesse. Les hauts et les bas de Slafkovsky, d’un match à l’autre, sont un rappel du défi de la constance pour un jeune de 18 ans.

Jeune, la brigade défensive le sera. Avec Joel Edmundson blessé, Michael Matheson et Chris Wideman laissés de côté, il n’y avait que David Savard et, en forçant un peu, Madison Bowey comme vétérans. Les jeunes qui avaient droit à une audition de plus ont tous montré de beaux flashs, mais aussi des moments qu’ils « aimeraient revoir ».

Parlant de problèmes récurrents, on peut se demander dans quelle mesure les gardiens pourront réparer les erreurs commises devant eux. Que ce soit Primeau, Jake Allen ou Samuel Montembeault, personne n’a encore joué avec aplomb.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Cayden Primeau

St-Louis est différent de bien des entraîneurs dans la LNH, mais là où il les rejoint, c’est dans l’importance qu’il accorde au processus par rapport aux résultats. Ce qu’il a encore fait après la rencontre.

« On s’améliore dans nos concepts, nos idées. On est très compétitifs. On se bat, on a de l’énergie. On est robustes. Ce qu’il manque, c’est une victoire. Mais on voit qu’on est capables de jouer dans cette ligue même quand on n’a pas tous nos gars. Quand on aura tous nos gars, ça va aider à avoir des résultats. »

Il est vrai que tout entraîneur à la barre d’une équipe qui a perdu ses sept premiers matchs préparatoires préférerait aussi le processus. C’est normal, c’est là une façon d’éviter que les joueurs se découragent et cessent d’être réceptifs au message.

« On veut toujours gagner. Mais pendant le camp, on veut bâtir notre jeu en vue de la saison. On fait des pas dans la bonne direction. Il y a toujours des choses à corriger. Mais si on compare au début du camp, on progresse », a assuré Dach.

Il faudra s’en reparler quand les matchs compteront au classement, mais pour l’instant, le message de St-Louis passe. C’est déjà, pour lui, une partie de la bataille qui est remportée.

En hausse : Christian Dvorak

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Christian Dvorak

Un bon match dans l’ombre de ses deux colosses ailiers. Il a créé le revirement menant au but de Kirby Dach et son bon travail en fond de territoire adverse a aussi mené à deux pénalités des Sénateurs.

En baisse : Otto Leskinen

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Otto Leskinen

Une mauvaise lecture du jeu a mené directement à un surnombre sur le deuxième but des Sénateurs. Martin St-Louis a utilisé le défenseur à profusion, mais il a fini sa soirée à -3.

Le chiffre du match :,851

C’est le taux d’efficacité de Cayden Primeau en quatre matchs préparatoires cet automne. Il s’est certes ressaisi après un début de match difficile, mais on voit mal en quoi il a forcé la direction du CH à y penser deux fois avant de l’envoyer à Laval au terme du camp.

Dans le détail

Un essai à oublier

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Rem Pitlick

En l’absence de Nick Suzuki, Martin St-Louis peut tester différentes combinaisons pour trouver un centre à Cole Caufield. Aussi bien oublier celle de jeudi. Le petit ailier patinait en compagnie de Rem Pitlick et du nouveau venu Sean Monahan. Or, les trois joueurs ont conclu la rencontre avec un rendement de -3. En fait, ils ont été sur la patinoire pour les trois buts marqués à 5 contre 5 par les Sénateurs. Les trois comparses n’ont totalisé que cinq tirs, et ça ne cliquait guère plus en avantage numérique. St-Louis a dit jeudi matin qu’il s’attendait à ce que Suzuki soit prêt pour le début de la saison. S’il ne l’est pas, St-Louis pourrait devoir jongler de nouveau avec ses unités.

Un joueur qui dérange

PHOTO GRAHAM HUGHES, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Arber Xhekaj

Depuis des années, Brady Tkachuk pimente les affrontements entre le Canadien et les Sénateurs. Mais le Tricolore ne comptait pas nécessairement de joueur qui dérangeait l’adversaire comme Tkachuk sait le faire. Si jamais il se rend et s’établit dans la Ligue nationale, Arber Xhekaj pourrait être ce joueur. Il est déjà en train de se faire une pléiade d’amis dans le camp ottavien au cours de ce camp. Ça a commencé au tournoi des recrues, où un espoir des Sénateurs, Angus Crookshank, avait dit que son équipe n’avait « pas beaucoup de respect » pour lui. Voilà que le gros numéro 72 a laissé tomber les gants lors des deux derniers matchs ; cette fois-ci, il venait défendre Kirby Dach, plaqué par Austin Watson. Puis, dans les derniers instants du match, Xhekaj et Tkachuk, justement, se cherchaient noise sur la patinoire. Cela dit, Xhekaj devra apprendre à jouer de discipline, car il a écopé de deux autres pénalités mineures dans ce match, pour un total de quatre en cinq matchs. S’il veut faire sa place dans la LNH, le désavantage numérique devra faire partie de ses forces, et il est physiquement impossible d’être au banc des pénalités tout en jouant en infériorité numérique.

Ça fonctionne pour Stützle

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Tim Stützle

L’entraîneur-chef des Sénateurs, D.J. Smith, a démantelé son premier trio pour tenter des expériences. Il a justifié sa décision en avançant qu’il sait très bien ce dont sont capables Brady Tkachuk, Josh Norris et Drake Batherson lorsque réunis. Il sera sans doute rassuré par ce qu’il a vu ; si jamais Norris devait s’absenter, Tim Stützle a démontré qu’il peut lui aussi développer de la cohésion avec les deux ailiers. C’est en effet lui qui a préparé les buts de Batherson et de Tkachuk en première période. Et c’est sur une présence avec Mathieu Joseph qu’il a obtenu le tir de pénalité sur lequel il a marqué. Bref, même si ça a cliqué pour le jeune Allemand avec Alex DeBrincat et Claude Giroux jusqu’ici, il est parfaitement capable de générer de l’attaque avec d’autres compagnons de trio.

Ils ont dit

Il a bien joué, peut-être son meilleur match. J’étais content de ses touches. Il a joué avec vitesse, pesanteur. J’étais content.

Martin St-Louis, au sujet de Juraj Slafkovsky

Je me sens mieux sur la glace de match en match. Je sens que ça va aller. J’ai besoin d’avoir ma confiance pour transporter la rondelle. Quand j’ai confiance, je fais des jeux, je contrôle la rondelle.

Juraj Slafkovsky

On transportait bien la rondelle en zone neutre, et une fois en zone offensive, on lisait bien nos intentions et on faisait des jeux en bas de zone et on repérait le gars plus haut dans la zone.

Kirby Dach, au sujet de son trio avec Brendan Gallagher et Mike Hoffman

On s’est améliorés à chaque match où j’étais dans la formation. En deuxième période, on a passé plus de temps dans leur zone que dans la nôtre. On fait encore des erreurs qui nous font mal, mais c’est un apprentissage.

David Savard