Souriante et détendue, l’ex-canoéiste de 29 ans était manifestement sereine. Son entrée dans le programme de physiothérapie au début de l’année n’a fait que confirmer une décision « mûrement réfléchie ». « J’adore ça ! », a lancé l’étudiante.

La présentation des Championnats du monde au Canada, à Halifax, du 3 au 7 août, n’a pas été suffisante pour convaincre Laurence Vincent Lapointe d’étirer sa carrière un an de plus. Pas plus que la proximité exceptionnelle des Jeux olympiques de Paris, considérant le report d’un an de ceux de Tokyo.

« Je ne m’ennuie pas de m’entraîner, a-t-elle souligné. Je ne m’ennuie pas de la performance, d’aller sur l’eau et de me donner à fond au point où j’ai parfois envie de vomir. »

Sa conquête de deux médailles dans le bassin olympique de Tokyo, l’été dernier, l’a comblée. Elle a enlevé l’argent au C1 200 m et le bronze au C2 500 m avec sa partenaire ontarienne Katie Vincent.

J’ai accompli ce que j’avais à accomplir. Après, il y a eu une espèce de fatigue émotionnelle et mentale. Je me suis donné le temps d’y réfléchir [à mon avenir] à tête reposée.

Laurence Vincent Lapointe

Elle ne s’en cache pas : son test positif au ligandrol, à l’été 2019, dont elle a par la suite été exonérée par le Tribunal arbitral du sport, est « l’une des grandes raisons » qui la convainquent de la justesse de sa décision. La saga très publique qui a suivi a été un véritable calvaire pour l’athlète, ses parents et ses proches.

Jusque-là, elle caressait l’idée de se rendre à Paris en 2024. « Les deux années avant les Jeux, ça m’a beaucoup, beaucoup mise à mal émotionnellement et mentalement. J’ai eu besoin d’énormément d’aide des gens autour de moi. Ils ont été formidables, mais là, je suis fatiguée de ce qui est arrivé et je suis prête à passer à autre chose. »

Une pionnière

À ce jour, Vincent Lapointe conserve des séquelles de ce traumatisme. Par exemple, elle ne s’est jamais autorisée à rencontrer un nouveau partenaire. Son ancien conjoint l’avait contaminée à son insu, avait-elle réussi à démontrer au Tribunal arbitral du sport, notamment grâce à une expertise scientifique sur ses cheveux.

« Je ne m’étais pas permis la moindre rencontre. Cette paranoïa n’est pas saine. [La retraite sportive] va me permettre d’arrêter de toujours regarder derrière mon épaule, de toujours avoir peur qu’il m’arrive quelque chose, que ce soit physique, mental ou que ce soit une autre contamination. J’y ai longuement réfléchi et ça va faire du bien de ne plus avoir ce stress-là qui est constant. »

Malgré cet épisode douloureux, elle n’hésiterait pas à recommencer.

Je n’ai pas de regrets et je suis heureuse de ce que j’ai accompli. Mais je suis rendue à autre chose maintenant.

Laurence Vincent Lapointe

L’athlète de Trois-Rivières a été une pionnière dans une discipline qui a longtemps été l’apanage des hommes. Avant ses deux podiums olympiques, unique représentante du Québec à y être parvenue à Tokyo, elle a conquis pas moins de 12 titres mondiaux, en plus d’une médaille d’or aux Jeux panaméricains de 2015.

« Je ressens un peu de peine de quitter un monde qui m’a procuré de belles choses. J’ai aussi un petit pincement au cœur de savoir que je n’aurai plus la chance de vivre toutes ces aventures avec mes coéquipières et coéquipiers et toute mon équipe. Et je n’embarquerai plus sur l’eau pour ressentir ce dont je suis capable de faire. »

Comme dans son processus d’appel, Canoë Kayak Canada l’a soutenue durant sa réflexion sur son avenir. La fédération l’a même invitée à tenter une qualification individuelle pour cette saison, lui garantissant une place dans les bateaux collectifs. Après réflexion, elle jugeait injuste de se présenter dans une forme sous-optimale et de potentiellement prendre le poste de coéquipières mieux entraînées.

Vincent Lapointe a soumis son nom pour être bénévole aux Mondiaux d’Halifax. À plus long terme, elle caresse le « rêve » d’accompagner une équipe olympique en tant que physiothérapeute.

« J’ai eu tellement de soutien pour mes Jeux olympiques que j’aimerais pouvoir offrir ce soutien-là à d’autres athlètes un jour. » Elle en aurait des choses à raconter.