(Zhangjiakou) Former des athlètes d’élite coûte cher, c’est entendu. Mais les coûts sont-ils plus élevés au Canada ? Absolument, assurent les dirigeants du sport canadien.

« Ce qu’il vaut la peine de souligner en termes de financement du sport amateur d’élite, afin de juger s’il est suffisant ou pas, c’est de regarder où vont les dépenses. La réalité au Canada, c’est qu’on est un très grand pays avec pas tant de monde que ça dedans », illustre Stéphane Barrette, chef de la direction de Nordiq Canada.

« Si tu veux te développer, quand tu es un athlète de pointe, tu ne peux pas rester dans ta cour. Pour participer à des compétitions de niveau national, tu peux devoir faire de quatre à cinq heures d’avion. En Europe, tu peux aller faire des Coupes du monde (de niveau international) à trois heures de route de chez vous. Ça met une pression énorme sur le sport d’élite au Canada. »

« Nous n’avons pas une si grande population et elle est située sur l’un des plus grands territoires au monde, renchérit Éric Myles, chef du sport au Comité olympique canadien. Ce ratio a une grande incidence sur l’entraînement, la préparation et la capacité de participer à des compétitions de niveau suffisant. Nos athlètes se retrouvent donc souvent à l’extérieur.

« Je collabore souvent avec les Pays-Bas, un pays qu’on cite en raison de ses succès. De leur côté, s’ils décident de tenir une réunion avec l’ensemble des athlètes, l’ensemble des fédérations, les plus loin sont à une heure et demie de distance. Si on fait une telle réunion au Canada, on est parti pour une semaine avec des gens de Vancouver à Terre-Neuve. Ça change la donne sur plein de facteurs : l’entraînement, les compétitions. Ça entraîne des discussions sur la centralisation. La beauté de notre pays, c’est notre territoire, mais ça apporte son lot de défis en sport d’élite. »

Difficile également de se concentrer sur le territoire nord-américain : pour la plupart des sports amateurs d’hiver, c’est en Europe que ça se passe.

« On est quand même isolé. […] On dépense énormément d’argent juste pour compétitionner au niveau national, ensuite, on en dépense énormément pour compétitionner en Europe, poursuit Barrette. On n’a pas suffisamment de profondeur au niveau régional au Canada. Si je prends le ski de fond, en Norvège, tu as une compétition nationale qui est presque du niveau des Olympiques. Ça fait une différence gigantesque. »

Malgré cela, le Canada réussit à talonner les superpuissances européennes. Comme quand le sprint par équipe canadien, avec deux fondeurs de 23 ans seulement, termine cinquième à moins de 23 secondes de la Norvège, de la Finlande, de la Russie et de la Suède. Ou encore que le relais masculin en biathlon réussit la meilleure performance de l’histoire du pays avec une sixième place, derrière la Norvège, la France, la Russie, l’Allemagne et la Suède.

« On s’en sort bien avec les capacités qu’on a, les réalités de notre pays et les choix que nous faisons, ajoute Myles. Parfois, on se compare à des pays qui investissent davantage dans les sports d’hiver que les sports d’été. Nous, on investit équitablement sur les deux fronts. C’est un choix conscient. On pourrait décider de ne cibler que les sports d’hiver et “ d’aller gagner les Jeux d’hiver ”. Ce n’est pas le Canada ça. Quand tu regardes les résultats de médailles ou de performances entre les pays qui visent les deux saisons, on n’est pas loin des cinq meilleurs au monde. On n’est pas encore là, mais on est très près. Tu commences à te battre contre de grandes nations, comme l’Allemagne ou les États-Unis. Dans les circonstances, je trouve qu’on tire bien notre épingle du jeu.

« Tu vas dans chacun de ces pays et il n’y a pas de système parfait. Il y a un bon travail qui se fait au Canada, avec des dirigeants fiers et sérieux. Je suis extrêmement fier du progrès de la collaboration, particulièrement depuis 2016, entre nous, À nous le podium, Sport Canada et les provinces. Il en reste énormément à faire, mais ce n’est pas quelque chose qui stagne ou qui recule. »