Chaque semaine, les journalistes des Sports de La Presse répondent à une question dans le plaisir, et un peu aussi dans l’insolence.

Richard Labbé

À sa dernière saison dans le hockey junior, en 1974-1975 avec Sorel, le sympathique Gilles Bad News Bilodeau a réussi l’exploit d’amasser 377 minutes de pénalité, et vraiment, ce chiffre dit tout ce qu’il y a à dire du joueur, qui n’était pas un patineur de finesse. L’année d’après, chez les célèbres Jaros de la Beauce, il a amassé... 451 minutes de pénalité. Alors, vous comprendrez une chose : quand Gilles Bilodeau décidait de jeter les gants, c’était d’ordinaire une très mauvaise nouvelle pour son adversaire, et ceci explique cela. Dans toute l’histoire du sport, il n’y a probablement jamais eu un joueur avec un surnom aussi criant de vérité que celui-là. Ce surnom nous ramène aussi à une époque, beaucoup plus belle, où les joueurs avaient des surnoms qui voulaient dire quelque chose. C’était le bon temps.

Mathias Brunet

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Nathan Beaulieu (28), dans l’uniforme du Canadien, le 11 février 2017

Nate Beaulieu ne manquait pas de confiance ni d’arrogance à son arrivée dans l’organisation du Canadien. Choix de premier tour en 2011, 17e au total, ce défenseur dominait offensivement dans les rangs juniors avec les Sea Dogs de Saint John. Un de ses copains à l’essai avec les Bulldogs d’Hamilton l’a initié aux réseaux sociaux en début de carrière professionnelle et lui a suggéré le sobriquet Nate The Great comme nom d’utilisateur. Celui que certains voyaient comme le successeur d’Andrei Markov à Montréal faisait même inscrire ce surnom sur le manche de son bâton à Hamilton. Jusqu’à ce que le capitaine de l’époque chez le Canadien, Brian Gionta, lui suggère sagement d’effacer ce surnom... pour l’éternité. Nate The Great a été échangé aux Sabres de Buffalo pour un choix de troisième tour en 2017. Puis pour un choix de sixième tour aux Jets de Winnipeg en 2019. À 28 ans, en 395 matchs en carrière dans la LNH, Beaulieu, un défenseur offensif, totalise 90 points, dans un rôle de soutien à Winnipeg. Il y a eu un autre « Great » dans le hockey. Wayne Gretzky, The Great One : 1487 matchs dans la Ligue nationale, 2857 points. Échangé la première fois d’Edmonton pour Martin Gélinas, Jimmy Carson, trois choix de premier tour et 15 millions...

Simon Drouin

PHOTO ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Le cycliste belge Eddy Merckx portant le maillot jaune pendant la 15e étape du Tour de France le 11 juillet 1970, à Montpellier

Le Cannibale. Non, ce n’est pas le surnom d’un lutteur à Guillaume. Il appartient au seul et unique Eddy Merckx. Le cycliste belge n’était pas littéralement un cannibale, contrairement à Iron Mike Tyson. Il ne léchait pas ses proies avant de les croquer, à la Brad Marchand, la Little Ball of Hate ou le Nose Face Killah, c’est selon. Même pas besoin de flairer le sang pour attaquer, comme le Requin de Messine, Vincenzo Nibali. Son appétit insatiable n’était satisfait que par une seule chose : la victoire. Sur un peu plus d’une décennie, il en compte 625 au total, un sommet qui ne sera jamais égalé. Il bouffait de tout : des grands tours (11, dont 5 Tours de France), des monuments (19), des titres mondiaux (3, dont un sur le mont Royal en 1974) et un record de l’heure qui tiendra pendant près de 30 ans. Un demi-siècle plus tard, Eddy Merckx incarne encore son surnom, c’est le cas de le dire.

Frédérick Duchesneau

PHOTO ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

William The Refrigerator Perry, dans la défense des Bears de Chicago, durant la saison 1985

Des électroménagers en guise de surnom. J’adore. Les amateurs de football connaissent le légendaire William The Refrigerator Perry. Les plaqueurs défensifs de 6 pi 2 po et 335 lb n’étaient pas légion au milieu des années 1980. Le joueur étoile des Bears de Chicago aurait hérité de ce sobriquet à sa première année à l’Université Clemson, alors qu’un coéquipier aurait peiné à s’immiscer dans un ascenseur avec Perry et leur lessive respective. Mais mon préféré est moins connu, hors des cercles de la NBA, du moins : Vinnie The Microwave Johnson. Le micro-ondes parce que le meneur de jeu des Pistons de Detroit était reconnu pour sa capacité à être hot rapidement, à inscrire beaucoup de points en peu de temps lorsqu’il était appelé à entrer dans le match. C’est Danny Ainge, des Celtics de Boston, qui lui a attribué ce surnom. Les Pistons ont retiré le maillot numéro 15 de Johnson en 2006. Un honneur sans doute rarissime pour un joueur suppléant, essentiellement.

François Fournier

  • Luis The Violent Bob Ross Peña célébrant sa victoire contre Richie Smullen le 6 juillet 2018, à Las Vegas

    PHOTO STEPHEN R. SYLVANIE, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

    Luis The Violent Bob Ross Peña célébrant sa victoire contre Richie Smullen le 6 juillet 2018, à Las Vegas

  • Bob Ross, animateur de l’émission The Joy of Painting

    PHOTO ARCHIVES PBS

    Bob Ross, animateur de l’émission The Joy of Painting

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Les bons surnoms d’athlètes ne manquent pas, mais il est très difficile de battre celui du combattant d’arts martiaux mixtes Luis The Violent Bob Ross Peña, surnommé ainsi en raison de sa ressemblance frappante avec Bob Ross, le défunt peintre américain et animateur de l’émission The Joy of Painting diffusée pendant plus d’une décennie sur les ondes de PBS. Ceux qui ont connu cette émission se souviendront de la personnalité extrêmement calme, zen et sympathique de son populaire animateur, qui ne peut être à plus d’années-lumière de celle d’un type qui gagne sa vie en distribuant des claques sur la gueule dans un octogone de l’UFC. Un surnom drôle, original... et impossible à oublier !

Guillaume Lefrançois

PHOTO FOURNIE PAR LES EXPOS

Dennis Oil Can Boyd a été lanceur chez les Expos en 1990.

En 1990, un lanceur du nom de Dennis Oil Can Boyd débarque chez les Expos. Avec mon anglais limité de gars de 7 ans, je ne m’étais pas tant attardé à son surnom, mais bien plus à sa magnifique « mite » bleue. Trois décennies plus tard, il est temps d’apprendre pourquoi on le surnommait ainsi. Selon la légende populaire, Boyd était un bon buveur de bière, et les jeunes de Meridian, sa ville du Mississippi, appelaient la bière « oil ». En entrevue au Bleacher Report, l’ancien lanceur droitier a toutefois corrigé le tir. Il buvait en fait du whisky fait maison « par une dame surnommée Big Mama », a-t-il raconté. Le jeune Dennis allait d’abord en chercher pour sa mère, mais à l’âge de 7 ans, il a lui-même commencé à en boire. Un bon jour, il a été pris en flagrant délit en train de boire la boisson de Big Mama dans une canisse d’huile. « Mon ami Pap a commencé à m’appeler ainsi, j’ai écrit le nom dans ma casquette et mes coéquipiers à l’école m’ont aussi appelé comme ça. C’est resté. »

Simon-Olivier Lorange

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Brendan Gallagher (à droite) félicite Tomas Tatar pour le quatrième but de la soirée durant un match du Canadien de Montréal contre les Oilers d’Edmonton, le 30 mars dernier.

Je livre ici un rare hommage à la simplicité. Dans la formation actuelle du Canadien, comment ne pas aimer le très naturel « Phil », pour Phillip Danault ? Banal, dites-vous ? Je préfère 100 fois ce diminutif aux ennuyants Gally, Suzie, Andy, Eddy, Petey, Webby, Lehky, Pauly, Toffer, Pricer et KK. On croirait la liste de frères fictifs de Matt Damon dans Good Will Hunting ! Au moins, Tuna (Tatar) apportait un peu de couleur, mais tout indique qu’on a migré vers Tats cette saison. Laissez-moi bâiller à mon aise. Une recherche rapide sur l’internet nous apprend par contre qu’Alexander Romanov aurait, à un moment ou un autre, été surnommé Assassin. Je ne sais pas si je veux savoir pourquoi ni si je veux voir ce sobriquet renaître. Mais je suis certainement intrigué.

Alexandre Pratt

PHOTO PAUL BARKER, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Ole Gunnar Solskjaer, du Manchester United, s’apprête à tirer le 23 février 2002.

Je vous parle d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître. Les surnoms, dans ce temps-là, ne finissaient pas tous en -y ou -er. Comme Webby, Gally, Lehky ou Pricer. Oh que non. Les surnoms avaient du panache. Un exemple ? Au milieu des années 1990, l’attaquant norvégien Ole Gunnar Solskjaer s’est amené au Manchester United avec une petite face de bout de chou. Il avait 23 ans, mais en paraissait 13. Or, dans la surface adverse, Solskjaer avait l’instinct d’un tueur, ce qui lui a valu le joli surnom de Baby-Faced Assassin. Avouez que ce serait un bon surnom pour Cole Caufield. Mieux que Coler ou Cofy, du moins.

Jean-François Tremblay

PHOTO JOHN E. SOKOLOWSKI, USA TODAY SPORTS

Bruce Cassidy, entraîneur-chef des Bruins de Boston, durant un match de série contre le Lightning de Tampa Bay, le 29 août 2020

Dans une LNH bourrée de surnoms insipides, on se rappelle avec tristesse le Concombre de Chicoutimi, le Rocket, le Roadrunner, le Démon blond, le Bleuet bionique et les autres merveilles de l’histoire. Mais un surnom actuel m’a toujours fait un petit je-ne-sais-quoi. J’ai vécu ma première rencontre avec ce surnom dans le désarroi. Dans le vestiaire des Bruins de Boston, on mentionnait à qui mieux mieux un certain Butchy. Je fais le tour de la formation, aucune idée de qui on parle. J’ai dû utiliser mon légendaire sixième sens avant d’en déduire qu’il s’agissait de l’entraîneur-chef, Bruce Cassidy. On le surnommait Butch (Cassidy), du célèbre pilleur de banques et de trains qui a sévi aux États-Unis à la fin du XIXsiècle. Puis, on a pris ce merveilleux surnom, et on l’a « LNHisé » avec Butchy. Tu en gagnes, tu en perds, il faut croire.