Lundi soir tranquille de la mi-août au camping. À la plage de celui du Domaine de Rouville, au sud du mont Saint-Hilaire, quelques familles terminent leur repas sur l’une des tables de pique-nique éparses. Et deux sauveteuses surveillent côte à côte les rares baigneurs dans le lac artificiel.
Puis débarquent une dizaine de nageurs avec autant d’embarcations. Des planches et des surf ski, ces derniers s’apparentant à des kayaks de mer.
Le Rouville Surf Club – ou Club de sauvetage Rouville – s’y entraîne deux soirs par semaine, en plus du samedi matin, à la marina de Boucherville.
Pendant que l’une sillonne le lac en longueur sur sa planche – tantôt à plat ventre, tantôt à genoux –, d’autres traversent à la nage ses 100 m de large ou courent sur la plage.
Parce que dans la pratique du sauvetage sportif, on combine tout ça, avec le surf ski. Les plus jeunes sont cependant exemptés de cette embarcation, trop difficile à manœuvrer.
« Les gens demandent souvent : “En sauvetage sportif, vous pratiquez quoi ? Sauver des gens ?” », relate Charles Girouard, athlète, administrateur et ex-entraîneur du club.
Sa réponse : pas vraiment. Ou pas nécessairement, du moins. Le sauvetage sportif est un sport en soi.
« Mais les épreuves sont un peu dérivées de ce qu’on pourrait pratiquer en sauvetage », ajoute-t-il.
Tous peuvent prendre part à des compétitions régionales ou provinciales, dit-il. Mais pour atteindre les niveaux national et mondial, il faut détenir une formation en sauvetage, un brevet à jour. Donc, les plus hauts calibres sont réservés aux sauveteurs.
« Certains le font de façon récréative, d’autres ont plus des objectifs de compétition. Cette année, on a beaucoup de débutants », indique Charles Girouard, mais environ 80 % des membres du club sont tout de même sauveteurs ou veulent le devenir.
« C’est un sport émergent, donc on n’a pas encore le nombre d’athlètes suffisant pour faire des groupes distincts. »
Il y a différentes épreuves en sauvetage sportif.
« Celle dont les gens parlent toujours, je dirais que c’est vraiment le beach flag [drapeaux sur plage]. Mais c’est ce qui représente le moins le sauvetage », explique-t-il.
Couchés sur le ventre, les concurrents doivent se lever et courir une vingtaine de mètres dans la direction opposée dans l’espoir d’agripper l’un des bâtons plantés dans le sable. Il y en a toujours un de moins que le nombre de compétiteurs. Le concept de la chaise musicale, en somme.
À l’opposé, celle dite du « sauveteur d’acier » est la plus complète : une combinaison de 400 m de nage, 700 m de planche (aussi appelée aquaplane), 750 m de surf ski et 50 m de sprint sur la plage. Les distances pouvant sans doute varier.
Et, entre les deux, une flopée d’autres épreuves.
Voyez une vidéo des championnats nationaux de 2018, tenus au QuébecHalifax comme ancrage
Si le sauvetage sportif est devenu un sport à part entière, n’empêche qu’il avait d’abord vu le jour en Australie – il y a plus d’un siècle – en raison de la nécessité de secourir des baigneurs en difficulté dans l’océan.
Et il peut toujours servir d’entraînement pour les sauveteurs, notamment aux États-Unis, où ceux-ci ont parfois de grandes étendues de bords de mer à surveiller.
« Le message de la Société de sauvetage, c’est que c’est le seul sport dont l’objectif est de sauver des vies », rapporte Charles Girouard.
Des championnats du monde de sauvetage sportif sont organisés tous les deux ans entre différentes nations parmi les quelque 110 membres de l’International Life Saving Federation.
Consultez le site de l’organisme (en anglais)Présent au bassin du camping Domaine de Rouville, lundi soir dernier, Hubert Courteau-Godmaire a déjà pris part à un championnat mondial, au Japon.
L’entraîneur Dimitri Jean avait été sélectionné en équipe nationale, bien qu’il n’ait finalement pas pu en faire partie.
Quant à Charles Girouard, il a déjà participé à une compétition mondiale (Commonwealth), en Afrique du Sud, en août 2017. En piscine toutefois, où les épreuves sont évidemment différentes de celles tenues à l’extérieur.
Découvrez les autres types de compétitionsAu Canada, il y a chaque année un championnat national en piscine et un autre en plage. Celui en milieu extérieur se tient un an sur deux à Halifax – pour son bord de mer – et l’autre au Nouveau-Brunswick, au Québec ou en Ontario.
« Le sauvetage sportif est beaucoup plus développé dans l’est du pays », souligne Charles Girouard.
Au Québec, on compte une dizaine de clubs, calcule-t-il. Certains seulement en piscine, d’autres exclusivement en plage, parfois les deux. C’est le cas du Rouville Surf Club, mais la plage est sa « saison forte ».
De divers horizons
Aucun doute, le sauvetage sportif est à la fois exigeant et complet. On connaît bien les qualités requises pour la natation et la course, que ce soit en sprint ou sur quelques kilomètres.
L’aquaplane, lorsque pratiqué à genoux, sollicite beaucoup les ischiojambiers. En surf ski, c’est la ceinture scapulaire.
Il attire donc des athlètes de divers horizons en raison de sa nature multidisciplinaire.
« Il y en a pour qui c’est leur sport de retraite. Qui ont fait de la natation, parfois du triathlon – mais c’est plus rare –, du kayak, même de la course. Hubert, à la base, c’est un sprinter. Donc, il y en a beaucoup dont c’est le deuxième sport, raconte Charles Girouard. Moi, ça a été mon premier. »
Il a joué un peu au hockey, mais a plongé jeune dans le sauvetage sportif, à 11 ans. Les embarcations sont ses composantes préférées du sport.
« Aller en faire dans l’océan et surfer les vagues, c’est vraiment une sensation que j’aime », affirme-t-il.
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