À l’école primaire, Isabelle Ducharme avait de graves difficultés de langage.

En première année, elle parlait à peine. Suivie intensivement en orthophonie, elle devait travailler deux fois plus fort que les autres pour réussir. Au secondaire, une seule chose a fait qu’elle a gardé sa motivation à l’école : le sport.

« Je passais mon temps dans le gymnase. J’étais tout le temps là. Quand je ne jouais pas, je marquais des matchs. J’arbitrais […] Le sport a fait que j’ai continué », se souvient Isabelle Ducharme, 44 ans, qui vient d’être nommée directrice générale de Sports Québec et qui entrera en fonction le 10 mai.

Depuis toujours, le sport n’occupe pas qu’une place secondaire dans la vie d’Isabelle Ducharme : il en est le moteur principal. Dès l’enfance, elle a touché à plusieurs disciplines, dont la gymnastique, la natation et le karaté. Avant de se consacrer principalement à ses sports de prédilection : le volleyball et la balle-molle.

Quand j’étais jeune, je faisais tous les sports, mais je n’ai jamais été une grande athlète […] J’étais la plus impliquée. J’étais le boute-en-train. Souvent la capitaine. Celle qui rassemblait tout le monde.

Isabelle Ducharme

Isabelle Ducharme estime que son désir de s’impliquer lui a été transmis par ses parents. Sa mère a longtemps été présidente de l’Association de balle-molle de Boisbriand, où elle a grandi.

« Mon père travaillait des heures de fou. Le soir, il changeait ses cravates, il mettait des pantalons de jogging pour venir nous coacher à la balle », dit-elle.

Ses parents organisaient des tournois de balle-molle, et la jeune Isabelle participait en vendant des hot-dogs dans une cabane. Les graines du bénévolat étaient semées.

« Tu ne rentres pas dans le milieu du sport parce que tu as juste travaillé ou étudié là-dedans. C’est parce que tu es passionné et impliqué », dit-elle.

Travail et bénévolat sportifs

En 1992, alors qu’elle a seulement 18 ans, Isabelle Ducharme devient présidente du plus important tournoi de balle-molle régional à Boisbriand, qui regroupe 45 équipes.

Après des études au cégep en sciences pures, elle fait un baccalauréat en récréologie. Elle obtiendra ensuite au fil des années un diplôme d’études supérieures en gestion à HEC Montréal et un MBA à l’UQAM.

De longues études qui lui ont demandé beaucoup d’efforts. « Les gens ne savent pas le nombre d’heures que j’ai pu mettre […] Peu importe tes résultats scolaires, si tu persévères, si tu travailles fort et que tu t’impliques, tu peux réussir dans la vie. »

Parallèlement à ses études, Isabelle Ducharme travaille. Elle est coordonnatrice aux sports pour la municipalité de Boisbriand. Elle devient directrice du Service de loisirs à la Ville de Lorraine, où elle est responsable tant des terrains sportifs que de la bibliothèque et du centre culturel.

Des fêtes de la Saint-Jean, j’en ai organisé pendant 10 ans. J’ai adoré. Mais ce qui me faisait tripper, c’était de développer le sport.

Isabelle Ducharme

De 1998 à 2009, elle travaille comme employée puis comme bénévole à Volleyball Québec à faire progresser le volleyball de plage dans la province.

En 2008, elle prend une pause professionnelle du milieu sportif et travaille comme analyste de prix chez Bombardier. Elle poursuit toutefois son bénévolat. Notamment aux Jeux du Québec, où elle s’implique depuis 1999, aux Jeux olympiques de Vancouver, où elle travaille au village des athlètes de Whistler, ou en gérant la logistique d’un tournoi panaméricain de karaté.

Mais l’amour du sport finit par prendre le dessus. Isabelle Ducharme quitte son emploi chez Bombardier pour devenir coordonnatrice à la formation à Sports Québec, puis directrice de programmes. « L’esprit de collaboration me manquait », dit-elle.

Unir le milieu sportif

Au cours des sept dernières années, Isabelle Ducharme était directrice générale de la Fédération de natation du Québec.

Quand le même poste s’est ouvert à Sports Québec en décembre, alors que le contrat d’Alain Deschamps venait à échéance, Isabelle Ducharme n’a pu résister et a tenté sa chance. Elle revient maintenant chez Sports Québec, mais cette fois comme directrice générale.

Comme l’a souligné dernièrement Radio-Canada, quatre femmes se trouvent maintenant à la tête du sport organisé au Québec : Isabelle Ducharme, Julie Gosselin, présidente de Sports Québec, Isabelle Charest, ministre responsable des Sports et des Loisirs, et sa sous-ministre adjointe, Dominique Breton.

« Ce qui me fait capoter, c’est d’arriver sur un terrain et de voir un jeune qui fait du sport et qui sourit […] Un athlète peut aussi être déçu d’avoir perdu. Mais il a vécu quelque chose. Tu vis pour faire vivre des expériences à des gens. Que ce soit des jeunes ou des plus vieux. Tu travailles pour des humains », dit Isabelle Ducharme.

Elle affirme travailler autant pour le plaisir de voir cheminer des athlètes jusqu’aux Jeux olympiques que pour voir un enfant incapable de frapper une balle de baseball en début de saison parvenir à cogner un triple à la fin de l’été. Ou pour voir une dame de 95 ans dans une compétition séniore sortir de la piscine le sourire aux lèvres. Ou des athlètes handicapés performer au boccia aux Jeux du Québec.

Sports Québec représente 67 fédérations et associations sportives dans la province. L’organisme fédérateur, qui gère les Jeux du Québec, organise aussi des formations d’entraîneurs et d’officiels dans plusieurs sports, notamment.

En prenant la tête de Sports Québec, Isabelle Ducharme veut « unir le milieu sportif ». Elle veut aussi promouvoir le sport organisé.

« J’ai l’impression que les gens ont un peu peur parfois du sport organisé […] Ils ont peur du mot "compétition". Mais le sport de compétition, ça t’amène à te dépasser. Il ne faut pas avoir peur de continuer de faire du sport organisé », note-t-elle.

Isabelle Ducharme reconnaît que la pandémie a donné « un dur coup » aux sports organisés avec toutes les restrictions et interdictions qu’elle a entraînées : « Mais elle a aussi démontré leur importance. Ça les a remis en valeur. »

Elle compte profiter de son arrivée à Sports Québec pour continuer de militer pour un milieu qui la passionne depuis toujours.