Chaque semaine, les journalistes des Sports de La Presse répondent à une question dans le plaisir, et un peu aussi dans l’insolence.

Mathias Brunet

Les joueurs de la LNH détestent les coups à la tête. Ils connaissent désormais les conséquences néfastes des commotions cérébrales. Frapper un adversaire à la tête est vraiment mal vu par les confrères. Que se produit-il quand c’est le cas, même si l’agresseur écope d’une suspension par les autorités de la Ligue nationale de hockey ? On invite le fautif à jeter les gants lors du prochain match entre les deux clubs… pour mieux se frapper à la tête. Logique, non ? Paul Byron en a subi les conséquences en mars 2019, après avoir frappé MacKenzie Weegar à la tête deux mois plus tôt. Le petit attaquant du Canadien avait pourtant été suspendu trois matchs, mais qu’importe, Weegar l’a invité au combat lors du match suivant et Byron a respecté le code d’honneur du hockey. Le frêle Byron s’est fait passer le K.-O. par Weegar, 6 pi et 200 lb, gaucher par surcroît, et il a mis longtemps à s’en remettre. On commence enfin à retrouver le bon vieux Byron… deux ans plus tard. Aussi bien respecter le « code ». Steve Moore ne s’y est pas soumis en 2004, après une mise en échec vicieuse à l’endroit du capitaine des Canucks, Markus Naslund. Moore, l’aîné de Dominic, ancien attaquant du CH, a refusé de se battre avec Todd Bertuzzi, coéquipier de Naslund. Celui-ci l’a assailli et lui a fracturé des vertèbres et fait subir une sévère commotion cérébrale. Il n’a plus jamais joué au hockey par la suite. On ne lésine pas avec les coups à la tête…

Richard Labbé

PHOTO THOMAS SHEA, USA TODAY SPORTS

Jason Day fait son coup de départ au 10e trou du deuxième tour du Houston Open au Memorial Park, le 6 novembre 2020.

Je sais bien que le golf n’est pas vraiment un sport, mais pour les besoins de l’exercice, je vais prétendre que ça l’est. Alors voici : la règle non écrite la plus idiote se trouve dans l’univers du golf, où la foule doit se taire pendant qu’un golfeur frappe un coup. Pardon ? De comment ? Ces précieux messieurs et dames sont incapables de performer quand quelqu’un se met à tousser un peu plus loin ? C’est d’un ridicule consommé. « Oui, mais au golf, ça prend de la concentration », dira-t-on. Parfait. Alors j’imagine qu’au football, le quart-arrière qui a environ une seconde pour placer un ballon dans les mains d’un receveur pendant que cinq ou six gars de 300 lb lui foncent dessus n’a pas besoin de concentration ? Au hockey, devrait-on tous se taire quand un gardien tente d’arrêter un point noir qui part de la ligne bleue à 100 miles à l’heure ? Au basket, le joueur qui tente un lancer franc pendant que, derrière le panier, des gars en bédaine hurlent des vulgarités à faire rougir un charretier n’aurait pas droit au silence, lui ? Ça nous ramène à « l’étiquette » du golf, qui veut que ce soit comme ça parce que ç’a toujours été comme ça. C’est dur à comprendre… probablement parce qu’il n’y a rien à comprendre.

Guillaume Lefrançois

PHOTO ANDRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le Canadien déroulait un tapis sur le logo de l’équipe dans son vestiaire avant l’arrivée des journalistes.

Autrefois, à une époque où on avait un malin plaisir à se respirer les uns sur les autres, les vestiaires des équipes sportives étaient ouverts aux journalistes. Dans la plupart de ces vestiaires, il y avait au plancher, en plein milieu de la pièce, un logo format géant de l’équipe. Si un journaliste avait le malheur d’être distrait et de marcher sur ledit logo, les joueurs levaient aussitôt le ton. Comprenons-nous, le respect du logo est important, et des gestes de tata comme celui de Terrell Owens à Dallas, dont le seul but est de provoquer, n’ont pas leur place. Mais quand c’est fait de façon involontaire… Dans tous les cas, saluons les équipes qui ont trouvé des solutions à ce problème : le Canadien, qui déroulait un tapis sur le logo avant l’arrivée des journalistes, et les Sabres, qui ont plutôt accroché leur logo au plafond !

Simon-Olivier Lorange

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Shea Weber, des Canadiens, repousse Jesse Puljujarvi, des Oilers d’Edmonton, avec un double échec.

Ma règle non écrite favorite constitue en réalité la non-application d’une règle écrite du hockey : le double échec. Pour ceux qui en auraient oublié la définition, il s’agit de ce moment où un joueur en frappe un autre à deux mains avec son bâton. Ce geste, selon sa violence, peut entraîner une pénalité mineure ou majeure, d’une expulsion du match et même d’une suspension ou d’une amende, selon la règle 59 du livre de règlements de la LNH. Curieusement, le même ouvrage ne prévoit pas de clause spéciale permettant des doubles échecs gratuits pour dégager la vue du gardien, droit dont se prévalent pourtant les défenseurs de la ligue sans aucune forme de retenue. Chanceux, les partisans du Canadien peuvent voir à l’œuvre Shea Weber, l’un des maîtres de la technique. On vante constamment son gabarit et sa robustesse, mais son principal outil de travail autour du filet demeure son bâton, qu’il manie comme pas un lorsque vient le temps de chatouiller le dos de ses adversaires. Il ne faudrait pas non plus négliger ses dauphins, Ben Chiarot et Joel Edmundson, qui profitent de la carte VIP du capitaine les soirs où l’arbitre a le cœur léger. Le hockey dans ce qu’il a de meilleur !

Alexandre Pratt

PHOTO TONY GUTIERREZ, ASSOCIATED PRESS

Fernando Tatis, des Padres de San Diego, regarde son grand chelem réalisé contre les Rangers du Texas, le 17 août 2020.

Les joueurs de baseball sont très capricieux. Pas le droit de voler un but si l’avance est trop grande. Pas le droit de déposer l’amorti pendant un match sans point ni coup sûr. C’est un releveur au bâton ? Lancez-lui mollo. Mais le pire, ce sont les remontrances subies par Fernando Tatis, la saison dernière. Son crime ? S’être élancé avec un compte de trois balles, aucune prise, alors que son équipe menait 10-3. Un coup bon pour un grand chelem. Ce n’était quand même pas de sa faute si le lanceur était incapable de la mettre au-dessus du marbre ! (Le lanceur a ensuite été suspendu pour avoir atteint intentionnellement le frappeur suivant. Capricieux, disais-je…)

Jean-François Tremblay

PHOTO CHRIS YOUNG, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

José Bautista, des Blue Jays de Toronto, a « flippé » son bâton théâtralement après un gros coup de circuit en série de division contre les Rangers du Texas, le 14 octobre 2015.

J’aime le sport, j’aime le sport spectaculaire, j’aime le sport émotif. Cette émotivité peut parfois faire commettre des gestes nés uniquement de la passion du moment. Et c’est exactement ce que l’on veut vivre et revivre comme amateur de sport. Comme la fois où José Bautista, alors avec les Blue Jays de Toronto, a « flippé » son bâton théâtralement après un gros coup de circuit en série de division contre les Rangers du Texas en 2015. Plusieurs membres des Rangers ont fait connaître leur mécontentement, pas tant sur l’idée de célébrer, mais « sur la manière », qui transgressait apparemment une quelconque règle non écrite de bienséance. Ridicule. Le sport a besoin de ces démonstrations de joie, aussi explosives et spontanées soient-elles, quand le moment s’y prête bien sûr. Est-ce que Team USA au soccer féminin avait besoin de célébrer avec exubérance durant le massacre en règle de la pauvre équipe thaïlandaise ? Pas sûr.