Chaque semaine, les journalistes des Sports de La Presse répondent à une question dans le plaisir, et un peu aussi dans l’insolence

Miguel Bujold

Des équipes qui laissent la majorité des gens indifférents, il y en a dans toutes les ligues. Mais pour les fins de l’exercice, je vais rester dans ma cour. Dans la NFL, y a-t-il une autre réponse possible que les Jaguars de Jacksonville ? Une équipe qui est tellement excitante qu’elle doit jouer la moitié de ses matchs sur un autre continent. C’était pourtant bien parti dans les années 1990. Dans leurs cinq premières années, de 1995 à 1999, les Jaguars ont eu une fiche de 49-31 et ont participé à deux finales de conférence. Dans les 21 saisons qui ont suivi, les Jags n’ont eu que quatre saisons gagnantes. Leur pire a été celle de l’an dernier alors qu’ils ont gagné une fois. Mais c’est plus que la défaite. Les Jaguars ont rarement eu du « star power ». Ils avaient la meilleure défense de la ligue il y a trois ou quatre ans, mais Blake Bortles était le quart. Mauvais timing. Il y a une lueur d’espoir, par contre. Grâce à l’arrivée de l’entraîneur Urban Meyer et à la probable sélection de Trevor Lawrence au sommet du repêchage, les Jaguars devraient être un peu plus intéressants après un quart de siècle sans saveur.

Guillaume Lefrançois

PHOTO REINHOLD MATAY, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Notre journaliste se demande si vous connaissez un seul partisan des Jaguars de Jacksonville.

Est-ce que les golfeurs de la PGA forment une équipe ? Parce que si c’est le cas, ils ont mon vote ! Sinon, un jockey et son cheval, ça compte ? En fait, je ne pourrais même pas voter pour ça, car le sort des 493 chevaux de course morts aux États-Unis en 2018 (source : National Geographic) ne me laisse pas indifférent. Dans ce cas, je vais y aller avec une équipe dont les passeurs les plus prolifiques s’appellent Mark Brunell et Blake Bortles : les Jaguars de Jacksonville. Par applaudissements, connaissez-vous un partisan des Jaguars ? Mieux encore, connaissez-vous quelqu’un qui a déjà mis les pieds à Jacksonville, une ville dont les trois principaux attraits touristiques sont un zoo, un ranch et le musée Cummer ? Si un ami m’invite à aller à Jacksonville, je vais passer mon tour.

Mathias Brunet

PHOTO KARL B DEBLAKER, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Warren Foegele (13), des Hurricanes de la Caroline, célèbre son but marqué contre les Panthers de la Floride, le 7 mars dernier.

Restons dans le domaine que je couvre, la Ligue nationale de hockey. Les organisations de premier plan comme les Penguins de Pittsburgh, les Red Wings de Detroit (pendant la belle époque), l’Avalanche du Colorado, le Lightning de Tampa Bay et les Blackhawks de Chicago ont gagné mon admiration par leur façon de construire leurs équipes par l’entremise du repêchage. Les équipes trop longtemps dirigées par des incompétents, les Sabres de Buffalo, les Panthers de la Floride, les Devils du New Jersey et les Coyotes de l’Arizona, ont toujours soulevé mon ire. Puis il y a ces équipes plus… fades. Les Whalers de Hartford ont déménagé dans un marché complètement étranger au hockey, la Caroline du Nord, en 1997. Le logo des Hurricanes est ordinaire. Ils ont un bon début de saison cette année, mais pendant une quinzaine d’années, entre leur Coupe de 2006 et aujourd’hui, ils ont vivoté. Ni trop bons ni trop mauvais. La Caroline est un endroit où il fait bon vivre, mais la ville, Raleigh, et la précédente, Greensboro, le premier domicile de l’équipe, n’ont rien de trépidant. On en profitait pour jouer aux cartes lorsqu’on accompagnait l’équipe là-bas, dans les années où je couvrais le Canadien à temps plein. C’était l’époque où on pouvait jouer aux cartes avec les coachs et même le proprio du club ! Mais bon, ça n’enlèverait rien à la fadeur des Hurricanes…

Frédérick Duchesneau

PHOTO JAMES GUILLORY, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Brett Pesce (22), défenseur des Hurricanes de la Caroline, se sauve avec la rondelle durant un match contre les Panthers de la Floride, le 7 mars dernier.

Les Hurricanes de la Caroline. Et leurs sympathiques célébrations d’après-match ? me demanderez-vous. Je n’ai pas fait partie de ceux qui ont été conquis, mais OK, c’était osé. Même pas proche, cela dit, de compenser tout le reste. Quel reste ? Le logo imaginé par un enfant de 2e année. Le fait que la pandémie y a à peine eu un impact sur la densité de la foule. Je l’admets, je leur en veux aussi. D’avoir remplacé les Whalers de Hartford, leur magnifique uniforme et leur Brass Bonanza. Crève-cœur. Et d’avoir éliminé mon Cristobal Huet, en 2006. Impardonnable. Plutôt un mélange d’indifférence et de haine, alors. Deux émotions qui ne peuvent vraiment cohabiter, je vous l’accorde, mais ça dépend du moment, disons. Mention honorable aux Jaguars de Jacksonville aussi. Comment réussir à susciter si peu d’émotions dans un si grand circuit ? Faut le faire ! Et aux Rays de Tampa Bay. Absolument aucun mouvement à l’aiguille de l’excitomètre.

Richard Labbé

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Les Sénateurs d’Ottawa sont une équipe trop souvent anonyme qui n’a jamais pu déchaîner les passions, selon notre journaliste.

En premier, je me suis dit que j’allais m’en tenir à un club provenant d’une ligue majeure, et ce simple critère vient exclure plusieurs équipes qui auraient pu se retrouver sur ma liste, comme le Crew de Columbus. En deuxième, il faut que cette équipe fasse partie du paysage sportif depuis au moins 20 ans, question de réaliser pleinement qu’on ne se rend pas compte qu’elle existe. Alors mon choix est fait : les Sénateurs d’Ottawa. Ces Sénateurs-là existent depuis 1992, et j’ai beau chercher, je compte à peine sur les doigts d’une main les fois où je me suis dit, wow, j’ai hâte au match des Sénateurs ce soir. Qui, à part un pur et dur de la région de Kanata, a déjà annulé un BBQ ou donné ses billets pour un spectacle de KISS pour être bien sûr de ne pas rater un match des Sénateurs ? C’est une équipe qui a rarement été d’une autre couleur que beige, une équipe trop souvent anonyme qui n’a jamais pu déchaîner les passions, à part peut-être pour quelques matchs dans les années 2000. Non mais, vraiment, quels sont les moments importants de l’histoire de cette équipe ? La fois où Brandon Prust a traité le coach de « gros morse aux yeux globuleux » ? Chris Neil qui échange des taloches avec Tie Domi ? La fois où Alex Kovalev, à peine débarqué chez les Sénateurs, a affirmé qu’il regrettait de leur avoir dit oui ? Si cette équipe devait disparaître un jour, je me demande combien de gens s’en rendraient compte.

Simon-Olivier Lorange

PHOTO MARK J. REBILAS, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

L’ailier droit Mats Zuccarello (36) célèbre avec l’ailier gauche Kirill Kaprizov (97) et le défenseur Jared Spurgeon (46) son but marqué contre les Coyotes de l’Arizona, le 5 mars dernier.

Admettons que vous êtes un amateur de hockey moyen. Pas un « nerd » de statistiques avancées ou un obsédé des pools. Quelqu’un de normal, en somme. Combien de joueurs actuels du Wild du Minnesota êtes-vous en mesure de nommer ? Très bien, et combien de joueurs dans l’histoire du club ? Voilà. Le Wild est, à mes yeux, la franchise la moins intéressante de la LNH, et ce, pour une raison que je ne saurais trop expliquer. En 2003, la jeune équipe au chandail vert est devenue la vedette du jour en atteignant la finale de l’Association de l’Ouest. Cliff Ronning, Andrew Brunette, Sergei Zholtok : amenez-en, des vedettes ! (D’accord, il y avait aussi Marian Gaborik.) Mais depuis ce temps, que s’est-il passé de vraiment intéressant de ce côté, hormis les burlesques contrats consentis à Ryan Suter et Zach Parise en 2012 ? Que le Wild soit enfin bon cette saison, ou qu’il soit moyen comme il en a fait son habitude au cours des années, ça ne nous fait ni chaud ni froid. Un peu comme le Minnesota en général, quand on y pense.

Alexandre Pratt

PHOTO ISAIAH J. DOWNING, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Bradley Beal (3), des Wizards de Washington, a maille à partir avec Facundo Campazzo (7) et Nikola Jokic (15), des Nuggets de Denver, le 25 février dernier.

Les Nuggets de Denver. Les Wizards de Washington. Les Kings de Sacramento. Rien à voir avec la qualité de leurs joueurs. Nikola Jokić (Nuggets) et Bradley Beal (Wizards) sont parmi les meilleurs de la NBA. C’est juste que dans la NBA, les grosses dynasties occupent toute la place. Elles éclipsent tous les autres clubs. Les Nuggets, les Wizards et les Kings ont raté leur première impression et, des décennies de misère plus tard, ils continuent de me laisser indifférent.