À quelques heures de l’arrivée, la neuvième course Vendée Globe est déjà assurée de passer à l’histoire. Jamais cette épreuve hors norme n’a-t-elle été aussi disputée, et après 78 jours en mer, pas moins de huit concurrents peuvent encore espérer une place sur le podium.

Dimanche en fin de journée, Louis Burton (Bureau Vallée 2) était le plus près de la ligne d’arrivée, mais Charlie Dalin (Apivia), deuxième à tout juste un mille, Boris Hermann (SeaExlorer), troisième à 57 milles, et Yannick Bestaven (Maître CoQ IV), cinquième à 243 milles, étaient tous en position de viser la victoire.

À l’approche des Sables-d’Olonne, sur la côte de l’Atlantique, en Vendée, les meneurs ont opté pour des routes légèrement différentes. Burton est au centre du groupe, mais il a connu des ennuis techniques au cours des dernières heures et doit gérer la pression d’avoir tous ses concurrents à ses trousses.

Dalin, le plus à l’est, reste le favori de plusieurs pour au moins être le premier à franchir la ligne d’arrivée. Privé de son foil bâbord depuis plusieurs semaines, il s’est positionné pour naviguer en s’appuyant sur son foil tribord et pourrait rallier l’arrivée dans de bonnes conditions météo tout en tirant le maximum de son voilier.

Hermann dispose quant à lui d’un voilier relativement intact, et il pourra bénéficier d’un crédit de six heures à l’arrivée, en compensation pour sa participation au sauvetage de Kevin Escoffier à la mi-décembre. Il pourrait donc théoriquement être déclaré vainqueur même s’il est devancé à l’arrivée.

Bestaven, qui avait été le premier à franchir le cap Horn au début de l’année, aura lui aussi droit à une bonification – 10 heures et 15 minutes dans son cas. Même s’il est présentement plus éloigné de l’arrivée que le trio de tête, sa position plus à l’ouest pourrait lui permettre de profiter de meilleures conditions météo et d’être plus rapide dans les dernières heures de la course.

Dans un échange avec son équipe, Bestaven a indiqué : « Mes routages me font dire qu’on va tous arriver en même temps, donc autant tenter une option en allant Nord plutôt que de suivre le troupeau. Ça met un peu de piment… »

PHOTO SÉBASTIEN SALOM-GOMIS, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Le navigateur français Yannick Bestaven

Le pari pourrait s’avérer payant. « S’il trouve de belles conditions, on ne pourra rien faire, c’est sûr, surtout avec son bonus de 10 heures », a d’ailleurs convenu Herrmann, en entrevue sur le site de la course.

Thomas Ruyant (LinkedOut), quatrième à 138 milles, doit lui aussi composer avec l’absence d’un foil, et il a décidé d’imiter Bestaven et d’opter pour une route plus au nord, plus longue, mais aussi potentiellement plus rapide.

Damien Séguin (Groupe Apicil), sixième à 306 milles, fait lui aussi route vers le nord. Révélation de la course pour sa première participation, il continue d’étonner sur son voilier classique, même s’il est privé de plusieurs voiles (abîmées dans les tempêtes du Pacifique).

« Personne n’imaginait un bateau à dérives droites à cette position, a confié le champion paralympique [il est privé de l’usage de la main gauche depuis la naissance]. »

Ça fait un mois que je n’ai plus mes voiles de portant, j’essaye de me débrouiller comme je peux !

Le Français Damien Séguin

Même Jean Le Cam (Yes We Cam), huitième à 571 milles du meneur, peut encore espérer un bon classement. Celui qui avait récupéré Kevin Escoffier dans un sauvetage héroïque recevra une bonification de 16 heures et 15 minutes.

Derrière les meneurs, Jérémie Beyou (Charal) continue sa superbe remontée. Parti avec neuf jours de retard après avoir dû rebrousser chemin pour réparer une grave avarie, celui qui était l’un des favoris de la course devrait boucler son tour du monde en un temps comparable à celui du vainqueur éventuel.

La Française Clarisse Cremer (Banque Populaire), 12e, est la mieux placée des trois femmes encore en course. L’Allemande Isabelle Joschke, qui s’était maintenue dans le groupe de tête pendant plusieurs semaines, est arrivée dimanche à Salvador de Bahia, au Brésil. Elle avait été contrainte à l’abandon il y a quelques jours après une avarie de quille.

Par ailleurs, tous les concurrents sont maintenant de retour dans l’Atlantique. Alexia Barrier (TSE-4 myplanet) et Ari Huusela (STARK), respectivement 24e et 25e, ont franchi le cap Horn la nuit dernière.

Une arrivée à huis clos

Pandémie oblige, l’arrivée du Vendée Globe se fera à huis clos. Les skippers ne pourront donc recevoir les acclamations des milliers de spectateurs qui bordent habituellement le chenal menant au port des Sables-d’Olonne.

Dans un communiqué, le président du comité organisateur, Yves Auvinet, a regretté qu’on n’ait pas autorisé « une présence filtrée, limitée et en déambulation du public qui aurait été compatible avec la situation ».

« Malgré cette contrainte qui s’impose à l’organisation, tout sera mis en œuvre pour rendre un hommage aux skippers à la hauteur de leur exploit, en favorisant notamment la dimension médiatique des arrivées. Aussi, j’invite tous les amoureux de la course à suivre en direct ces arrivées et témoigner notamment sur les réseaux les émotions que les skippers nous ont fait vivre pendant les trois mois de la course. »

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Du spectacle en Coupe de l’America

PHOTO GILLES MARTIN-RAGET, AGENCE FRANCE-PRESSE

L’équipe Luna Rossa–Prada–Pirelli en action à Auckland

Les amateurs de voile sont choyés en ce début d’année. En plus du suspense qui entoure l’arrivée du Vendée Globe, les régates de la Coupe de l’America se sont amorcées en Nouvelle-Zélande et elles sont suivies par des milliers de spectateurs dans la baie d’Auckland. Les nouveaux AC75, des monocoques à foils, atteignent des vitesses de près de 50 nœuds, et le format de la compétition, avec des courses limitées à 45 minutes, privilégie le spectacle. Pendant que les Néo-Zélandais, tenants du titre, peaufinent leur embarcation, les trois « prétendants » se disputent le droit de les affronter du 6 au 15 mars. Jusqu’ici, les Anglais (Ineos-Team UK), menés par Sir Ben Ainslie, ont remporté toutes leurs régates et ils sont déjà qualifiés pour la finale de la Coupe Prada, à compter du 12 février. Les Italiens (Luna Rossa-Prada-Pirelli) et les Américains (New York Yacht Club – American Magic) s’affronteront à compter de jeudi en demi-finale… si les seconds sont en mesure d’aller sur l’eau. Le voilier américain a en effet chaviré, le 16 janvier, alors qu’il semblait en position de remporter une première régate contre Luna Rossa. Les 11 membres d’équipage s’en sont sortis indemnes, mais American Magic a été sérieusement abîmé. Forfaits lors de la dernière ronde préliminaire, les Américains espèrent pouvoir tester leur embarcation cette semaine avant le début de la demi-finale.

Revoyez le chavirage spectaculaire d’American Magic