Chaque semaine, les journalistes des Sports de La Presse répondent à une question dans le plaisir, et un peu aussi dans l’insolence.

Alexandre Pratt

Oui. Lors du dernier match local des Expos, en 2004. C’était déjà triste. Vers la fin de la partie, le DJ a fait jouer en entier Good Riddance (Time of Your Life), une chanson mélancolique de Green Day. Pendant 2 minutes et 28 secondes, j’ai fermé les yeux. Cessé d’écrire. Et pensé aux moments heureux que j’avais passés, plus jeune, à chasser des autographes. À courir les fausses balles. À rire des balles arc-en-ciel de Pascual Pérez. À caqueter comme une poule quand le lanceur adverse retenait un coureur au premier but. À hurler « Alouuuuuuu » quand Moises se présentait au bâton. La chanson a pris fin. J’ai rouvert les yeux. Et envoyé mon dernier compte rendu d’un match des Expos.

Guillaume Lefrançois

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Rene Rancourt en mai 2014

Mai 2014, série Canadien-Bruins. Je mets les pieds au TD Garden pour la deuxième fois de ma vie. La première, c’était pour Summerslam 2006, et étrangement, mes souvenirs sont flous. Enfin. L’électricité dans l’air est palpable, comme c’est toujours le cas lors d’une série entre ces deux vieux rivaux. Et c’est là que le spectaculaire Rene Rancourt s’amène pour les hymnes nationaux. De façon générale, les hymnes nationaux sont mon petit moment où je prends le temps d’apprécier ce que je fais. Pas par amour pour l’un ou l’autre des pays, mais simplement parce que c’est un rare moment de calme, autant sur la passerelle que sur la patinoire. Ces séries 2014 étaient également particulières parce qu’en raison des compressions à Radio-Canada, le département des sports allait passer à la déchiqueteuse et je ne savais pas encore ce qui m’attendait. C’est d’ailleurs en revenant de Boston en voiture, entre deux matchs, que j’ai eu mon entrevue à La Presse ! Mais bref, avec l’incertitude ET la chance de vivre l’ambiance du TD Garden, c’était un beau moment pour me rappeler que j’étais privilégié d’être payé pour faire ce « travail ».

Mathias Brunet

IMAGE TIRÉE DES ARCHIVES DE LA PRESSE

La Presse, 16 octobre 1994, p. S4

Dans une autre vie professionnelle, c’est-à-dire à mes débuts à La Presse, en 1994, je suivais le parcours des meilleurs footballeurs québécois dans la NCAA. L’un de nos plus illustres représentants, le porteur de ballon Tshimanga Biakabutuka, un ancien de la polyvalente Jacques-Rousseau, à Longueuil, faisait un malheur avec les Wolverines de l’Université du Michigan, l’un des clubs les plus populaires au pays. J’ai couvert deux de ses matchs à Ann Arbor, un contre Virginia, l’autre face à Penn State. Il règne lors de ces rencontres une ambiance extraordinaire. Je me souviens encore de cette réflexion, à quelques instants du début de la rencontre, alors que je foule la pelouse du stade avant de remonter sur la tribune de presse, avec plus de 106 000 spectateurs qui hurlent à tue-tête, et une fanfare presque aussi bruyante, qui font presque vibrer les vêtements que je porte : je vivais le sentiment le plus fort de ma jeune carrière de journaliste. Presque 27 ans plus tard, je n’ai jamais revécu un moment aussi fort.

Miguel Bujold

PHOTO LYNNE SLADKY, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Match du Super Bowl entre les Packers de Green Bay et les Steelers de Pittsburgh, le 6 février 2011

J’avais déjà couvert des matchs, la plupart des finales de conférence, avant de prendre la relève de mon ami Labbé comme journaliste affecté à la couverture de la NFL, en 2010. Mais c’est lorsque j’ai couvert mon premier Super Bowl que j’ai vraiment pris le temps de savourer l’expérience – et je le fais chaque fois que je couvre une finale pour le trophée Lombardi. La première fois, c’était à Arlington, au Texas, dans le nouveau palais des Cowboys de Dallas. Un affrontement Steelers-Packers dans le stade des Cowboys… Trois des clubs qui font non seulement partie de la royauté de la NFL, mais qui ont marqué le sport professionnel nord-américain des 50 dernières années. Difficile d’accoter ça. J’ai épié les partisans des deux équipes dans les gradins, puis les joueurs sur le terrain, et j’ai admiré le stade de Jerry Jones. Lorsque les milliers de flashes des caméras ont suivi le botté d’envoi, j’ai eu des frissons pour la première fois de ma carrière.

Richard Labbé

PHOTO FOURNIE PAR RICHARD LABBÉ

Richard Labbé en compagnie de Michael Irvin lors d’une soirée mondaine organisée en marge du Super Bowl, à San Diego, en janvier 2003

Il y a un moment en particulier qui me vient en tête : le Super Bowl de 2003 à San Diego. En premier parce que j’avais passé la semaine précédente dans la région de San Francisco, à couvrir la finale de la Conférence américaine entre les Raiders et les Titans, une semaine fabuleuse à tous points de vue. Ensuite parce qu’un Super Bowl en Californie, ce n’est que du rêve. Je me souviens entre autres d’un moment à quelques heures du match. Je venais à peine de prendre place à l’intérieur du stade, j’ai vu qu’il faisait 31 degrés, et j’ai eu la bonne idée d’appeler la réceptionniste de La Presse (salut, Véronique !) pour savoir quel temps il faisait à Montréal, et elle m’avait répondu -31oC… Je me souviens de m’être retourné vers Philippe Rezzonico, un bon vivant et excellent compagnon de voyage, pour échanger un « high five » qui venait du fond du cœur. Je ne me rappelle plus vraiment le score (je pense que les Bucs ont gagné, faudrait vérifier), mais je me souviens d’une chose : à ce moment-là, je n’aurais voulu être nulle part ailleurs. (Les Buccaneers l’ont bien emporté 48-21 sur les Raiders d’Oakland lors du Super Bowl XXXVII présenté le 26 janvier 2003 à San Diego.)