Chaque semaine, les journalistes des Sports de La Presse répondent à une question dans le plaisir, et un peu aussi dans l’insolence

Simon-Olivier Lorange

Une précision, d’abord : je ne suis pas de ceux qui croient que le hockey devrait strictement se jouer à 30 degrés sous zéro. Mais encore faut-il en avoir pour son argent. Je divise ma « pire » expérience de partisan entre deux édifices du sud des États-Unis. À Glendale, le Gila River Arena, où les Coyotes de l’Arizona disputent leurs parties locales, est planté au milieu d’un complexe commercial en bordure de l’autoroute. À l’intérieur, les coins des sections les plus élevées offrent une vue obstruée aux spectateurs. Le soir où j’y suis allé, la foule était éparse, peu emballée. L’ambiance ne pouvait toutefois être aussi triste qu’à mon passage au très beau Staples Center de Los Angeles, au début de la saison 2014-2015. Les Kings, champions en titre de la Coupe Stanley, jouaient devant une salle comble… où l’on aurait pourtant entendu une mouche voler. Malgré une domination totale des locaux, le plus grand moment d’exaltation est venu pendant un arrêt de jeu à la présentation d’un militaire. Rien à voir, dans les deux cas, avec les Knights de Vegas qui m’ont offert, au milieu du désert, l’une de mes meilleures soirées de sport à ce jour.

Guillaume Lefrançois

PHOO TIRÉE DU COMPTE TWITTER DE GUILLAUME LEFRANÇOIS

À l’entraînement de la veille du match opposant le Canadien aux Sénateurs en décembre 2017, les joueurs portaient des chandails sans numéro. Pour les reconnaître, il fallait donc y aller par déduction.

Les matchs de hockey en plein air offrent toujours un spectacle magnifique. Pour citer Michel Corbeil, le meilleur directeur de bord de l’industrie du voyage : « C’est pas juste diose, c’est grandiose ! » En décembre 2017, le Canadien affrontait donc les Sénateurs à la Place TD, un évènement somme toute réussi. Pour les journalistes, la passerelle de presse est très loin de la patinoire, mais les numéros au dos des chandails et les téléviseurs permettent de bien suivre l’action. Le problème, c’est l’entraînement de la veille du match, car les joueurs portent des chandails sans numéro. Pour les reconnaître, il fallait donc y aller par déduction. Le petit droitier qui patine penché, c’est Brendan Gallagher. Le grand gaucher qui patine avec les épaules retroussées : Alex Galchenyuk. Le barbu gaucher qui rentre au vestiaire parce qu’il s’est blessé : probablement David Schlemko.

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Alexandre Pratt

PHOTO DAVID SHERMAN, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Le Metrodome, à Minneapolis, était un stade conçu pour le football.

Le Stade olympique, pour un match de baseball. C’est comme assister à une messe dans un ancien centre intérieur de patins à roulettes, plutôt qu’à la basilique Saint-Pierre de Rome. Cela dit, le Metrodome, à Minneapolis, n’était pas mieux. C’était un stade conçu pour le football. Pour le baseball, sur la ligne du troisième but, il fallait se tourner à 45 degrés vers notre droite pour voir le frappeur. Trois minutes, ça va. Trois heures ? Je ne le sais pas. Je me suis tanné après cinq manches.

Richard Labbé

PHOTO WIKIPEDIA COMMONS

L’aréna McNichols de Denver, le premier aréna de l’Avalanche, et des Rockies avant eux

On va se le dire, n’importe quel stade de la Ligue canadienne de football est un excellent candidat à ce titre, et je ne vais jamais oublier l’Ivor Wynne de Hamilton, avec son ascenseur qui menaçait à tout moment de s’effondrer et son stationnement à deux places pour les médias, ce qui avait mené au remorquage de la voiture d’un collègue de la Gazette en plein match. Mais pour rester dans la belle nostalgie, j’aimerais vous ramener aux charmes de l’aréna McNichols de Denver, le premier aréna de l’Avalanche, et des Rockies avant eux. On surnommait cet endroit le Big Mac en raison de la forme de son toit, qui ressemblait à la galette d’un burger de chez McDo, mais à l’intérieur, on se sentait plutôt comme dans un McFlurry géant : on se les gelait. Pour les journalistes, c’était peut-être encore pire ; les génies qui ont construit la place ont oublié de prévoir de l’espace pour une galerie de presse. Alors, il n’y en avait pas, de galerie de presse, et à la place, il fallait aller s’asseoir dans les dernières rangées de l’aréna, où on pouvait presque toucher au toit. Là, les bonnes gens de l’Avalanche avaient installé des planches de bois par-dessus les bancs, afin qu’on puisse y déposer un ordinateur portable pour y écrire des textes qui étaient rarement rédigés sous le coup d’une inspiration divine, je ne sais trop pourquoi. Et puis ça, c’était lors des « bonnes soirées », quand nos doigts n’étaient pas gelés. Il y a des arénas dont on regrette la disparition. Le McNichols Arena n’est pas de ceux-là.

Miguel Bujold

PHOTO TREVOR HAGAN, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Le stade de football Investors Group Field de Winnipeg

Lorsqu’on couvre la LCF, il ne faut pas trop s’attendre à des stades luxueux ou à des gros buffets pour les journalistes. Ni à des foules survoltées qui vous donnent la chair de poule. C’est à Regina qu’on s’approche le plus de l’expérience américaine, mais encore là, les partisans des Roughriders sont généralement assez bien élevés. On est loin de ceux des Eagles de Philadelphie ou des Seahawks de Seattle. Un peu à l’est de Regina, il y a ma ville préférée : Winnipeg… Une ville où il fait toujours - 28 oC et où il est généralement préférable de rester dans sa chambre d’hôtel le plus longtemps possible. Remarquez que le fait d’avoir couvert environ 10 matchs en cinq ans dans cette ville il y a une dizaine d’années ne m’aide sûrement pas à être très objectif. C’était peut-être un peu trop. J’étais pourtant content d’être sur place pour le tout premier match de l’histoire au Investors Group Field, en 2013. Beau stade, sauf que le WiFi n’a pas fonctionné de la soirée. Pas de signal avec mon ordinateur ni avec mon téléphone cellulaire. J’ai envoyé mon texte une heure plus tard que prévu. Une autre belle surprise m’attendait après le match (plus d’une heure après la fin du match, je tiens à le préciser) : le stationnement était encore rempli de voitures. Un problème de configuration, m’a-t-on expliqué. Je suis resté assis dans le taxi 45 bonnes minutes, et ça, c’était pour sortir du stationnement. Je voulais vraiment me réconcilier avec Winnipeg, mais ça n’a pas fonctionné du tout. Allez voir ou couvrir un match de football à Winnipeg ? À moins que ce soit vraiment nécessaire, je vais passer mon tour.

Mathias Brunet

PHOTO MATHIAS BRUNET, LA PRESSE

Il arrivait souvent à Mathias Brunet de se pincer sur la tribune de presse du Wrigley Field de Chicago, au milieu des années 1990, pour s’assurer qu’il ne rêvait pas.

L’endroit où il était le plus difficile de travailler était également le plus beau. Il m’arrivait souvent de me pincer sur la tribune de presse du Wrigley Field de Chicago, au milieu des années 1990, pour m’assurer que je ne rêvais pas. J’avais la chance de travailler dans un stade mythique à la couverture des Expos de Montréal. Il y avait cette unique clôture recouverte de vignes, mais aussi les immeubles, au loin, où des fans se massaient pour assister aux matchs sans avoir à payer. Il fallait d’abord s’assurer de se nourrir convenablement avant d’arriver au stade. Les vétérans chroniqueurs m’avaient raconté des histoires d’horreur sur des collègues tombés malades après avoir osé se sustenter dans la salle de presse. J’ai déjà franchi l’étape d’y commander un repas à ma première visite, mais en regardant l’assiette, je n’ai pas osé y toucher. Une dizaine de visites plus tard, je n’y avais jamais mangé. Mais la bouffe constituait un détail. Les fins de match demeuraient une aventure. Il n’y avait aucun accès direct au vestiaire de la tribune de presse. Il fallait parcourir les gradins du sommet au terrain, à travers la foule, pour y parvenir. On devait donc s’y prendre d’avance pour descendre, fin huitième, début neuvième, à un moment du match où certains fans ont abusé de l’alcool. Quand le match avait lieu en soirée (on a permis les lumières au Wrigley Field en 1988) et que le score était serré, à l’approche de l’heure limite pour remettre nos textes, le sang pouvait se glacer dans nos veines. Un grand chelem en neuvième manche constituait le pire de nos cauchemars. Nous nous trouvions au pied du terrain et notre ordinateur se trouvait là-haut, sur la vétuste tribune de presse avec un texte à recommencer au complet… Ça demeure néanmoins le plus beau stade qu’il m’ait été donné de visiter, avec le Fenway Park de Boston…