(Montréal) L’annulation de la saison automnale du sport universitaire au Canada dans la foulée de la pandémie de coronavirus a obligé plusieurs étudiants-athlètes de dernière année à faire un choix déchirant : conclure comme prévu leurs études ou les prolonger pour conserver une chance de faire carrière au niveau professionnel.

« Si j’avais joué une cinquième année de football, j’aurais eu d’assez bonnes statistiques pour avoir au moins un essai avec une équipe professionnelle », explique le receveur Yanni Khennache du Vert & Or de l’Université de Sherbrooke.

Pour accommoder des athlètes comme Khennache, le U Sports, l’organisme qui chapeaute les trois ligues universitaires du Canada, a ajouté une année supplémentaire d’admissibilité afin de permettre aux étudiants de poursuivre leur carrière d’athlètes l’an prochain. Normalement, les étudiants sont limités à cinq années de compétition universitaire seulement, mais grâce à cette mesure, ils peuvent en envisager une sixième.

Mais cette mesure ne profitera pas à tous les étudiants-athlètes.

« J’ai déjà allongé mon baccalauréat sur cinq années pour le football, mentionne le botteur Findlay Brown de l’Université McGill. L’étendre sur six ans et laisser tomber quelques cours pour revenir l’an prochain, ce n’est pas quelque chose que je peux justifier. »

Clara Blachier, joueuse de basketball à l’Université du Québec à Montréal, est toutefois prête à prolonger ses études pour profiter de sa dernière saison.

« En raison de la COVID-19, j’ai entrepris de nouvelles études pour deux ans afin de revenir l’an prochain, mais mon plan reste le même : aller jouer pro en Europe quand je termine », lance-t-elle.

Blachier, comme plusieurs autres athlètes européennes, se sert du niveau du calibre de jeu universitaire canadien comme tremplin avant de retourner sur le Vieux Continent.

« Le style de jeu est totalement différent de ce que j’ai vu en France, mais c’est très enrichissant de voir d’autres horizons ».

Partir à regret

Khennache est quelque peu déçu du contexte dans lequel il a accroché ses crampons.

« Ça a été vraiment difficile. Il n’y a plus vraiment de contact avec nos entraîneurs et mes coéquipiers sauf par visioconférence, et pratiquement pas de contacts humains. Personnellement, c’est au mois de juin que j’ai décidé de me distancer, car je voyais où ça allait (la situation avec la COVID19), mais j’ai l’impression que ça ne s’est pas terminé de façon normale. »

Pour certains, la patience est une vertu. Mais la décision tardive d’annuler la saison d’automne du Réseau du sport étudiant du Québec (RSEQ), prise en septembre dernier, en a cependant désappointé plusieurs. En comparaison, les deux autres ligues canadiennes avaient tranché au début du mois de juin.

« Je me suis entraîné toute l’année en pensant qu’il y aurait une saison, mais finalement tout a été annulé. Ça a été difficile à digérer », affirme Brown.

La NCAA, la division universitaire au sud de la frontière, a pris la même décision que le U Sports en annulant sa saison et en accordant une année supplémentaire d’admissibilité. Cette option est fort intéressante pour la golfeuse rosemèroise Brigitte Thibault, qui étudie à l’Université Fresco State, en Californie.

« En ce moment, je considère utiliser l’année supplémentaire. Je veux prendre du millage dans le milieu et participer à des compétitions, déclare-t-elle. Mais si je me qualifie et j’ai ma carte [de la LPGA], je vais revoir mes options à ce moment. »

Pour la golfeuse amateur la mieux classée au Canada, cette pause a été profitable.

« J’ai eu une fenêtre de temps que je n’aurais jamais eu en temps normal. J’en ai donc profité pour améliorer plusieurs aspects de mon élan », précise-t-elle.

Le RSEQ a annoncé une suspension de toutes ses activités au moins jusqu’au 15 janvier, bien que seuls des matchs hors-concours et des entraînements étaient planifiés. De son côté le U-Sport a annoncé l’annulation des championnats nationaux pour la session hivernale 2021.

La situation actuelle a déjà d’importantes répercussions sur les carrières de plusieurs étudiants-athlètes. Plus longtemps elle perdurera et plus elle constituera un énorme casse-tête pour le sport universitaire.