Le fleuve Saint-Laurent est habituellement au cœur des promenades ou des déplacements de Joan Roch entre sa résidence à Longueuil et son travail à Montréal. Le coureur le longe, l’admire depuis les ponts et le traverse parfois directement sur la glace, l’hiver.

À partir de mardi matin, il aura une perspective plus large en le suivant de la Gaspésie jusqu’à Montréal. Au total, il parcourra à la course environ 1100 kilomètres, de Percé jusqu’au belvédère Kondiaronk, sur le mont Royal. Temps prévu pour ce défi : 10 jours. « C’est une bonne combinaison. C’est un défi sportif intense, mais ça me laisse le temps de m’arrêter sans regarder le chrono », dit-il.

Joan Roch a eu cette idée il y a plus de deux semaines. Voyant sa saison de course et ses grands objectifs tomber à l’eau, il s’est mis en quête d’une longue distance à parcourir. Après tout, les congés étaient déjà pris et la forme physique était là. Il a donc sorti une carte pour trouver le point de départ idéal. Gaspé ? « Ç’aurait été une belle balade, mais ça n’aurait pas fait 1000 kilomètres. »

Il a donc regardé un peu plus au sud. En partant de Percé, la distance à parcourir équivalait plus ou moins à celle des trois courses qu’il devait disputer aux États-Unis en août, en septembre et en octobre. Il s’est ensuite donné l’objectif d’être toujours le plus près possible du golfe du Saint-Laurent, puis du fleuve. Il sera sa lanterne, en quelque sorte.

Je n’ai pas envie de courir sur le bord d’une route s’il y a d’autres options. Ce sera un mélange de la route 132, de la route Verte et de la plage où l’on m’a conseillé d’aller à certains endroits. Et je sais que, si je me retrouve avec le fleuve à gauche, ce sera parce que je me suis perdu.

Joan Roch

Entre Percé et Montréal, il a défini neuf haltes : Rivière-au-Renard, Mont-Louis, Grosses-Roches, Rimouski, Rivière-du-Loup, Berthier-sur-Mer, Lotbinière, Yamaska et Longueuil. Les amateurs de géographie québécoise auront jaugé qu’il avalera entre 120 et 130 kilomètres lors des huit premières étapes. L’avant-dernière, la menant à Longueuil, sera de 90 kilomètres. L’arrivée sur le mont Royal se fera le 13 août, à 7 h 30.

PHOTO FOURNIE PAR JOAN ROCH

Après avoir lancé un appel sur les réseaux sociaux, il a trouvé des âmes charitables prêtes à l’accueillir lors de chacun de ses arrêts. Il sait également que des coureurs l’accompagneront à différents endroits du parcours ou l’aideront à se ravitailler. Une balise GPS permettra de suivre sa progression. « Au début, je me suis lancé en disant que j’allais faire ça tout seul, mais je pense que je ne serai jamais tout seul. »

Programme qui tombe à l’eau

L’année 2020 devait être celle de la Triple Crown pour Joan Roch. En l’espace de huit semaines, il aurait dû participer à trois courses aux États-Unis de 200 milles ou plus : Bigfoot 200 (État de Washington), Tahoe 200 (Californie et Nevada) et Moab 240 (Utah). COVID-19 oblige, le premier évènement a été annulé. Le quadragénaire s’attend à ce que les deux autres épreuves connaissent le même sort.

« Ce qui me motivait vraiment, c’était d’enchaîner les trois courses. Une fois que la première a sauté, je trouvais que le principe perdait de son intérêt. […] En faisant quelque chose de local, en organisant mon propre évènement, qui me ressemble et qui me convient, je sais que ça ne tient qu’à moi. »

Cette période riche en ultramarathons aurait aussi dû trouver une bonne place dans son deuxième livre. L’auteur d’Ultra-ordinaire : journal d’un coureur, paru en 2016 aux Éditions de l’Homme, compte maintenant sur son périple Percé-Montréal pour faire le plein d’anecdotes et de photos.

PHOTO FOURNIE PAR JOAN ROCH

Foulée après foulée, il s’attend à vivre une aventure marquante. « Quand j’ai fini mon premier 100 milles en 2013, ç’avait été un tournant dans ma “carrière” de coureur. Ça m’avait transformé de savoir que je pouvais franchir cette distance dans des conditions épouvantables. Je m’attends maintenant à ne pas être la même personne entre le début et la fin de la course tellement je vais vivre des hauts et des bas spectaculaires. Sans oublier toutes les rencontres que je vais faire », indique celui qui a couru entre Québec et Montréal en septembre 2015.

J’ai vraiment hâte parce ce que ça va être une belle aventure, mais en même temps, je me demande dans quoi je me suis embarqué.

Joan Roch

« Normalement, je suis parfaitement entraîné pour ce genre de défi là, mais je n’ai jamais couru à ce point. Il y a forcément une part d’inconnu, mais c’est aussi ce que je cherchais. Je ne voulais pas répéter ce que j’avais déjà fait. »

Pour rapprocher les deux villes, il a pensé à une idée sortie tout droit de l’Antiquité : apporter à Valérie Plante un message que lui a transmis la mairesse de Percé, Cathy Poirier. « J’ai prévenu dès le début que je ne rapporterais pas la réponse à Percé ! »

Ce sera plutôt le temps de retrouver son bout du Saint-Laurent, qu’il n’a pas fini de longer, d’admirer et de traverser.