Quel est ton niveau de fatigue physique ? Combien d’heures as-tu dormi ? Quelle est ta fréquence cardiaque au lever ? Pour Myriam Paquette, ces questions qu’elle pose presque tous les matins aux athlètes paralympiques de natation qu’elle supervise valent de l’or. En fonction des réponses qu’on lui donne, la jeune physiologiste de l’exercice est en mesure d’ajuster leur préparation et d’optimiser leurs performances.

« Ce n’est pas un seul type de données qui nous permet de prendre des décisions. Mais on combine plusieurs éléments », explique la jeune femme qui travaille à l’Institut national du sport du Québec (INS Québec).

Âgée de seulement 30 ans, Myriam Paquette est la plus jeune recrue de l’équipe scientifique de l’INS Québec. Et non la moindre. Ancienne fondeuse élite, elle est la seule à avoir été recrutée à l’Institut avant même d’avoir complété son doctorat, car elle se démarquait nettement des autres. « Myriam a un souci d’appliquer concrètement les connaissances scientifiques au sport de haut niveau. C’est clairement sa force », affirme le directeur des sciences du sport de l’INS Québec, Guy Thibault. En octobre, la jeune femme a d’ailleurs remporté le Prix jeune chercheur décerné dans le cadre du 15e Sommet du SPort et de l’INnovation (SPIN) d’À nous le podium (ANP). « La compétition était relevée. Mais elle était clairement la meilleure », note M. Thibault.

Une « vision souriante du sport »

Native de Saint-Bruno, Myriam Paquette s’est intéressée au sport sur le tard. Vers 15 ans, elle commence le ski de fond de compétition. Elle sera membre de l’équipe du Rouge et Or à l’Université Laval où elle complète sa maîtrise en kinésiologie. « Myriam a réalisé des compétitions de ski de fond dans le circuit NCAA aux États-Unis et a fini dans les cinq premières. C’est une des bonnes fondeuses qu’on a eues », relate M. Thibault, qui a été son directeur de maîtrise.

Ce dernier mentionne que Myriam Paquette a « une vision souriante du sport ».

Et quand elle travaille avec les athlètes, elle leur transmet ça : ils doivent, oui, s’améliorer. Mais ils doivent surtout s’amuser.

Guy Thibault, directeur des sciences du sport de l’Institut national du sport du Québec

Quand on lui demande ce qu’elle aime le plus dans sa profession, Myriam Paquette répond : « L’approche scientifique mêlée au travail dans le sport. On voit l’application concrète de la science au quotidien », dit-elle.

Elle aime aussi le travail d’équipe. C’est avec des physiothérapeutes, des biomécaniciens, des préparateurs physiques et des entraîneurs qu’elle peut parvenir à tirer les meilleures performances des athlètes.

Faire parler les données

Myriam Paquette œuvre principalement auprès des équipes de paranatation et de paracyclisme. Elle aide à la planification des entraînements. À les périodiser pour obtenir les meilleurs effets. « Je fais parler les données pour savoir comment adapter la préparation des athlètes », dit-elle.

La profession de physiologiste de l’exercice existe depuis environ les années 50 dans le monde. Très populaires en Europe, ces professionnels qui étudient les réponses physiologiques liées au stress de l’exercice ont commencé à être plus présents auprès des athlètes canadiens vers 2010. « Dans le cycle olympique précédant les Jeux olympiques de Vancouver, on a créé des équipes intégrées de soutien pour épauler les entraîneurs. C’est là que ça a pris un essor important », explique François Billaut, professeur au département de kinésiologie de l’Université Laval et superviseur de thèse de Myriam Paquette.

De l’importance du repos aux meilleures techniques d’échauffement, les sujets étudiés par les physiologistes de l’exercice sont nombreux. « Et globalement, oui, les informations qui se rendent aux sportifs du dimanche qui veulent améliorer leurs performances tirent leurs origines de certaines études scientifiques en physiologie de l’exercice », note M. Billaut.

Une scientifique qui ose

Au doctorat, Myriam Paquette a mené des travaux de recherches sur l’effet de deux types d’entraînements par intervalles sur « l’oxygénation musculaire et la performance en kayak de vitesse ».

Pour améliorer l’aptitude aérobique d’un athlète, on peut s’intéresser au système cardiaque et améliorer la capacité du cœur à pomper le sang oxygéné vers les muscles.

Mais Myriam Paquette s’est plutôt intéressée à la capacité des muscles à extraire l’oxygène du sang pour améliorer la performance. Elle a évalué quel type d’entraînement par intervalles permettait le plus d’augmenter cette capacité.

« Elle a développé une idée innovante, commente M. Thibault. Elle a clairement créé un nouveau paradigme. On voit ça d’habitude chez des chercheurs ayant des années d’expérience. Des gens vont clairement partir de l’idée de Myriam et développer le tout dans les prochaines années. Elle a carrément ouvert un champ de recherches. »

Myriam Paquette ajoute que beaucoup de recherches ont été faites sur l’effet des entraînements par intervalles sur la course à pied et le vélo. Mais peu sur des sports qui sollicitent essentiellement le haut du corps, comme le kayak. Pour Myriam Paquette qui travaille avec des athlètes paralympiques, cette particularité est importante.

Au cours des prochains mois, Myriam Paquette prévoit de suivre l’équipe paralympique de natation jusqu’à Tokyo. Si rien ne change, elle sera du voyage.

À plus long terme, Myriam Paquette veut poursuivre ses recherches dans le domaine paralympique. Un domaine pour lequel il y a « vraiment pas beaucoup de littérature scientifique ».

Pour M. Thibault, il n’y a pas de doute que Myriam Paquette ira loin : « Elle a une intelligence supérieure. Un esprit pétillant. Une attitude souriante qui témoigne d’une profonde gentillesse. C’est une bonne vulgarisatrice. Et elle se démarque nettement par sa capacité à appliquer concrètement sur le terrain les connaissances. »