Chaque semaine, les journalistes des Sports de La Presse répondent à une question dans le plaisir, et un peu aussi dans l’insolence

Simon Drouin

Coup de fil de Marc-Olivier, mon grand ami de l’école primaire à Boucherville : « Il y a un joueur de la Ligue nationale chez nous », m’annonce-t-il de but en blanc, l’air satisfait. Quoi ? Il m’aurait dit qu’Hulk Hogan se baignait dans sa piscine que je n’aurais pas été plus excité. J’ai accouru. Ce n’était pas une blague, il était bien là, accoté sur le comptoir de la cuisine, fringant défenseur recrue des Blackhawks de Chicago, ancien des Saguenéens. Il accompagnait la cousine de mon ami, une fille de Chicoutimi, en visite. Il avait gentiment accepté de venir jouer au hockey dans la rue (la cousine était jolie). Je ne sais pas pourquoi, mais je me souviens qu’il chaussait des espèces de ballerines, pas nécessairement pratiques pour taper la balle orange. Déjà, Marc Bergevin se distinguait par sa tenue vestimentaire.

Richard Labbé

PHOTO DENIS COURVILLE, ARCHIVES LA PRESSE

Robert Picard lors d’un match entre les Blues de St. Louis et le Canadien au Forum de Montréal, le 18 février 1982

J’ai oublié l’année exacte. Peut-être était-ce en 1980, ou encore en 1981 ? Peu importe. J’étais à la fin de mon impressionnante carrière au hockey, vers l’âge de 10 ans, et la domination que mon père avait espérée de ma part tardait à se manifester. Pour tout dire, en cinq ans de hockey mineur, je pense avoir marqué deux buts, et l’un d’eux fut marqué dans mon propre filet. Mais passons. Ce jour-là, c’était jour de gala de fin d’année, et j’allais recevoir un trophée, le même que les 800 autres joueurs de l’association, ce qui n’enlevait rien à mon immense fierté. En plus, les organisateurs avaient annoncé la venue d’un « invité surprise », qui était un joueur du Canadien. Sur le coup, je me suis mis à rêver : quoi, Guy Lafleur va venir nous remettre les trophées ? Ou peut-être Robinson ? Ou peut-être Shutt, Larouche ? Que de choix. Alors la surprise fut assez totale quand on a tous vu Robert Picard arriver, et j’ai encore quelque part la carte postale avec sa photo, sur laquelle il a griffonné ces mots d’une grande sagesse, en plus de son nom : « Bonne chance ». Parce qu’on a tous besoin d’un peu de chance de la vie, et de bonne chance aussi, préférablement.

Alexandre Pratt

PHOTO ELISE AMENDOLA, ASSOCIATED PRESS

Cam Neely célèbre avec son coéquipier Dmitri Kvartalnov (10) après avoir inscrit son 50e but de la saison, face aux Capitals de Washington, le 7 mars 1994.

J’avais 9 ans. Mes oncles m’avaient invité au Forum pour un match entre les Canadiens de Sherbrooke et le club-école des Bruins de Boston. Cinq rangées devant nous, des vrais Bruins assistaient à la rencontre. Mes oncles avaient reconnu Raymond Bourque. « Va lui demander un autographe ! » J’ai pris mon courage à deux mains. J’ai présenté mon programme à Bourque, qui l’a gentiment signé. Il l’a ensuite passé à un coéquipier, pour qu’il le signe à son tour. Mais je suis intervenu. « Désolé, je fais juste signer les vrais joueurs de hockey. » Le coéquipier de Bourque m’a remis le programme. Un peu étonné. C’était Cam Neely…

Simon-Olivier Lorange

PHOTO FOURNIE PAR SIMON-OLIVIER LORANGE

Carte autographiée par l’ancien gardien de but du Canadien de Montréal José Théodore

J’étais en sixième année du primaire, et un de mes camarades de classe était (et est toujours, j’espère) le cousin de José Théodore. À l’époque, le gardien en était à ses débuts avec le Canadien, et je ne me pardonnais pas d’avoir échangé quelques mois plus tôt une carte le montrant dans son équipement des Olympiques de Hull au cours de son premier match dans la LNH. Alors quand j’ai sorti d’un sachet Upper Deck 97 une carte sur laquelle il portait son équipement et son masque aux couleurs du Tricolore, je n’ai pas hésité à quêter un autographe auprès dudit cousin. Ce dernier s’est gentiment acquitté de sa mission et m’a rapporté la carte signée quelques jours plus tard. Mon univers s’est toutefois effondré quand j’ai vu que Théo avait écrit « À Simon-Olivier » au-dessus de sa signature : le yacht que je croyais pouvoir m’acheter grâce à la valeur de cette pièce de collection venait de disparaître au large. Plus de deux décennies plus tard, ça me fait toutefois un joli souvenir d’un gagnant du trophée Hart.

Mathias Brunet

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Petr Svoboda du Canadien de Montréal, en juillet 1984

J’ai 15 ans en 1984. Je rêve toujours de couvrir le Canadien pour La Presse. Je parviens à me faufiler au Forum de Montréal pour le repêchage annuel de la Ligue nationale. Tous les yeux sont évidemment rivés sur Mario Lemieux, l’indiscutable premier choix au total. Mais Serge Savard et le Canadien réservent une surprise de taille aux partisans. La planète est encore scindée entre le monde mystérieux et opaque du communisme et les sociétés capitalistes, et l’organisation parvient à extirper un jeune défenseur de talent de sa Tchécoslovaquie natale et en fait son premier choix, cinquième au total, dans un scénario d’évasion digne de James Bond : Petr Svoboda ! À peine a-t-il revêtu son chandail du Canadien après avoir été choisi par les Glorieux que je parviens à l’intercepter à sa sortie du plancher où cogitent les dirigeants des 21 clubs de la Ligue nationale de hockey. Je crois, sans crainte de me tromper, avoir été le premier à recueillir son autographe ! Dans les jours suivants, j’ai aussi acheté un chandail d’entraînement bleu royal du Canadien, avec le nom SVOBODA et son numéro 25 dûment inscrit à l’arrière. Il était maigrichon et tranchait dans cet univers de colosses (mon grand-père disait toujours à la blague à l’époque que les Soviétiques lui avaient coupé les épaules !), mais ça me le rendait encore plus sympathique. Et quel patineur fluide ! Petr Svoboda n’est jamais devenu le joueur espéré. Et j’ai eu le cœur brisé quand on l’a échangé à Buffalo pour Kevin Haller en 1992. Mais il a néanmoins joué plus de 1000 matchs dans la LNH. Avec le recul, j’aurais peut-être mieux fait de me battre pour l’autographe de ce jeune gardien des Bisons de Granby repêché une quarantaine de rangs après lui ce jour-là. Un certain Patrick Roy…

Miguel Bujold

PHOTO DENIS COURVILLE, ARCHIVES LA PRESSE

Dino Bravo, lutteur professionnel, en juillet 1984.

Pour être bien honnête, la collection d’autographes n’a jamais été un hobby ou quelque chose qui m’attirait particulièrement. Les rares que j’ai obtenues, allez savoir où elles sont aujourd’hui. Mais les souvenirs de mes rencontres avec les étoiles du sport, eux, sont très bien préservés. L’une de ces rencontres avait été avec feu Dino Bravo. C’était à l’aréna Paul-Sauvé, l’ancien Centre Paul-Sauvé. L’un des promoteurs du gala de lutte était une connaissance de ma famille et j’avais eu la chance de rencontrer Bravo environ une heure avant le début du gala dans le vestiaire des lutteurs. Je devais avoir 8 ou 9 ans à cette époque et Bravo était au sommet de sa gloire au Québec (c’était avant son passage à la WWF). D’une grande gentillesse, il avait pris le temps de jaser avec moi, à quelques heures d’un combat qui s’annonçait très difficile contre le redoutable « Superstar ». Je me souviens d’une autre fois où j’étais entré dans la toilette de l’aréna pour me rendre compte que c’était Sailor White qui utilisait l’urinoir à côté du mien. Édenté, White devait peser environ 300 livres et jouait le rôle d’un méchant qui ne parlait jamais. Cette fois-là, aussi, j’avais 8 ou 9 ans, et disons que j’avais trouvé ça un peu moins sympathique que ma rencontre avec Dino. Je n’ai jamais eu aussi hâte de sortir d’une salle de bain !

Guillaume Lefrançois

PHOTO TIRÉE DU SITE INTERNET TRADING CARD DATABASE

Marquis Grissom

Au début des années 1990, je ne ratais jamais la Caravane des Expos, une tournée que l’équipe faisait en hiver pour se rapprocher des partisans. C’est donc dans une Cage aux sports que, tout gêné, du haut de mes 9 ans, j’ai approché Marquis Grissom pour avoir son autographe. Je ne la retrouve malheureusement pas dans mes papiers, mais j’ai encore le souvenir précis d’une photo 4 par 6 de Grissom sur fond bleu, dans le nouvel uniforme des années 1990, avec les mots : « To Guillaume, best wishes », et sa signature. Il m’était apparu très gentil, même si j’étais trop timide pour réellement converser avec lui. Mais j’ai été rassuré quand j’ai appris, au fil de mes années à côtoyer des journalistes plus expérimentés que moi, qu’il était un authentique bon gars d’une grande générosité, qui n’avait pas une once de malice.