Pour la première fois dans l’histoire du baseball majeur, une femme sera directrice générale d’une franchise. Son nom : Kim Ng. Son équipe : les Marlins de Miami.

Non, ce n’est pas un coup de marketing. C’est une nomination pleinement méritée. Quand je couvrais le baseball majeur, au début des années 2000, Kim Ng était déjà une des meilleures têtes de l’industrie. Son nom avait circulé pour remplacer le DG des Expos, Omar Minaya, qui était courtisé ailleurs.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE TWITTER DE LA MLB

Les Marlins de Miami ont nommé Kim Ng directrice générale de l’équipe, vendredi. Il s’agit d’une première pour une femme dans les grands circuits professionnels en Amérique du Nord.

Pas parce qu’elle était une femme.

Parce qu’elle était une gagnante.

Son parcours est inspirant. Sa thèse de maîtrise porte sur l’égalité des sexes dans le sport universitaire aux États-Unis. À 21 ans, elle obtient un premier stage dans le baseball majeur. Avec les White Sox de Chicago. Tout en bas de l’échelle, le plus loin possible du terrain. Sa tâche : entrer les statistiques à la mitaine, dans le logiciel de l’équipe.

De là, elle gravit les échelons. Un à un. Elle prépare les dossiers d’arbitrage des White Sox. Notamment celui de l’as lanceur Alex Fernandez, représenté par l’agent le plus influent du baseball, Scott Boras. Cause qu’elle remporte. L’annonce de sa victoire fait le tour des ligues majeures.

Les Yankees de New York ont reconnu son potentiel. En 1998, ils l’embauchent comme directrice générale adjointe. Un poste prestigieux. Le numéro deux des opérations baseball de la meilleure franchise de l’histoire. Pendant ses quatre années à New York, les Yankees gagnent trois fois la Série mondiale. L’autre saison ? Ils échappent le championnat dans la dernière manche du dernier match.

Son travail avec les Yankees suscite les commentaires les plus élogieux. Notamment du propriétaire George Steinbrenner, réputé archisévère avec ses directeurs.

Certaines équipes donnent des promotions à des femmes parce que c’est la chose à faire. Mais [Kim] mérite tout ce qu’elle a obtenu.

George Steinbrenner, propriétaire des Yankees de New York à l’époque où Ng y travaillait

Sauf que faire partie d’une équipe gagnante a aussi un inconvénient : son patron, le directeur général Brian Cashman, est bien en selle. Il est d’ailleurs toujours en poste, 20 ans plus tard. Les possibilités d’avancement de Kim Ng avec les Yankees, en 2001, étant limitées, elle quitte le club pour les Dodgers de Los Angeles, afin d’occuper le même rôle. C’est à partir de ce moment que son nom se met à circuler lors de chaque ouverture de poste. À Montréal comme ailleurs. Elle est finaliste plusieurs fois. Avec les Dodgers. Avec les Angels. Avec les Mariners. Avec les Padres, deux fois.

Sans succès.

Le commissaire, lui, croit en elle et la nomme vice-présidente des opérations baseball des ligues majeures. Une autre tâche qu’elle a accomplie avec brio.

Avec un tel CV – huit participations aux séries, trois championnats –, il est anormal que Kim Ng ait dû attendre plus de 20 ans pour accéder à un poste qu’elle convoitait, et pour lequel elle avait toutes les compétences.

Maintenant, l’injustice est réparée. Enfin. Grâce à un homme qui a constaté son talent à New York, l’ancien arrêt-court des Yankees Derek Jeter, aujourd’hui propriétaire des Marlins.

Ses premiers mois seront difficiles. Le baseball est un milieu extrêmement machiste. Sur le terrain, mais aussi dans les hautes sphères. Ceci dit, Ng, 51 ans, est la personne toute désignée pour briser le plafond de verre. Elle est dans le milieu depuis 30 ans. Elle connaît la chanson. Dans une entrevue il y a deux ans, elle expliquait avoir réussi dans un monde d’hommes « en persévérant, en faisant preuve de courage, en se forgeant une carapace et en étant capable de compartimenter » les informations.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE TWITTER DES MARLINS DE MIAMI

Avec 30 ans d’expérience dans le baseball majeur, Kim NG semble la personne toute désignée pour briser le plafond de verre.

Gagnera-t-elle la Série mondiale avec les Marlins ?

Peut-être que oui.

Peut-être que non.

Mais sa simple nomination est déjà une grande victoire en soi. Car elle envoie un message fort aux jeunes femmes – de plus en plus nombreuses – qui souhaitent faire une carrière dans l’industrie du sport professionnel.

Désormais, tout est possible.