Shayne Renaud a 29 ans et il est ingénieur civil dans la région montréalaise. Gabriel Renaud a deux ans de moins et il est assistant coach à l’École d’Entrepreneurship de Beauce.

Aucun lien de parenté ne les unit même si, pendant deux ans, ils se sont bien marrés à faire croire à tout le monde qu’ils étaient cousins. Dans les faits, ils ne se sont connus qu’en 2014, lors d’un essai amateur en vue du Red Bull Crashed Ice à Saint Paul, au Minnesota.

« Je lui demande : “Tu es là pour le Crashed Ice ? C’est quoi ton nom ? Gabriel Renaud. Eh ! Moi, je m’appelle Shayne Renaud !” », se remémore le plus âgé des deux à propos de cette coïncidence.

Depuis, les deux patineurs extrêmes se retrouvent régulièrement au TAZ, à Montréal, pour s’entraîner ensemble, en plus de sillonner le monde pendant les mois de décembre à mars. Ils disputent alors une dizaine de courses du Championnat du monde d’Ice Cross.

Avant le Crashed Ice, je n’avais pas voyagé. Là, je suis allé au Japon, en Finlande, en Russie, en Autriche, en France, en Suisse et presque partout en Europe.

Shayne Renaud

Outre le nom de famille, les deux Renaud partagent une origine commune : le hockey. Gabriel a joué en troisième division de la NCAA lors de ses études au Bowdoin College, dans le Maine. Shayne, lui, a évolué dans le junior AAA à Valleyfield et Lachine. Il reste qu’un bon coup de patin ne pèse pas lourd quand on dévale des pistes glacées à plus de 80 km/h face à trois autres concurrents.

PHOTO BERNARD BRAULT, LA PRESSE

Shayne Renaud

« J’ai toujours été rapide et je m’imaginais que j’allais être bon. Mais ça n’a pas été le cas la première année, indique Shayne, qui doit sa toute première inscription à son père. C’était plus dur que je ne pensais. […] Dans certaines pistes, tu ne vois même pas la première drop. Tu dois juste avoir confiance où tu sautes. »

« Ce qui m’a attiré, c’est la vitesse et l’adrénaline, mais rapidement, j’ai compris que c’était plus que ça. C’est vraiment un sport mental, ajoute Gabriel. Ce que j’adore, c’est de me dépasser mentalement et d’aller à la limite de l’inconfort. En fait, j’aime la gestion du risque.

« Quand tu arrives en haut et que tu regardes la piste pour la première fois, tu es comme : “Wow, je ne pensais pas que je m’étais inscrit à ça”. »

Shayne a effectué ses débuts en 2012 en se qualifiant pour le Red Bull Crashed Ice de Québec. La première de Gabriel a eu lieu en 2015, lors d’une Riders Cup au Minnesota.

Pour rester sur le circuit, ils doivent faire partie du top 7 canadien et être parmi les 64 meilleurs au monde. L’an dernier, ils ont respectivement pris les 9e et 28e rangs sur la scène internationale. Combinés, ils comptent 16 présences dans le top 10, avec un podium dans le cas de Shayne.

Les vacances l’hiver

Puisque le patinage de descente extrême « n’est pas un sport qui paie beaucoup », les deux doivent l’intégrer dans leur emploi du temps professionnel. Cette année, par exemple, le calendrier du Red Bull Ice Cross comprend 12 arrêts au Canada, en Autriche, au Japon, en Finlande, au Kazakhstan et en Russie.

« J’accumule beaucoup d’heures avant ma saison et je réussis à partir pour les compétitions au cours de l’hiver. Il faut aussi avoir des employeurs flexibles », reconnaît Gabriel, qui espère faire son entrée dans le top 16 cette saison.

PHOTO BERNARD BRAULT, LA PRESSE

Gabriel Renaud

Il faut aussi se dévouer au sport toute l’année et pas seulement au cours de la saison. Étant donné la forte compétition nationale et internationale, il serait très maladroit de rester inactif entre deux saisons.

C’est comme dans bien des sports. La descente est rapide, environ 45 secondes, mais il y a tellement de travail en amont et de préparation. Le jour de la course, c’est “all on the line”.

Gabriel Renaud

Quand la saison se termine, il prend une pause de patin à roulettes et de hockey jusqu’au mois de juin ou juillet. En fonction des saisons, son entraînement inclut du trampoline, du wakeboard, du ski nautique, du triathlon, du ski, du CrossFit et quelques séances de course. « Pour être compétitif, il faut être capable de toucher à beaucoup de disciplines », résume-t-il.

« Je vais au gym quatre à cinq fois par semaine après le travail, ajoute Shayne. L’été, je vais parfois jouer au hockey et je fais aussi du hockey cosom. Ça aide beaucoup au niveau du cardio, pour garder la forme. »

Les blessures

Malgré les vitesses atteintes lors des courses, les blessures sérieuses subies par les professionnels sont relativement rares. Le dossier médical de Shayne comprend une commotion cérébrale tandis que Gabriel a déjà dû s’arrêter six mois en raison d’une blessure à une épaule.

Ce dernier a cependant eu une très grosse frousse en se blessant lors de… la séance photo pour La Presse au TAZ. Il a subi une déchirure du ligament croisé postérieur (LCP) en tentant d’éviter, sans succès, un enfant qui faisait de la trottinette.

PHOTO BERNARD BRAULT, LA PRESSE

Gabriel Renaud s’est blessé lors de la visite de La Presse au TAZ à Montréal.

Puisqu’une opération n’est cependant pas nécessaire, il devrait reprendre l’entraînement intensif d’ici quatre à six semaines et ainsi ne pas rater le début de saison. Dans les circonstances, le patineur est soulagé.

« Sur le coup, c’est comme un coup de couteau en plein dans le cœur quand un évènement comme ça survient. Mon rêve est un top 16 au monde et, là, je sens qu’il m’échappe suite à un accident bête. On y met les efforts, la discipline et on t’enlève ça. C’est ça l’histoire qui tourne dans ma tête à ce moment-là. Est-ce que je vais être en mesure de compétitionner au même niveau ? Vais-je avoir la même explosion au départ ? […] Je vais y aller un coup de patin à la fois. »