Après 22 ans en courte piste, la patineuse Valérie Maltais a fait le saut en longue piste l’an dernier. Son pari est déjà réussi.

À l’été 2018, Valérie Maltais était prête à tout quand elle a fait la transition vers le patinage de vitesse sur longue piste. Même à prendre sa retraite si ça ne fonctionnait pas.

Un an plus tard, elle est loin de penser à accrocher ses patins, bien au contraire. L’athlète de 29 ans vise plutôt le top 10 mondial dès cette saison et tourne ses yeux vers les Jeux olympiques de Pékin, en 2022, qui seraient ses quatrièmes, après trois participations en courte piste.

Les Championnats canadiens de Calgary, qui ont pris fin dimanche, ont confirmé que Maltais était à sa place sur un anneau de 400 mètres. La patineuse originaire de La Baie, dans la région du Saguenay, est montée sur le podium à quatre reprises, s’adjugeant le bronze aux 1500 m, 3000 m et 5000 m et remportant l’argent au départ de groupe. Chaque fois, elle s’est frottée à ses partenaires d’entraînement Ivanie Blondin et Isabelle Weidemann, qui figurent dans l’élite mondiale.

« L’an dernier, j’ai investi 15 000 $ de mes économies pour payer mes camps et tous mes trucs, raconte Maltais en entrevue téléphonique depuis Calgary. Je jouais le tout pour le tout. Si ça fonctionne, je continue, sinon, j’étais quand même zen avec ça. Ce serait peut-être la retraite, mais j’aurais essayé. »

Je ne voulais avoir aucun regret et tout faire en mon pouvoir pour que ça réussisse.

Valérie Maltais

Sa première saison a surpassé ses attentes. Aux Championnats du monde de distances individuelles d’Inzell, l’hiver dernier, elle a pris le 12e rang au 3000 m et le 15e au 1500 m. À la poursuite par équipes, l’épreuve qui l’attirait le plus, elle a terminé au pied du podium avec Blondin et Weidemann.

« Ça a surpris tout le monde, se souvient Maltais. C’était une première pour moi. On avait pratiqué ensemble trois fois avant les Mondiaux, et ça n’avait vraiment pas bien été ! Quand je suis arrivée sur la ligne de départ, je me suis dit : ‟Oh my god, qu’est-ce que je m’en vais faire là ?” Maintenant, on pratique plus la poursuite et on connaît l’équipe [à l’avance]. »

La recrue s’est également qualifiée pour les Championnats du monde toutes distances de Calgary, où elle s’est classée 15e. Elle a abaissé ses temps tout l’hiver – « 17 secondes au 5000 m ! » – avant d’atteindre un plateau en raison de ses limites techniques.

« Cet été, j’avais vraiment hâte de reprendre l’entraînement, sachant exactement où je m’en allais et ce que je voulais faire. J’ai vraiment amélioré mes capacités physiques et je patine aussi de mieux en mieux. J’ai encore des habitudes de courte piste, j’ai fait ça pendant 22 ans. J’en ai donc les qualités, mais également les défauts, que je dois essayer de corriger un peu. Mais c’est tellement motivant et rafraîchissant ! »

Un nouveau sport

À sa grande surprise, Maltais a carrément l’impression de pratiquer un nouveau sport. « Je pensais que le courte piste et le longue piste étaient plus similaires. Finalement, ça ne l’est vraiment pas ! Je trouve ça difficile d’apprendre à se donner à 100 % sans trop mourir à la fin d’un 3000 m. Tu dois pousser les limites, mais il faut que tout reste ensemble et que tu patines encore à la fin. J’ai encore de la misère à trouver cette limite. On me dit que c’est tout à fait normal. »

Dès l’an dernier, elle a eu le privilège, grâce à l’ouverture de sa fédération, d’intégrer un groupe d’entraînement d’élite à Calgary. Elle patine avec Blondin, quadruple médaillée en Championnats du monde, et Weidemann, qui a battu un record de Cindy Klassen aux Championnats canadiens. Celles-ci l’ont accueillie à bras ouverts, tout comme l’entraîneur néerlandais Remmelt Eldering, qui a mené sa compatriote Esmee Visser vers l’or au 5000 m aux derniers Jeux de PyeongChang.

« Avec Isabelle et Ivanie, il y a vraiment une belle chimie, souligne la Québécoise. La compétition est saine entre nous. Elles me poussent à être meilleure et je sens qu’elles acceptent que ce ne soit pas moi qui tire les derniers tours à la fin d’un entraînement. J’en profite. »

Je grimpe les échelons, mais je le fais derrière des filles qui sont parmi les meilleures au monde. Je ne suis pas loin et c’est vraiment motivant. C’est ce qui fait que j’ai hâte d’aller m’entraîner chaque jour.

Valérie Maltais

C’est du donnant, donnant : Maltais partage son bagage de 10 années au plus haut niveau en courte piste, incluant trois Jeux olympiques (argent au relais en 2014) et 10 Championnats du monde (12 médailles, dont l’argent du général en 2012).

« Je ne suis peut-être pas la plus forte sur la glace, mais je suis capable d’aider mes coéquipières dans certaines portions mentales, dans le gym, en vélo. »

Après avoir raccroché, Maltais partait justement pour une sortie de vélo de trois heures avec Weidemann. Un dernier café à Bragg Creek avant l’arrivée du froid signalant le début de la saison de Coupe du monde.

Prochaine compétition : Coupe du monde de Minsk (Biélorussie), du 15 au 17 novembre

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Valérie Maltais

Une ambassadrice pour Québec
Québec a déjà une ambassadrice pour son Centre de glaces qui doit ouvrir l’automne prochain. Valérie Maltais ne cache pas son intérêt de venir s’installer dans la capitale nationale : « Ça m’attire énormément. Je voudrais m’entraîner là, c’est certain. La seule chose, je déménagerais là avec mon groupe d’entraînement et mes entraîneurs, en qui je crois beaucoup. Je n’irais pas là toute seule. » La Saguenéenne d’origine en discute fréquemment avec ses coéquipières Blondin et Weidemann, toutes deux d’Ottawa, et son coach Eldering, qui ne détesterait pas l’idée. Son copain Jordan Belchos, lui aussi membre de l’équipe canadienne, ne se ferait pas prier non plus, si les conditions s’y prêtent. Chose certaine, Maltais applaudit la construction de cette infrastructure. « C’est vraiment fantastique pour le sport au Québec. Ce sera super pour les jeunes qui n’ont jamais essayé le longue piste. Moi-même, je n’avais jamais essayé parce que je trouvais bien trop frette de patiner dehors… »