(Paris) L’Agence mondiale antidopage (AMA) a des soupçons sur l’authenticité des données des contrôles transmises par le laboratoire de Moscou pour faire la lumière sur le système institutionnel de dopage qui a sévi dans le pays entre 2011 et 2015, a-t-on appris samedi de source proche du dossier.

Le comité de révision de la conformité (CRC) de l’agence, compétent pour recommander des sanctions, doit présenter un rapport sur le sujet aux membres du comité exécutif de l’AMA, réunis lundi à Tokyo, a indiqué à l’AFP une source proche du dossier.

Cette source a confirmé un tweet du journaliste de la chaîne allemande ARD, Hajo Seppelt, selon lequel les Russes « sont soupçonnés d’avoir manipulé les données du labo de Moscou » remises à l’AMA début 2019, un geste qui avait permis de sortir de la crise. Mais cette même source a appelé à la prudence, indiquant que « les Russes doivent encore s’expliquer », et que le CRC ne devrait vraisemblablement pas émettre une recommandation de sanction dès lundi.

Contacté par l’AFP, un porte-parole de l’AMA a simplement indiqué que « les résultats du rapport » du CRC seraient « rendus public » après le comité exécutif de l’agence, mais qu’« il est prématuré pour l’AMA d’évoquer cette affaire » avant lundi.

La remise des données des contrôles antidopage du laboratoire de Moscou avait été l’une des conditions posées par l’AMA pour lever la suspension de la conformité de l’agence russe antidopage (Rusada) au code mondial antidopage, décidée en novembre 2015.

Si une fraude était avérée, cela pourrait conduire l’AMA à sanctionner de nouveau la Russie, avec des conséquences pouvant aller jusqu’à priver le pays de participer à des compétitions, comme les Jeux olympiques de Tokyo l’été prochain.

Puzzle

La Russie est déjà suspendue de toute compétition internationale d’athlétisme depuis novembre 2015 et les révélations sur un système de dopage institutionnel qui a secoué le sport mondial, même si des athlètes russes peuvent être sélectionnés sous drapeau neutre. La fédération internationale (IAAF) doit une nouvelle fois examiner le dossier lundi lors de son conseil, pour décider d’une réintégration ou non avant les Mondiaux de Doha (27 septembre-6 octobre).

Lorsque ses enquêteurs avaient récupéré les données brutes des contrôles en janvier, l’AMA avait immédiatement prévenu qu’elles devraient être authentifiées.

L’agence considère ces données, en quantité énorme – 24 téraoctets, soit l’espace disponible sur 5200 DVD, avait-elle précisé – comme une pièce du puzzle qui permettra de lever le voile sur ce qui se passait réellement dans le labo, où les résultats de centaines de contrôles auraient été blanchis.

Début juillet, alors que le travail d’analyse était toujours en cours, l’agence avait annoncé avoir ciblé quelque 298 sportifs « présentant les données les plus suspectes », précisant avoir transmis les dossiers de 43 d’entre eux aux fédérations sportives concernées en vue de sanctions. Depuis, douze haltérophiles russes ont été provisoirement suspendus sur la base de ces données, des cas qui s’ajoutent à des athlètes et des biathlètes.

La Russie a aussi été privée de drapeau et d’hymne aux Jeux olympiques d’hiver de PyeongChang en 2018, en raison des manipulations organisées sur les contrôles antidopage aux JO d’hiver de Sotchi, en 2014, où les Russes étaient arrivés en tête du tableau des médailles, à domicile.