Kamylle Frenette a été bien étonnée lorsqu’on lui a soumis, pour la première fois, l’idée de participer à des épreuves de paratriathlon. Malgré un pied bot, corrigé lorsqu’elle n’avait que quelques mois, la Néo-Brunswickoise n’a jamais hésité à multiplier les expériences sportives classiques.

Elle a pratiqué la ringuette, le soccer, le volleyball et la course à pied. Elle a suivi les traces de son père, Michel, en démarrant le triathlon à l’âge de 16 ans. L’ancienne coureuse de l’équipe féminine de cross-country de l’Université de Moncton, les Aigles bleues, a d’ailleurs remporté son lot de victoires en triathlon ou en duathlon.

« Lorsqu’on m’a approchée, je ne pensais même pas que j’allais être admissible. Dans mon environnement, notamment avec mes parents, mon handicap au pied n’a jamais été un sujet de conversation. Mes parents s’assuraient que je ne rate pas de nouvelles choses à cause de ça », indique celle qui participera à la première édition de la Série mondiale de paratriathlon, demain matin, au parc Jean-Drapeau.

Frenette s’aligne dans la catégorie PTS5, soit celle des paratriathlètes présentant des déficiences légères. Son pied droit est deux pointures plus petit que le pied gauche, dit-elle. Son mollet est également plus petit, tandis que la mobilité de sa cheville est limitée. « Quand j’essaie de lever mon pied, mon mouvement est vraiment restreint. »

Dans son cheminement, elle a bien ressenti quelques douleurs après ses entraînements de volleyball ou de longues sorties de course. Le patinage exigeait aussi un peu de débrouillardise lors des entraînements et matchs de ringuette. « J’avais des patins de la même grandeur malgré mon pied droit plus petit. Mon père devait enrouler ma cheville avec du ruban adhésif. C’était ça, les limites, mais ce n’était rien de majeur. »

Rien, en tout cas, pour la pousser à renoncer à ses plaisirs sportifs. Dans tout cet éventail, la course à pied a toujours été son activité préférée. Elle se revoit, plus jeune, faire des épreuves de 1 ou 5 km, tandis que son père s’élançait sur des distances plus longues.

« Ça ne passe pas »

C’est dans la foulée des Jeux paralympiques de Rio que l’un des participants canadiens, Shayne Dobson, a servi d’intermédiaire entre Frenette et Triathlon Canada. Un long processus s’est alors amorcé.

« Même alors que l’on faisait des tests pour voir si j’étais admissible à l’une des catégories, je me disais : “C’est sûr que je ne passe pas.” »

Quand la réponse positive est tombée, elle n’a pas hésité à embarquer dans cette nouvelle aventure qui, l’espère-t-elle, la mènera jusqu’aux Jeux paralympiques de Tokyo dans deux ans. Cela l’oblige toutefois à jongler avec le sport et ses études en pharmacie à l’Université Dalhousie, à Halifax.

Son horaire hebdomadaire comprend quatre ou cinq séances de natation, deux visites au gymnase, quatre entraînements de vélo et de trois à quatre sorties de course à pied.

La course, c’est ce qui me restreint le plus ; je ne peux d’ailleurs pas courir deux jours de suite. Après une course, j’ai toujours mal au pied droit. On essaie de ne pas trop augmenter le volume.

Kamylle Frenette

La jeune femme de 23 ans, originaire de Dieppe, a remporté une victoire et obtenu six podiums en huit évènements de paratriathlon. Elle a également pris le quatrième rang des Championnats du monde, en septembre dernier, malgré une fracture à un bras subie lors de la portion à vélo.

Au-delà des résultats et du rêve paralympique, c’est l’aventure humaine qui la guide. Malgré son handicap, et celui plus grave de certains équipiers, elle souhaite mettre de l’avant la notion de persévérance.

« On a deux athlètes complètement aveugles, et ce qu’ils peuvent accomplir est incroyable. En étant entouré de ces athlètes, c’est le fun de voir que, peu importe son handicap, on peut atteindre ce que l’on veut. […] Quant au sport, je suis heureuse de faire partie d’une équipe de haute performante. Triathlon Canada est super professionnelle. On est traités comme des pros et on est entourés de très bons entraîneurs. »

La Série mondiale de paratriathlon ITU débutera à 7 h 30 demain. Elle consiste en 750 m de natation, dans le bassin olympique, puis en cinq boucles de 4,1 km sur la piste du circuit Gilles-Villeneuve. Finalement, la portion de 5 km en course à pied se déroulera autour du bassin olympique.

« J’ai vraiment hâte. Ma famille et mes amis peuvent venir me voir, ce qui n’arrive pas souvent. C’est le fun d’avoir le soutien des Canadiens durant la course », se réjouit Frenette.