Pas facile de trouver le bon partenaire en patinage artistique, particulièrement en couple, et les carrières des athlètes sont rarement sans détours ou rebondissements.

Lubov Ilyushechkina, patineuse originaire de Moscou, a travaillé avec trois partenaires différents, dans trois pays. Championne du monde junior sous les couleurs de la Russie, avec Nodari Maisuradze, elle a décidé quelques années plus tard d'aller patiner avec le Français Yannick Kocon, mais la fédération russe a refusé de la libérer.

Contactée en 2014 par le Canadien Dylan Moscovitch, médaillé olympique à Sotchi qui venait de se séparer de sa partenaire Kirsten Moore-Towers, Lubov a finalement obtenu sa « liberté », et elle a débarqué à Toronto cet été-là.

Malgré d'excellents résultats, le duo a raté sa qualification pour les Jeux de PyeongChang par une seule place. Moscovitch est parti à la retraite, Ilyushechkina a accepté une offre du Cirque du Soleil qui montait un spectacle sur glace...

« Cela a été une très belle expérience, très différente de la compétition, a expliqué la jeune femme de 27 ans, hier en entrevue. Il y avait une belle camaraderie et je me suis fait beaucoup d'amis. Mais je suis ambitieuse et j'ai réalisé que j'aimais encore patiner dans le but d'aller au maximum de mes capacités. »

C'est un texto de Charlie Bilodeau qui l'a ramenée sur la patinoire de l'aréna Martin-Brodeur, à Saint-Léonard. Le patineur de Rimouski avait mis fin à sa collaboration avec Julianne Séguin il y a un an, après les Jeux et les Mondiaux. À 25 ans, après une période de doute, il avait décidé de poursuivre sa carrière.

« On s'était croisés souvent, sans vraiment se connaître, a-t-il expliqué en entrevue. Je savais toutefois à quel point Lubov était bonne, très rigoureuse dans son travail, et j'avais vraiment envie de patiner avec elle. On a commencé il y a trois semaines et je suis étonné de la rapidité avec laquelle nous avons progressé. »

« Nous avons une facilité à patiner ensemble, à bouger de la même façon. Je ne sais pas où cette collaboration va nous mener, mais c'est déjà emballant de réaliser où nous en sommes. »

L'entraîneur Richard Gauthier, qui a accueilli avec plaisir les patineurs à son club, estime qu'ils ont un grand potentiel. « Ce ne sont plus des débutants et ils vont vite faire leur place dans l'équipe canadienne, a-t-il expliqué. Cela dit, il faut leur donner le temps de développer leur chimie ensemble. »

« Habituellement, ça prend trois ans à une paire pour parfaire son synchronisme, trouver les éléments qui conviennent le mieux à ses qualités, peaufiner la présentation des programmes. Ça les met en bonne position pour aller aux prochains Jeux olympiques, en 2022 à Pékin. »

Fière d'être Canadienne

Ilyushechkina est prête pour le défi : « Je n'ai jamais eu la chance d'aller aux Jeux olympiques, je les ai ratés deux fois de justesse, et je crois que je peux encore progresser et réaliser ce rêve. Charlie et moi sommes très enjoués dans la vie, nous nous amusons beaucoup ensemble, et j'ai vraiment du plaisir à venir m'entraîner tous les jours. »

Les patineurs travailleront avec Gauthier et son collègue Bruno Marcotte, ainsi qu'avec les chorégraphes Marie-France Dubreuil et Patrice Lauzon. « Je ne connaissais pas personnellement les entraîneurs, mais je connaissais la réputation de cette école de paires [c'est à Saint-Léonard qu'ont travaillé Jamie Salé, David Pelletier, Meagan Duhamel et Eric Radford], a souligné Ilyushechkina. Cela va me permettre de progresser encore plus rapidement, entourée de plusieurs excellents duos. »

Et Lubov pense aussi que son expérience avec le Cirque du Soleil va l'aider : « Avec le cirque, nous performions pratiquement tous les jours et j'ai beaucoup appris sur les façons de toujours offrir une bonne performance, quelles que soient les conditions. Et j'ai maintenant assez d'expérience pour savoir qu'il n'est pas nécessaire de réussir une performance parfaite pour obtenir un bon résultat... »

Celle qui se débrouille déjà bien en français a vécu dans plusieurs villes au cours de sa carrière. « Je suis citoyenne canadienne depuis 2017, quelque chose à laquelle je n'avais jamais osé rêver. Je suis très fière de pouvoir représenter le Canada à nouveau dans les compétitions internationales. »

« J'ai beaucoup voyagé dans ma vie et je considère que le Canada est le plus beau pays du monde. J'aime beaucoup Montréal et je suis sûre que j'y serai heureuse au cours des prochaines années. »