Un beau jour, Cédric Morisset a eu envie de découvrir une autre facette de la course à pied. De son propre aveu, il était un peu « désabusé » de devoir payer 100, 150 $, voire plus, pour participer à une épreuve, ramasser sa médaille et passer à autre chose.

Que faire ? La solution est apparue, le 24 novembre 2016, sur la page Facebook du magazine américain Runner’s World qu’il consultait avant de s’endormir. Il voit une description du RWRunStreak, qui propose aux lecteurs de courir au moins un mile (1,6 kilomètre) quotidiennement entre l’Action de grâce et le jour de l’An.

« Penses-tu que je serais capable de courir ça pendant 40 jours de suite ? », demande-t-il alors à sa conjointe qui est allongée à côté de lui. « Je ne pense pas », dit-elle sans hésiter. Ce n’est pas la réponse qu’il attendait. Lui, le coureur qui compte plusieurs demi-marathons à son actif et qui effectue trois à quatre sorties par semaine, est piqué au vif.

Le lendemain, il s’y met donc. Il passe à travers un premier pépin physique à un genou et se rend au bout de ce défi. L’histoire débute.

« Quand le 1er janvier est arrivé, j’ai continué, indique-t-il. Je me suis alors demandé si j’allais être capable d’amener ça à 100 jours. Ensuite, j’ai essayé d’atteindre la demi-année qui s’est transformée en une année complète. Je n’ai pas arrêté depuis. […] Au départ, c’était un objectif, mais c’est devenu un mode de vie. Maintenant, c’est comme me brosser les dents ou répondre à mes emails. »

En date d’aujourd’hui, la séquence de Cédric Morisset s’établit à 1066 jours. En presque trois ans, il a tout connu : les courses sous la forte pluie, dans la canicule, le froid extrême ou en dépit de maladies. Le défi est aussi de caser les sorties entre son rôle de mari, de papa de deux enfants et un travail prenant, celui de directeur régional pour Golftown.

« Les meetings à 7 h 30 du matin à Toronto, c’est fréquent, indique le Blainvillois. Environ toutes les deux semaines, je dois faire mon deux kilomètres à 3 h du matin, rentrer prendre ma douche et filer à l’aéroport. »

Parlant d’aéroport, lui aussi, comme bien des coureurs en série, a dû faire son exercice quotidien entre deux avions.

À Zurich, le terminal faisait 500 ou 600 mètres et j’ai fait quatre ou cinq allers-retours.

Cédric Morisset

À Augusta, où a lieu le Tournoi des Maîtres de golf, il a aussi dû faire sa course, de nuit, après un repas un peu arrosé. « Je savais que je n’allais pas pouvoir courir cette journée-là. Un de mes collègues m’a dit : “T’es malade, je ne peux pas croire que tu fais ça.” Mais il est venu courir avec moi et il m’a soutenu mentalement. »

Humble face à la séquence

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

En date d’aujourd’hui, la séquence de Cédric Morisset s’établit à 1066 jours de course.

Selon les modalités de la United States Running Streak Association, une séquence demeure active lorsqu’un coureur effectue plus d’un mile par jour. Cédric Morisset, lui, n’a pas un chiffre précis à atteindre. Habituellement, il effectue, chaque semaine, une course de 5 à 10 kilomètres, deux de 5 kilomètres et quatre autres d’une distance inférieure.

Il maintient actuellement sa séquence malgré deux blessures, à un pied et à un mollet. « Dans la pureté de la course à pied, j’ai couru pieds nus. J’ai essayé de le faire le plus longtemps possible, mais l’asphalte commençait à être froid. J’ai remis mes chaussures, j’ai l’impression que, autant d’un côté comme de l’autre, je n’ai pas fait ça assez graduellement. »

Cet épisode lui rappelle, une fois de plus, qu’il doit rester « humble » par rapport à sa séquence. Loin de se projeter dans le temps, il prend les choses « un jour à la fois », et même « un pas à la fois ».

« De toute façon, il y a beaucoup d’humilité chez les gens qui font ça. Il n’y a personne qui fait ça pour se vanter, pour gagner une médaille ou pour gagner de l’argent, ajoute-t-il. C’est un dépassement de soi.

« À travers les années, je me suis rendu compte que nos histoires inspirent les gens. Loin de moi l’idée de penser que je suis un Pierre Lavoie, mais si on est capable de toucher des gens autour de soi et qu’on parvient à les faire bouger, ce sera ma petite part dans la société. »

À lire dimanche prochain : fin de notre série avec le portrait d’Isabel Ringuette, coureuse en série et… mère de six enfants.