Le Québec compte des centaines d’arénas. Ils portent des noms de politiciens. De curés. De citoyens émérites. D’écoles. De concessionnaires automobiles.

Le quartier Cloutier, à Rouyn, a déjà eu son « Centre de gaieté ». Joli. Mais trop souvent, nos élus se contentent de termes génériques. Le centre civique. Le centre sportif. Le centre communautaire. Le centre récréatif. Tout devient un centre. Alors on tourne en rond.

Le temps est venu de rebaptiser nos arénas. D’honorer les grands athlètes d’ici oubliés dans notre toponymie. Car il y en a. Beaucoup. Notamment les hockeyeurs des années 90 et les patineuses de vitesse.

Pour amorcer le dialogue, voici mes dix suggestions. J’attends les vôtres. Vous pouvez m’écrire à apratt@lapresse.ca. Je n’impose que deux critères : les candidats doivent avoir fait carrière dans un sport de glace et les athlètes doivent être retraités depuis au moins trois ans.

PHOTO GENE J. PUSKAR, ARCHIVES AP

Mario Lemieux

Mario Lemieux

Mario Lemieux a dominé dans le junior majeur, dans la LNH et sur la scène internationale. Il a remporté l’or aux Jeux olympiques. La Coupe du monde. La Coupe Stanley — deux fois. Il a compté le but gagnant de la Coupe Canada. Quoi d’autre ? Il a survécu à un cancer. A réussi son retour au jeu après une absence de trois ans. A acheté son équipe, les Penguins de Pittsburgh.

Que lui vaut ce palmarès dans la toponymie d’ici ?

Rien.

Une grande injustice. D’ailleurs, Mario Lemieux est de loin le hockeyeur québécois le plus prolifique dont le nom n’apparaît pas sur la marquise d’un aréna.

Plus de points sans aréna à leur nom

1. Mario Lemieux : 1771 2. Luc Robitaille : 1394 3. Pierre Turgeon : 1327 4. Jean Ratelle : 1267 5. Vincent Damphousse : 1205 6. Michel Goulet : 1153 7. Henri Richard : 1046 8. Alex Tanguay : 863 9. Scott Mellanby : 840 10. Bernard Geoffrion et Pierre Larouche : 822

Que rebaptiser ? L’Auditorium de Verdun. Avec ses 4000 sièges, c’est le deuxième aréna en importance sur l’île de Montréal. Mario Lemieux a grandi tout près, sur la rue Jogues, dans le quartier Ville-Émard.

PHOTO ARCHIVES LA PRESSE

Jack Laviolette

Jack Laviolette

Un personnage plus grand que nature. Imaginez Guy Lafleur et Gilles Villeneuve… dans un seul corps ! Jean-Baptiste Laviolette a été le premier joueur du Canadien de Montréal. Le premier capitaine de l’équipe. Le cofondateur du club. Il fut aussi l’athlète le plus casse-cou, le plus populaire et le plus progressiste du début du siècle. En plus d’exceller sur la patinoire, il était joueur de crosse, aviateur et pilote automobile. Il a été intronisé au Temple de la renommée du hockey en 1962.

Que rebaptiser ? L’aréna Salaberry. Laviolette est né en Ontario, mais c’est à Valleyfield qu’il a appris à jouer au hockey.

PHOTO CHRIS O'MEARA, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Manon Rhéaume

Manon Rhéaume

Le hockey féminin est peu représenté dans notre toponymie. Kim St-Pierre (Châteauguay) et Caroline Ouellette (Montréal) ont des glaces qui portent leur nom. Mais pas Manon Rhéaume. Un oubli inexplicable. Elle fut la première femme à jouer dans le hockey junior majeur et à disputer un match présaison dans la LNH. Elle a aussi gagné une médaille d’argent aux Jeux olympiques de Nagano, en 1998.

Que baptiser ? La glace principale du futur Colisée de Trois-Rivières. C’est dans cette ville que Manon Rhéaume a brisé le plafond de verre en gardant les buts des Draveurs, dans la LHJMQ.

PHOTO PAUL CHIASSON, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Danielle Goyette

Danielle Goyette

Seules six femmes sont intronisées au Temple de la renommée du hockey. Parmi elles, une Québécoise : Danielle Goyette. Une grande athlète d’ici. Elle a gagné trois médailles olympiques, dont deux d’or, et huit championnats du monde.

Que rebaptiser ? Le centre sportif d’Acton Vale. C’est l’aréna le plus près de son village natal, Saint-Nazaire d’Acton, qui a nommé un parc en son honneur.

PHOTO RYAN REMIORZ, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Scotty Bowman

Scotty Bowman

Il est l’entraîneur le plus victorieux de l’histoire de la LNH. Il a mené ses équipes neuf fois à la conquête de la Coupe Stanley. Il était derrière le banc du Canadien pour les cinq coupes de suite dans les années 70. Ce qu’on sait moins, c’est qu’il est né et a grandi à Verdun. Il a aussi habité longtemps à Dorval.

Que rebaptiser ? Le centre sportif Westwood. Situé au bout d’une piste de l’aéroport, cet aréna a été inauguré par Scotty Bowman à la fin des années 70.

PHOTO DENIS COURVILLE, ARCHIVES LA PRESSE

Patrick Roy

Patrick Roy

Petite exception à la règle : Patrick Roy a été actif dans la LNH ces cinq dernières années. Mais c’était à titre d’entraîneur-chef de l’Avalanche du Colorado. Sa carrière de joueur a pris fin en 2003 avec quatre Coupes Stanley, trois trophées Conn-Smythe, trois trophées Vézina et cinq trophées Jennings. Il occupe le deuxième rang parmi les gardiens les plus victorieux de l’histoire de la ligue, derrière Martin Brodeur. Et bien sûr, il est le gardien québécois qui compte le plus de gains sans avoir d’aréna à son nom.

Plus de victoires sans aréna à leur nom

1. Patrick Roy : 551 2. Marc-André Fleury : 439 3. Gump Worsley : 333 4. Daniel Bouchard et José Théodore : 286

Que rebaptiser ? Le Centre Vidéotron serait tout indiqué, étant donné l’implication de Patrick Roy dans le hockey à Québec. Mais ça ne risque pas d’arriver. Allons-y donc pour le Centre sportif de Sainte-Foy, la ville où il a grandi.

PHOTO ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Henri Richard

Henri Richard

Arénas du Québec portant le nom de joueurs de l’édition 1956 du Canadien : 10.

Arénas du Québec portant le nom de joueurs de l’édition 1971 du Canadien : 8.

Henri Richard faisait partie de ces deux équipes championnes. Au total, il a gagné 11 fois la Coupe Stanley comme joueur, un record. Humble, il a refusé dans le passé des hommages de la ville de Laval.

Que rebaptiser ? Un cas différent des autres. Ici, c’est le joueur qui s’est opposé à ce qu’un aréna porte son nom. Sinon, la glace principale de la Place Bell, à Laval, aurait été indiquée. 

PHOTO ARCHIVES LA PRESSE

Nathalie Lambert

Nathalie Lambert

Elle fut l’une des grandes patineuses de vitesse sur courte piste. Ses statistiques sont éloquentes.

• 28 médailles aux Championnats du monde • 5 records du monde • 3 titres de championne mondiale individuelle • 3 médailles olympiques

Pourtant, aucun aréna ne porte son nom.

Que rebaptiser ? L’aréna Saint-Louis. Contrairement à la croyance populaire, ce centre sportif de Montréal n’est pas nommé en l’honneur de la hockeyeuse France St-Louis. Il est situé dans le Plateau Mont-Royal, quartier d’enfance de Nathalie Lambert.

PHOTO GRAHAM HUGHES, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

François-Louis Tremblay

François-Louis Tremblay

On se souvient — avec raison — du patineur Marc Gagnon, l’olympien canadien le plus médaillé chez les hommes. Mais saviez-vous que son coéquipier François-Louis Tremblay a remporté autant de médailles que lui aux Jeux olympiques ? « Flou » a gagné deux fois l’or, deux fois l’argent et une fois le bronze. Il a aussi terminé dix fois sur le podium aux Championnats du monde.

Que rebaptiser ? Le Centre sportif Mistouk, à Alma, ville d’origine du patineur. Mistouk est un joli nom, mais il est déjà très présent ailleurs dans la toponymie locale.

PHOTO PIERRE MCCANN, ARCHIVES LA PRESSE

Yvon Jolin

Yvon Jolin

Bien avant le Red Bull Crashed Ice, il y avait le saut de barils en patins. Et Yvon Jolin en était le Wayne Gretzky. En 1975, plus de 6000 personnes ont assisté à sa performance aux Jeux du Québec. Selon l’Encyclopedia of World Sport, Yvon Jolin détient le record du monde avec un saut réussi de 18 barils, soit environ 9 mètres.

Que rebaptiser ? Saint-Bruno-de-Montarville était considéré comme la capitale du saut de barils. L’aréna local porte déjà le nom d’un patineur artistique, Michael Bilodeau, mais la ville compte 11 glaces extérieures. L’une d’elles mériterait d’être rebaptisée en l’honneur de cet ambassadeur d’un sport aujourd’hui disparu.