Le curling canadien effectue un retour aux sources en revenant à Montréal pour une première fois depuis 1979, alors que le Tournoi des coeurs aura lieu à l'aréna Maurice-Richard du 1er au 9 février.

L'Association canadienne de curling et le commanditaire principal du tournoi, Kruger, dont la maison-mère est à Montréal, ont donc pris un certain risque cette année, en organisant ce qui est le championnat canadien de curling féminin dans un marché où le curling est loin d'être roi.

«C'est certain que si on était à Regina, en Saskatchewan, il n'y aurait rien à vendre parce que c'est un sport bien connu là-bas, a mentionné Francine Poisson, ancienne championne québécoise de curling et vice-présidente du comité organisateur. Dans un gros marché comme Montréal, c'est un défi un peu plus important. Est-ce qu'on ressent un peu plus de pression? Probablement.»

Un événement de l'envergure du Tournoi des coeurs peut attirer près de 100 000 spectateurs en Alberta, comme ce fut le cas en 2012 à Red Deer, et même jusqu'à 155 000 spectateurs, comme en 1998 à Regina. Et si le noyau d'amateurs de curling est plus petit à Montréal, d'autres facteurs peuvent jouer en sa faveur.

«Il y a tout le temps un noyau de personnes qui suivent le Tournoi des coeurs, a mentionné Mme Poisson. Je les vois presque à chaque année. Et naturellement, le fait que ce soit à Montréal, je le voyais à Kingston l'an dernier, il y avait beaucoup de gens qui disaient: "Ah, oui! On va y aller parce que c'est à Montréal". Ça donne une bonne raison d'aller visiter la ville.»

Il s'agit aussi un peu d'un retour aux sources pour le curling canadien, alors qu'on reconnait généralement que les premiers matchs de curling disputés au Canada ont eu lieu à Québec, quand des soldats écossais ont fait fondre des boulets de canon afin de les transformer en «pierres» de fer vers le milieu du 18e siècle. Le plus vieux club sportif toujours actif en Amérique du Nord se retrouve aussi au Québec: le club de curling Royal Montreal, fondé en 1807.

«Les racines du curling au Canada sont ici et c'est un fait connu par peu de gens parce que c'est devenu très populaire dans l'Ouest canadien, a raconté Mme Poisson. Les gens associent souvent le sport avec l'Ouest, mais c'est ici que ç'a commencé.»

Et si aucune formation du Québec n'a remporté le Tournoi des coeurs depuis sa création en 1982, le Québec compte quand même une victoire dans son histoire au championnat canadien de curling féminin. L'équipe de Lee Tobin, Marilyn McNeil, Michelle Garneau et Laurie Ross avait gagné les grands honneurs en 1975. Mme Tobin n'est malheureusement plus de ce monde, mais les trois autres membres de l'équipe seront présentes au banquet d'ouverture.

Des victoires du Québec pour vendre des billets

Les chiffres des ventes de billets n'étaient pas connus au moment d'écrire ces lignes, mais Mme Poisson a indiqué qu'ils s'envolaient plus rapidement que l'an dernier, quand le tournoi a eu lieu à Kingston, en Ontario.

Sans rêver, Mme Poisson a admis qu'une bonne performance de l'équipe du Québec, qui sera guidée par Allison Ross, pourrait mousser les ventes au cours du tournoi en générant un buzz dans les médias, un peu comme on l'a vu au cours des dernières semaines avec les performances d'Eugenie Bouchard aux Internationaux de tennis d'Australie.

«Si l'équipe du Québec connaît un bon début de tournoi, qui sait ce qui peut arriver? a-t-elle dit. L'an dernier à Kingston, c'est l'équipe de l'Ontarienne Rachel Homan qui allait bien, et il y avait de plus en plus de personnes qui venaient les voir. Et le vendredi, samedi et dimanche, l'aréna était plein.»

Ross, qui en sera à son quatrième Tournoi des coeurs et son troisième en tant que représentante du Québec, a d'ailleurs admis qu'elle est consciente qu'il y aura un peu plus de pression sur son équipe cette année.

«On veut connaître un bon tournoi parce que c'est à Montréal, a expliqué celle qui joue au club de curling Glenmore, à Dollard-des-Ormeaux. Il y a donc un petit peu plus de pression. Je veux que les gens de Montréal aient encore une équipe d'ici à encourager à la fin de la semaine. C'est important de se qualifier pour les éliminatoires.»

Les Jeux olympiques représentent aussi un événement où le curling reçoit une belle couverture de la part des médias, même au Québec. Les deux tournois se succéderont rapidement cette année et auront peut-être un impact positif sur le développement de ce sport combinant habiletés physiques et stratégie au Québec.